
Une dizaine de pays africains tiendront ou ont planifié des élections pour cette année, et c'est le Sénégal souvent vanté pour sa démocratie qui s'est rendu le premier aux urnes, le 26 février.
L'écrivain et commentateur politique américain Gore Vidal a décrit les démocraties comme des endroits où des élections sans conséquences étaient tenues à grand renfort d'argent, avec des candidats interchangeables.
Parmi les pays qui s'apprêtent à voter cette année, beaucoup ne savent pas comment financer leurs élections, comme le Zimbabwe, la Somalie, la Guinée-Bissau, dont les économies sont indigentes.
Pour d'autres pays, la campagne sera centrée autour des thèmes déterminants et récurrents du manque de moyens et de l'exercice personnel du pouvoir. Voir le Kenya, l'Angola et le Lesotho.
Et pour les autres pays, les candidats aux élections pourraient être changés les uns par les autres, tant leurs carrières sont liées aux gouvernements en place. Le Sénégal, le Ghana et Madagascar sont à ce titre exemplaires.
Quelques pays cependant donnent à la démocratie africaine balbutiante une chance de se renforcer, comme le Mali ou, de manière intéressante, l'Egypte.
Il y a tout juste deux ans, environ 17 pays ont célébré avec faste le 50ème anniversaire de leur indépendance. Les élections qui ont eu lieu depuis ont été considérées comme un moyen pour mesurer le degré d'avancement du continent.
L'année dernière, le Bénin, le Niger, le Nigeria, le Cap Vert, le Liberia, la Gambie, le Gabon, la République démocratique du Congo, et Sao Tome et Principe ont organisé des élections qui ont mobilisé l'attention. Les résultats étaient variés mais tout semblait indiquer une tendance vers des élections régulières, mais si dans certains pays comme la Gambie, les élections furent entachées d'irrégularités.
Des situations complexes
Cette tendance fera l'objet d'un examen encore plus attentif cette année, car plusieurs facteurs sont en jeu. Bien entendu, des changements importants se sont produits, qui ont poussé certains pays vers les urnes. Le printemps arabe a ainsi été à l'origine de bouleversements en Egypte.
Fait remarquable, cette année quatre pays empêtrés dans des situations délicates vont essayer de se hisser au-dessus de leurs difficultés. L'Egypte, la Somalie, Madagascar et le Zimbabwe sont tous au pied du mur et les résultats des élections pourraient servir de cas d'école pour illustrer la façon de résoudre les crises politiques sur le continent.
La Sierra Leone et l'Angola avancent à pas lourds sur le chemin de la reconstruction après des années de guerre civile.
Des facteurs extérieurs pèsent également de tout leur poids sur les élections de cette année. Les Etats-Unis tiennent absolument à avoir leur mot à dire dans l'Egypte post-Moubarak, alors que le Kenya voit deux de ses candidats déclarés mis en accusation par le Tribunal pénal international pour crimes contre l'humanité.
La Communauté de développement d'Afrique australe s'est également investie de manière important à Madagascar et au Zimbabwe.
Cette année, certaines grandes figures africaines verront leur influence mise à l'épreuve par les élections, et de la manière dont les choses se présentent, le contrôle d'Eduardo dos Santos sur l'Angola semble toujours aussi solide, alors que, de manière surprenante, Robert Mugabe semble vivre un nouvel état de grâce.
Abdoulaye Wade, âgé de 85 ans, a mené une campagne énergique et est déterminé à rester au pouvoir jusqu'à 92 voire 99 ans, selon ses propres mots.
Au Zimbabwe, en Guinée-Bissau et en Angola, le futur des partis politiques au pouvoir depuis l'indépendance est en jeu.
Bien souvent en Afrique, des violences potentielles accompagnent les résultats des élections. La Guinée-Bissau, le Kenya, le Zimbabwe, la Sierra-Leone et, de manière inattendue, le Sénégal, feront à ce titre l'objet de toutes les attentions.
Un examen sévère
Tous les signes semblent indiquer que presque tous les pays devront se colleter avec le problème toujours incendiaire des registres électoraux, qui est toujours évoqué quand des accusations de trucage sont lancées.
Le Ghana, qui fait figure de modèle démocratique, devra subir un examen sévère cette fois-ci. La corruption apparaît comme le problème principal alors que le parti aux affaires tente de se dépêtrer d'un scandale de pots-de-vin.
En outre, le Mali, touché par la rébellion et le terrorisme, continue fièrement à suivre le chemin du pouvoir civil après une période de domination de la junte militaire. Le président Amadou Toumani Toure devrait se retirer à l'issue des deux mandats maximum prévus.
Le président Wade, au Sénégal, a refusé cette éventualité et a interprété la constitution de manière à lui permettre de se présenter pour un troisième mandat, ce qui a provoqué l'ire de l'opposition et met en péril le passage pacifique du pouvoir.
La Somalie, que le monde tente de ne pas abandonner complètement, va se lancer dans une aventure qu'elle n'a pas connu depuis plus de trois décennies: la tenue d'élections. Un accord de transition autorise la tenue d'élections après août, mais un ensemble de conflits d'intérêts et de luttes avec les djihadistes risquent d'en empêcher l'organisation ailleurs que sur le papier.
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