Les liens croissants entre la Chine et les pays africains ont conduit à une augmentation spectaculaire du nombre d'étudiants africains poursuivant des études universitaires en Chine. Mais beaucoup de ces élèves ne mettront jamais en pratique les compétences acquises dans les classes chinoises dans le cadre d'un travail en Chine. Tebogo Lefifi, président exécutif de Jeunes professionnels et étudiants africains (YAPS), entretient un réseau de plus de 1 500 jeunes africains qui vivent et étudient en Chine. Selon lui, la majorité de ces jeunes n'y poursuivront pas de carrière.
Il ne s'agit cependant pas d'un manque d'intérêt. Beaucoup d'étudiants présents à l'atelier CV organisé par YAPS le 9 décembre 2012, déclarent espérer travailler en Chine après l'obtention du diplôme, sans cependant faire preuve d'optimisme quant à leurs perspectives d'emploi, citant comme obstacle majeur le marché concurrentiel du travail en Chine. Tebogo, qui a fondé YAPS en 2009, estime que moins de 10 % des africains détenteurs de diplômes chinois travaillent ensuite en Chine, et l'obtention d'un visa est une des difficultés auxquelles sont confrontés ces derniers. Les visas d'études expirent un mois après l'obtention du diplôme, et beaucoup sont ceux qui doivent rentrer dans leur pays faire une nouvelle demande de visa. Le transport et le prix du visa représentent une forte somme pour les nouveaux diplômés, et de nombreuses entreprises chinoises ne couvrent pas ces dépenses pour les employés formés en Chine. « Nous avons besoin que ce marché nous soit plus ouvert », déclare Anthony Lenaiyara, étudiant en dernière année de génie électrique à l'Université d'aéronautique et d'astronautique de Beijing.
Ce dernier, boursier du Conseil des bourses de Chine, souligne que pour certains de ses pairs, ces questions de marché de l'emploi et de visa ne sont pas pertinentes. Les bourses d'études visent à stimuler les étudiants africains et à offrir un enseignement universitaire gratuit en échange de la promesse de retourner en Afrique une fois le diplôme en poche pour y mettre à profit leurs nouvelles compétences.
Mais de nombreux élèves y sont réticents, au motif qu'ils n'ont pas les connexions que leurs camarades restés étudier en Afrique auront pu tisser. Anthony Lenaiyara doute de sa compétitivité sur le marché de l'emploi en Afrique, arguant que de nombreuses entreprises africaines ne sont pas impressionnées par les diplômes chinois, et demandent d'effectuer un travail supplémentaire, y compris des stages non rémunérés, avant d'obtenir une certification formelle reconnue par les employeurs africains. Tebogo Lefifi reconnaît que les entreprises et les gouvernements africains comprennent encore mal la valeur des diplômés en Chine, dont l'expérience est un atout majeur pour des entrepreneurs travaillant pour des entreprises familiales ou pour des entreprises chinoises opérant en Afrique.
Tebogo conseille aux membres de YAPS de faire valoir leurs compétences uniques, telles que les compétences linguistiques et la connaissance de la culture chinoise, pour compenser les difficultés rencontrées sur le marché du travail. Pour ce dernier « la plupart des diplômés ne se rendent pas compte que des études en Chine sont un atout », et il souligne l'importance de savoir se vendre, rappelant que « beaucoup d'étudiants ne sont pas capables d'écrire eux-mêmes leur CV ».
D'autres ont contourné ces problèmes en créant leur propre entreprise. Danilo Armando et Coana Sebastiao, qui ont respectivement étudié l'économie et l'architecture, ont quitté le Mozambique pour l'université de Pékin. Après avoir obtenu leur diplôme, ils sont retournés au Mozambique et ont fondé DDS commerce, une entreprise spécialisée dans la machinerie lourde. Après avoir construit une base solide en Afrique, le duo se prépare maintenant à étendre ses activités en Chine. Affilié à YAPS dès leur arrivée, ils se rendent maintenant à des foires au recrutement de nouveaux talents pour leur entreprise. |