
Des marchés alternatifs
Le ministère du Tourisme du Kenya assure que la réduction du temps de trajet encouragera les touristes chinois à visiter le pays. « Nos marchés traditionnels s'assèchent », explique Phyllis Kandie, secrétaire de cabinet pour les affaires est-africaines, le commerce et le tourisme, se référant aux sources traditionnelles de tourisme comme le Royaume-Uni, les États-Unis et l'Australie. « Nous devons chercher d'autres marchés que nous pourrons exploiter s'il existe des moyens de transport pratiques. »
Le tourisme, deuxième source de revenus des échanges étrangers au Kenya pendant les années précédentes, s'est pratiquement effondré après que les pays occidentaux ont publié des consignes déconseillant aux touristes de se rendre au Kenya en raison des incidents terroristes. Or les zones côtières du Kenya dépendent presque entièrement des revenus du million de touristes qui s'y rendent annuellement.
Les experts affirment que l'impact des touristes chinois pourrait être positif ou négatif, selon la manière dont les compagnies aériennes réagissent. « Beaucoup de personnes voyagent en Chine actuellement. Les Chinois s'engagent de plus en plus dans le commerce en Afrique, et les échanges augmentent », explique James Wanjagi, analyste sur les compagnies aériennes à Nairobi. « Nous (Kenyan Airlines) ne servons pas tous ceux qui viennent de Chine. Si les prix sont corrects, l'impact sera très important. La question est de savoir à quel point chacun sera compétitif. »
Traditionnellement, les passagers aériens de l'Afrique vers la Chine passent par Kenya Airways, Ethiopian Airlines ou des compagnies du Moyen Orient. Les deux nouveaux entrants permettront d'avoir plus d'avions pour les passagers. Mais la compétition sera aussi plus rude, et une bataille des prix ainsi que pour la possession des parts de marché est à prévoir.
« Je pense que les compagnies aériennes locales survivront si elles adoptent certaines stratégies. Par exemple, les avions doivent être bien choisis. En outre, il sera important pour eux de garder de bons prix. Je prévois une guerre des prix, affirme Wanjagi. Il faut comprendre qui arrive pour prendre notre repas, comment il le prend, et trouver une manière de changer les choses. Bien sûr, ce sera en ajustant les prix et en améliorant le service. »
Les deux nouveaux entrants pourraient cependant ne pas entrer en compétition avec les compagnies locales si celles-ci choisissent une stratégie de collaboration plutôt que de compétition, ajoute-t-il. Le plus grand défi pour les compagnies chinoises sera de collaborer avec les autres compagnies pour permettre à leurs passagers d'atteindre d'autres villes en Afrique. C'est pourquoi Ethiopian, Kenya Airways et South African Airways peuvent y trouver une opportunité, car ce sont eux qui détermineront les tarifs au prorata, les tarifs que demande une compagnie à une autre pour transporter ses passagers.
De nombreux défis
Ce n'est pas le seul défi. «N'importe quelle compagnie aérienne ouvrant une ligne vers l'Afrique se trouvera confrontée au même problème, que les compagnies aériennes rencontrent depuis des années, souligne Kuuchi. La sécurité reste un problème permanent en Afrique, même si les gouvernements et les compagnies font d'énormes progrès dans ce sens.
Les autres défis comprennent les prix fluctuants du pétrole, les frais d'infrastructure, le manque d'infrastructures aéroportuaires de niveau international et un manque de cadre libéralisé des services aériens.
Le continent africain a l'espace aérien le plus restrictif au monde. Bien que 16 des 54 pays africains soient enclavés, des tarifs protectionnistes et des barrières non-tarifaires s'opposent à la libre circulation des personnes, et plus encore des avions. Cela augmente le prix des billets d'avion et réduit les revenus pour les opérateurs. Les compagnies africaines majeures ont survécu car leurs gouvernements avaient signé des accords bilatéraux sur le transport aérien dans les zones où elles volent, ce qui leur a permis d'augmenter les destinations et la fréquence des vols.
En 1999, 44 pays d'Afrique ont signé la Décision de Yamoussoukro, qui met en place un certain nombre de « libertés » du transport aérien. Mais la plupart des pays sont réticents à mettre en place l'accord, même s'ils profiteraient en pratique de l'ouverture de leur espace aérien. Le transport aérien crée 6,9 millions d'emplois en Afrique et injecte 80 milliards dans le PIB, selon la Banque mondiale.
L'année dernière, l'AITA a commandé une étude pour déterminer l'impact de la libéralisation des espaces aériens dans 12 pays africains avec un trafic combiné de passagers internationaux de plus de 60 millions par année. Les résultats indiquent que les passagers économiseraient 500 millions de dollars et bénéficieraient d'un temps de vol réduit. Au moins 155 000 emplois seraient créés, ce qui apporterait 1,3 milliard de dollars au PIB. |