Le Président nigérian Goodluck Jonathan a déclaré lors du Forum économique mondial de cette année qu'« il est plus facile d'acheminer des marchandises depuis les pays africains vers l'Europe et le reste du monde qu'entre les pays d'Afrique ».
Il a ainsi abordé un problème qui touche l'Afrique depuis des décennies et qui est en train de devenir un important sujet de discussion pour le continent. Avec la crise économique mondiale et la croissance du continent africain, le commerce régional doit être prix au sérieux car il a le potentiel d'assurer la croissance économique et l'emploi.
Il existe encore des limites à l'augmentation des échanges à l'intérieur de l'Afrique. De nombreux pays, après des années de conflit et d'inertie, souffrent d'une insuffisance d'infrastructures pour les transports. En outre, les barrières commerciales varient d'un pays à l'autre et constituent un casse tête pour les partenariats commerciaux. Il existe aussi une croyance tenace, dans le secteur public et privé, que l'Afrique devrait toujours investir à l'étranger ou attirer des investissements étrangers.
« L'Afrique investit en Afrique » deviendra un slogan pour le Nigeria, l'Afrique du Sud et l'Angola, tout en encourageant la diaspora à revenir sur le continent pour profiter d'opportunités et apporter leurs compétences, explique Mme Ngozi Okonjo-Iweala, ministre des Finances et coordinatrice pour l'économie du Nigeria.
Celle -ci ajoute : « Il faudra des années pour fournir des lignes de transport efficaces à travers le continent, et les obstacles culturels, religieux et politiques à cette collaboration intracontinentale ne seront pas surmontés du jour au lendemain. Il est difficile, par exemple, d'imaginer un commerce de grande ampleur entre l'Égypte et le Sénégal, ou entre la Tanzanie et le Ghana. Néanmoins, il est possible - et même probable - que l'Afrique, dotée d'abondantes ressources naturelles et d'une population jeune, rivalise avec l'Asie pour la place de continent du 21e siècle ».
D'après le Plan d'action 2012 pour Stimuler le commerce intra-africain de l'Union africaine, le commerce intra-africain se situerait autour de 10 %, alors qu'il est de 60 % en Europe, de 40 % en Amérique du Nord et de 30 % dans l'union ASEAN. Même en évaluant le commerce transfrontalier informel et non enregistré, le montant total des échanges dans le continent atteindrait à peine de 20 %, et reste inférieur aux autres grandes régions du monde.
Pour assurer la croissance de ce commerce, le rapport suggère d'intégrer le commerce intra-africain au commerce national et aux stratégies de développement ; de renforcer le rôle du secteur privé, du secteur privé informel et des femmes dans la formulation de la politique commerciale; de renforcer le commerce intra-africain des produits alimentaires ; de s'engager à libéraliser les secteurs des services liés au commerce ; de s'engager à harmoniser les règles pour l'origine des produits et les régimes commerciaux, et enfin de promouvoir le « Made in Africa » et les produits achetés en Afrique.
Certains sceptiques croient que le discours public et la réalité sur le terrain sont très différents, et que les droits de douane et la myriade de barrières non tarifaires étouffent encore les échanges. Cependant, des efforts ont été faits pour créer une zone de libre échange continentale (CFTA) qui s'appuie sur des initiatives de libre-échange en cours dans les communautés économiques régionales.
Le Forum économique mondial (WEF) de cette année a émis un signal clair: les dirigeants africains qui évoquent toutes ces potentialités doivent maintenant produire des résultats concrets. Mme Okonjo-Iweala l'a souligné à juste titre : « L'Afrique va continuer à faire preuve d'innovation dans l'utilisation des technologies existantes, comme les téléphones mobiles, pour stimuler la productivité et fournir de meilleurs services sanitaires et éducatifs. À titre d'exemple, le gouvernement nigérian met en œuvre un système de paiement par portefeuille électronique dans sa chaîne d'approvisionnement agricole, permettant aux agriculteurs ruraux d'acheter des engrais directement chez les fournisseurs et d'éviter les intermédiaires corrompus ».
(L'auteur est responsable de la communication d'EMRC - organisation de renommée internationale offrant une plate-forme de discussion pour les secteurs public et privé de l'Afrique sur les possibilités de partenariat - www.emrc.be) |