Développer l'agriculture de
l'Afrique
La catastrophe qui se déroule dans la Corne de
l'Afrique illustre l'urgence qu'il y a à développer l'industrie
agricole sur le continent
par Jessica Frommer
La crise alimentaire qui se déroule dans la Corne
de l'Afrique a mis en lumière la situation précaire de certaines
populations africaines et illustre l'urgence qu'il y a à développer
les denrées alimentaires sur une plus vaste échelle.
Selon les estimations, 60 % des Africains
travaillent dans l'agriculture. Ce secteur est la base de biens des
économies africaines et fournit du travail et un revenu à des
millions de ménages.
A l'heure actuelle, le monde devrait se tourner
vers l'Afrique et fixer son attention sur une seule chose : le
potentiel du continent. Avec le chiffre de « 7
milliards » qui pèse lourd dans la démographie mondiale, il
est plus que jamais indispensable d'« agir
maintenant ».
« Si l'Afrique investissait dans l'agriculture
la somme de 22 milliards de dollars qu'elle dépense en importation
de nourriture et en aide alimentaire, la région pourrait en dix
ans mettre en œuvre les 4 piliers agricoles préconisés par le
CAADP », explique le Professeur Monty Jonas, lauréat du Prix
mondial de l'alimentation, directeur général du Forum pour la
recherche agricole en Afrique (FARA) et membre du conseil
d'administration de l'EMRC.
Le Programme détaillé de développement de
l'agriculture africaine (CAADP) a défini des objectifs ambitieux
pour la croissance agricole annuelle de l'Afrique, qui se décline
en sept piliers : augmenter la productivité, mettre à jour la
chaîne de valeur, exploiter la demande locale, régionale et
internationale, renforcer les efforts technologiques et la capacité
d'innovation, promouvoir un financement efficace et innovant,
encourager la participation du secteur privé, et améliorer les
infrastructures ainsi que l'accès aux sources d'énergie. Les
mesures et le calendrier mis en route par les organes dirigeants
ont instauré une nouvelle approche dans la réalisation d'une
croissance durable impliquant le secteur privé. La majeure partie
des fermiers africains relève du secteur privé, dans le cadre de
petites et moyennes entreprises. Leurs besoins doivent être pris en
compte dans l'équation globale. Du point de vue de l'homme
d'affaires africain, le message est simple. « Nous ne
cherchons pas de l'aide, nous cherchons à contacter des partenaires
commerciaux. C'est aussi simple que ça », explique Ramadhan
Hashim Khalfan, directeur général de l'Autorité tanzanienne de
développement du commerce, qui a réussi à étendre ses activités en
développant un réseau grâce à l'EMRC. Il a pu rencontrer des hommes
d'affaires indiens désireux d'investir dans la recherche de
semences, les semences commerciales, la production agricole et la
valeur ajoutée. Une fois que les pourvoyeurs de fonds et les
porteurs de projets se rencontrent, alors une partie importante du
travail préparatoire est accomplie. Pamela
Anyoti, ougandaise, a fait connaître son projet
lors du Forum Agribusiness organisé par l'EMRC à Kampala en 2010 et
a reçu un financement de la Swiss Foundation for Technical
Cooperation pour la production de plants de cacaoyer à haut
rendement, dans le cadre de son nouveau projet autour du cacao. Ce
projet concernera 12 000 petits producteurs. « Ce
partenariat a doublé de volume et démontre la crédibilité de mon
approche qui permet de développer une affaire faisant participer
ceux qui sont généralement exclus des intrants agricoles et des
marchés sécurisés », nous explique-t-elle.
Les points permettant de libérer le potentiel
agricole de l'Afrique peuvent être reliés à travers des
partenariats comme le PNUD qui assure l'inclusion de petits
fermiers dans une plus large chaîne de valeur, et la Nouvelle
vision de l'Agence américaine pour le développement international
(USAID) qui démontre le rôle joué par le commerce pour répondre aux
besoins alimentaires et nutritionnels mondiaux grâce à une
croissance accélérée, durable et portée par l'agriculture. Pour
permettre une croissance durable, le Professeur Jones met en avant
quatre questions importantes qui doivent être maîtrisées :
accroître la surface des terres cultivées, augmenter les
rendements, réduire les pertes après récolte et accroître la valeur
ajoutée.
Les images venant de la Corne de l'Afrique montrant
des communautés entières déracinées à cause de la famine ne doivent
plus se reproduirent dans les années futures. C'est pourquoi, afin
de permettre aux petits exploitants de s'intégrer à une grande
chaîne de valeur, il est nécessaire de leur donner accès au
financement et à des partenaires commerciaux potentiels grâce à
l'« agriculture intégrée » et des « modèles de
commerce intégré ». Idit Miller, vice-président d'EMRC
International, l'a déjà fait remarquer: « faire en sorte que
les hommes d'affaires africains, les organisations internationales
et les investisseurs étrangers collaborent ou simplement
connaissent les projets les uns des autres est la première étape,
et la plus importante, pour développer le secteur de
l'agrobusiness. Relier tous les éléments ensemble, rassembler les
idées et les objectifs communs, c'est ce dont le secteur a
besoin. »
L'Afrique peut être la solution à la croissance
démographique mondiale. Elle a le potentiel pour se nourrir et
nourrir les autres. Elle a besoin du dynamisme incarné par des
personnes comme Mme Anyoti ou M.Khalfan, ce qui signifie établir un
business et s'associer avec les bonnes personnes. En d'autres mots,
le continent a besoin de mettre en œuvre des mesures inclusives et
d'encourager la collaboration des secteurs privé et public.
L'auteur est la directrice de la communication
de l'EMRC, une organisation de réputation mondiale qui crée des
passerelles pour que le secteur privé et le secteur public se
rencontrent. - www.emrc.be
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