Le voyage en Chine du Président kényan Uhuru Kenyatta en août 2013 illustre l'augmentation des relations bilatérales entre le Kenya et la Chine, qui célébrera cette année 50 ans de coopération diplomatique.
Le Kenya estime que la Chine peut l'aider à se développer et à stimuler son économie. La Chine va aider à financer et construire le second port en eaux profondes du Kenya à Lamu ainsi que des pipelines et des chemins de fer.
L'autoroute Thika, construite avec l'aide de la Chine, a ouverte en 2012 au Kenya. C'est la meilleure route d'Afrique orientale et centrale et un exemple positif du partenariat entre les deux pays. Le Kenya voit en la Chine un moyen d'affaiblir l'emprise économique des anciennes puissances coloniales européennes et d'Amérique du Nord, ainsi que des institutions financières internationales telles que le FMI et la Banque mondiale. Ces institutions financières occidentales ont exercé une pression économique et politique sans précédent sur le Kenya et d'autres pays africains, avec des politiques hostiles telles que les programmes d'ajustement structurel (PAS) qui ont entrainé la pauvreté dans de nombreuses régions du pays.
Les intérêts de la Chine au Kenya sont multiples, notamment avec l'exploration pétrolière et minière et le développement agricole. L'émergence de la Chine comme géant industriel majeur attire l'attention et inquiète les puissances mondiales dominantes, en particulier les États-Unis et les pays européens. Les investissements et les activités de la Chine en Afrique ont reçu une grande couverture médiatique négative des médias occidentaux. Le Kenya et d'autres pays africains courtisent la Chine pour améliorer leur statut économique régional et international. De nombreuses études ont été menées sur diverses initiatives chinoises au Kenya et dans le reste du continent. La Chine a stimulé l'économie de nombreux pays africains en accordant des prêts souples et équitables qui n'auraient pas été possible avec le FMI ou la Banque mondiale au cours des 50 dernières années. Il est intéressant de noter que l'une des caractéristiques de cet engagement est la primauté de la géopolitique contre les intérêts économiques nationaux dans l'interaction politique, socio-culturelle et économique entre la Chine et le Kenya. Des échanges culturels forts existent entre la Chine et le Kenya, où deux Instituts Confucius organisent de nombreuses activités linguistiques et culturelles.
La présence de la Chine, en Afrique et au Kenya en particulier, est redoutée par l'Occident, où certains observateurs s'inquiètent d'une seconde Guerre froide. Cette présence a suscité diverses réactions à travers l'Afrique et le reste du monde. Certains s'inquiètent de l'influence chinoise croissante en Afrique. Au Kenya, la Chine est actuellement impliquée dans la construction de 12 des 19 principaux axes routiers. Ceux qui s'opposent à l'expansion chinoise ont fait valoir que la stratégie chinoise était motivée par la nécessité d'exploiter les ressources pétrolières et minérales du Kenya, en raison de la forte demande de carburant nécessaire pour alimenter l'industrialisation rapide de la Chine.
La Chine est consciente que pour accéder aux matières premières vitales, également convoitées par l'Occident, il faut concevoir une nouvelle approche amicale envers les dirigeants africains, à l'inverse de l'attitude condescendante des puissances occidentales. La venue de 48 chefs d'État africains en 2006 à Beijing a illustré cette approche. Le succès de la Chine a également été stimulé par la richesse de ses relations historiques avec les pays africains à l'époque coloniale, autant que par l'impact négatif du programme d'ajustement structurel (PAS), imposé à la plupart des pays africains par les dirigeants néo-libéraux de l'Occident dans les années 1980. Néanmoins, le succès de la Chine sera déterminé par sa capacité à convaincre le Kenya et d'autres pays africains qu'elle ne va pas être un exploiteur, mais un partenaire de développement fiable qui témoigne d'un respect mutuel. La Chine est aujourd'hui une superpuissance et la deuxième économie du monde. C'est un fait indéniable qu'il faut accepter.
(L'auteur est vice-chancelier adjoint (affaires académiques) à l'Université de Kisii au Kenya) |