L'annonce par le Président du Malawi Joyce Banda de ne pas accueillir le 19ème sommet de l'UA en juillet a provoqué des remous dans la communauté africaine.
Elle a invoqué comme raison de sa décision la présence au sommet du dirigeant soudanais Omar el-Béchir, recherché par la Cour pénale internationale (CPI) pour génocide et crimes de guerre. Banda a déclaré qu'en tant que pays membre de la CPI, son pays serait obligé de coopérer pleinement avec la CPI dans ses enquêtes pour crimes de guerre, signifiant ainsi que el-Béchir n'était pas le bienvenu.
La décision du Malawi doit être mise dans un contexte où d'autre pays africains ont pris des décisions concernant el-Béchir. En 2009, ce dernier avait annulé un voyage en Afrique du Sud, où il devait assister à la cérémonie d'investiture du Président Jacob Zuma, ainsi qu'un voyage en Ouganda. Il n'a pu assister ni au 50e anniversaire de l'indépendance de la République centrafricaine, ni à l'investiture du président ougandais Yoweri Museveni en mai 2011. L'Afrique du Sud, l'Ouganda et la République centrafricaine sont tous signataires de la CPI, et à ce titre leur décision ont une portée sur les actions d'el-Béchir.
Même si certaines personnes soulignent que le Malawi a par le passé autorisé el-Béchir à entrer sur son territoire, le pays avait alors un autre chef d'État.
En agissant ainsi, Banda s'attire les bonnes grâces de son peuple, de nombreux Africains et de la communauté internationale. Sa façon de faire est clairement destinée à accroître le commerce, à attirer l'investissement, et à tirer son pays hors de la catégorie des pays les plus pauvres de la planète.
Depuis son entrée en fonction le 7 avril, Banda n'a pas perdu son temps pour nommer un nouveau responsable de la police, former un nouveau gouvernement et congédier le gouverneur de la banque centrale. Dans sa volonté d'améliorer l'image du Malawi entachée par son prédécesseur Bingu wa Mutharika et de se débarrasser de ses mesures impopulaires, elle a donné un vigoureux coup de balai. Sa promesse de faire cesser les discriminations à l'égard des homosexuels et des lesbiennes et de rendre son indépendance à son pays a été suivi par sa décision de vendre le jet présidentiel et les 60 Mercedes du parc automobile gouvernemental. Le monde entier a pris bonne note de ces décisions inattendues.
Elle a également déclaré que le Malawi suivrait désormais les conseils du Fonds monétaire international (FMI) et dévaluerait le kwacha, la monnaie nationale, de 50 %. « Nous avons nous-même contribué à cette situation par notre négligence et notre arrogance », estime Banda.
La Grande-Bretagne s'est engagée à prêter 36 millions de dollars pour stabiliser l'économie du Malawi et 15,7 millions pour reconstruire le système médical du pays, alors que le FMI s'est mis d'accord sur un nouveau plan d'aide de trois ans de 157 millions de dollars au titre de la facilité élargie de crédit pour réduire la pauvreté et créer de la richesse.
Ce changement de fortune du pays a suscité des critiques à l'égard de Banda, l'accusant de vendre le pays aux donateurs internationaux, en particulier par sa décision de ne pas participer au sommet de l'UA et de refuser de l'accueillir. (Elle a fait savoir que son vice-président y assisterait en son nom). Mais Banda reste pragmatique. Tout en déclarant qu'elle respectait la décision de l'UA de transférer le sommet à Addis-Abbeba, et qu'elle respectait el-Béchir en tant que dirigeant du Soudan, elle a tracé une ligne de démarcation et indiqué clairement que son pays et son peuple venaient en premier. « Mon principal emploi du temps concerne désormais le redressement économique du Malawi », explique-t-elle.
La deuxième femme présidente en Afrique fait des choix difficiles et rares pour un continent où les dirigeants ont généralement tendance à éviter de faire ce qui convient pour leurs citoyens. Son actuelle popularité chez elle sera certainement prolongée par ses décisions devant se traduire par l'amélioration de la vie des Malawites. Cet intérêt marqué pour le peuple est une bonne chose non seulement pour le Malawi mais aussi pour l'Afrique dans son ensemble.
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