Le 25 mai, l'Afrique a célébré la Journée mondiale de l'Afrique. La célébration commémore un fait historique, la création en 1963 de l'Organisation de l'Unité africaine (OUA), qui s'est depuis transformée en Union africaine (UA). La Journée de l'Afrique symbolise la réunion de tous les membres de l'organisation, pour forger un lien commun et une approche collective aux défis du continent.
L'appel à l'unité africaine est constant, et les valeurs clés du pan-africanisme, encourageant les Africains du monde entier à être solidaires entre eux, n'ont pas changé. La Journée de l'Afrique est une célébration non seulement pour les Africains du continent, mais aussi pour toutes les personnes d'origine africaine. Pourtant, de nombreux Africains fuient aujourd'hui les désastres économiques, les conflits et les persécutions qui sévissent dans leur pays, cherchant à se réfugier en Europe ou ailleurs dans le monde. Ils vivent constamment entre Charybde et Scylla.
Plus de cinq décennies après la naissance de l'idéologie d'union africaine, la xénophobie est plus présente dans le continent qu'elle ne l'a jamais été. L'intolérance que dévoilent les récents événements en Afrique du Sud le montre bien, sans parler des milliers de réfugiés qui périssent en tentant d'atteindre les côtes européennes depuis une Libye au bord de l'effondrement.
Après les spectacles, les discours et les événements culturels, que reste-t-il de la Journée de l'Afrique, et que signifie ce jour pour les Africains ? Les Nigérians, les Congolais ou les Burundais ressentent-ils le besoin de célébrer l'unité continentale alors qu'ils vivent dans la peur ? Les millions de personnes, surtout les jeunes, qui luttent pour survivre avec moins d'un dollar par jour, se réjouissent-ils de la Journée de l'Afrique, lorsqu'ils voient leurs leaders corrompus s'enrichir année après année ?
Les économistes affirment que plusieurs pays d'Afrique comptent parmi les économies à la croissance la plus rapide du monde. Mais comment cette croissance se transmet-elle aux femmes oppressées, aux petits patrons qui luttent pour leur survie et aux fermiers sans semences ? Tant que la gouvernance en Afrique est aussi pauvre que les millions de personnes dont elle n'écoute pas les aspirations, la Journée de l'Afrique sonnera faux. Le plus beau mouvement collectif africain était la conquête de l'indépendance et la libération du joug colonial. Quand cet esprit collectif a-t-il disparu ? Il vit sûrement encore dans le cœur de chaque Africain, comme le disent les affiches touristiques : « Je ne vis pas seulement en Afrique, l'Afrique vit également en moi. »
Il est venu le temps du dialogue stratégique et des actions pleines de sens, sur un continent où prendre ses responsabilités est devenu aussi rare que les cornes de rhinocéros. La phrase « des solutions africaines pour les problèmes africains » est brandie chaque fois qu'une crise survient - mais en même temps, on réclame l'intervention occidentale. L'Afrique est capable d'agir, elle en a les ressources et le talent. Mais tant que les dirigeants ne s'engagent pas à améliorer réellement la vie de leur population, mettant cet objectif devant leur intérêt personnel, la gloire, la dignité et la fierté de l'Afrique resteront le privilège d'un petit nombre et la Journée de l'Afrique ne sera qu'une date parmi d'autres dans le calendrier.
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