
APRÈS L'OMBRE, LA LUMIÈRE : Un ophtalmologiste chinois au travail au Malawi
Le 25 novembre 2010, la joie était palpable dans l'hôpital général de Chitangwiza, un centre médical situé à 30 km de Harare, au Zimbabwe. Des patients ayant été opérés de la cataracte quelques jours auparavant attendent l'examen de contrôle. « Je vois encore plus clairement de l'œil opéré que de l'autre ! Je suis profondément reconnaissante envers les médecins chinois. J'aimerais tellement aller en Chine, découvrir ce pays de mes propres yeux », rêve une vieille dame.
Les médecins évoqués par cette dame ont mené à bien un programme de huit jours baptisé « Voyage de prévention de la cécité ». Entre le 18 et le 26 novembre 2010, équipés du matériel chirurgical nécessaire et apportant avec eux lentilles et médicaments nécessaires, douze ophtalmologistes chinois ont opéré de la cataracte 612 patients au Malawi et au Zimbabwe. Le Dr Zhu Siquan, réputé en Asie pour sa technique opératoire très efficace, s'est avoué très touché par la gentillesse des habitants du Zimbabwe. « Je vais faire de mon mieux pour apporter la lumière à davantage de patients », confie-t-il.
Le Président zimbabwéen Robert Mugabe et le Président du Malawi Bingu wa Mutharika ont grandement apprécié la démarche des médecins chinois, soulignant que cet acte de générosité jouait un grand rôle dans le plan de prévention de la cécité de leur pays respectif.
Selon une statistique partielle de l'Organisation mondiale de la santé (OMS), parmi les 314 millions de personnes souffrant d'une maladie des yeux dans le monde, 45 millions ont perdu la vue, dont 20 millions à cause de la cataracte. En 1999, l'OMS a annoncé le projet « Vision 2020, le droit à la vue », inaugurant une initiative mondiale visant à l'élimination de la cécité pour des causes évitables d'ici l'an 2020. En 2003, le Groupe national de direction technique contre la cécité de Chine a lancé le projet intitulé « Voyage de prévention de la cécité » dans les régions pauvres du pays. À ce jour, plus de 30 000 personnes défavorisées souffrant de la cataracte ont pu être opérées gratuitement. À partir de 2008, l'équipe médicale menant ce projet à bien s'est rendue dans des pays voisins de la Chine, comme la Mongolie, le Vietnam, le Bangladesh, etc. C'est à la fin de l'année 2010 qu'elle est arrivée en Afrique.
Dans la salle d'opération
Après 23 h de vol, l'équipe médicale chinoise a atterri à Lilongwe, capitale du Malawi. Après avoir pris un peu de repos, elle s'est rendue à Kumazu Central Hospital pour commencer les préparatifs tels que l'installation des équipements médicaux, la stérilisation de la salle d'opération et l'examen des malades, poursuivant sa tâche jusqu'à 21 h, dès le premier soir.
Le lendemain fut une journée inhabituellement chargée. Les médecins furent divisés en groupes. Trois tables d'opération, trois microscopes, et trois sets d'instruments chirurgicaux furent utilisés simultanément. En raison de la barrière de la langue, le plus grand défi que l'équipe eut à gérer fut de parvenir à coordonner au mieux l'action des docteurs chinois et locaux et de communiquer avec les patients afin d'optimiser le temps imparti. Grâce aux ajustements et à la capacité d'adaptation de chacun, le nombre d'opérations réalisées passa progressivement de 40 à 100 par jour.
Se consacrant chaque jour aux opérations, les médecins chinois furent largement récompensés de leurs efforts en constatant l'excitation des patients ayant recouvré la vue. « Nous savons que nos efforts ont contribué non seulement à soulager la douleur de ces patients, mais aussi la charge pesant sur leur famille, dont les membres peuvent désormais [passer] plus de temps à travailler », explique Yang Xiaohui, une femme médecin de l'hôpital Tongren à Beijing, le plus grand centre d'ophtalmologie de Chine.
Nouveau modèle de coopération
C'est la première fois que des organisations et entreprises chinoises organisent des activités à une telle échelle en Afrique. [Elles sont] pionnières d'un nouveau modèle de soutien mutuel entre la Chine et l'Afrique », a déclaré Li Liqing, vice-secrétaire du Réseau d'ONG de Chine pour les Échanges internationaux (CNIE).
Parrainé par plusieurs ONG comme la CNIE et l'Association chinoise pour la promotion de la démocratie, ainsi que des entreprises nationales comme Hainan Airlines (HNAIR) et Anhui Foreign Economic Construction Company (AFECC), le programme mené en Afrique est le plus grand en son genre. HNAIR a affrété les vols, tandis que l'AFECC a pris en charge tous les frais de l'opération y compris les médicaments utilisés, ainsi que les vivres de l'équipe envoyée en Afrique.
Selon Chen Feng, président de HNAIR, les entreprises chinoises ont connu des progrès rapides en Afrique grâce à l'appui des gouvernements locaux. Ce programme médical est donc l'occasion de les en remercier.
Yang Xiaohui explique pour sa part que d'un point de vue médical, ce dont les pays africains manque le plus c'est de personnel. Ainsi, le Zimbabwe, le pays parrainé dans le cadre du projet « Vision 2020 » mis en place par l'OMS en 1999, a reçu des microscopes sophistiqués et des instruments chirurgicaux. Mais personne ne sachant les utiliser, ils n'ont même pas été déballés. « Dans ce cas, il est sans doute plus utile de fournir des équipements de base. Pour parvenir à éradiquer la cécité d'ici à 2020, la formation d'un personnel médical qualifié est la tâche la plus urgente attendant les pays africains », a constaté Yang.
Pan Hejun, ambassadeur de la Chine au Malawi, a rappelé que le droit à la vue était un droit humain important et que le gouvernement chinois continuerait à aider les pays africains dans leur lutte contre la cataracte par le biais de programmes d'échanges d'ophtalmologistes. Les gouvernements du Malawi et du Zimbabwe ont aussi exprimé le souhait de faire du « Voyage de prévention de la cécité » une activité d'échange régulière.
« La Chine et l'Afrique espèrent que le programme pourra être poursuivi, mais cela dépend des fonds que nous parviendrons à lever », a expliqué Li Liqing de la CNIE. Elle a fait appel à davantage d'entreprises chinoises, les encourageant à participer au programme. Han Demin, doyen de l'hôpital Tongren à Beijing, a observé que si le programme devenait régulier, il aurait à long terme, un impact plus important sur les populations africaines.
|