Après l'indépendance du Zimbabwe, Chung fut nommée ministre adjointe en charge du nouveau ministère de l'Éducation du pays. En 1988, le président Robert Mugabe lui proposa le poste de ministre de l'Éducation.
Durant cette période, Chung mis en place un programme national d'éducation primaire et secondaire. Son but était clair. Avant l'indépendance, un tiers des enfants seulement suivaient les cours de l'enseignement primaire, et à peine 4 % des enfants noirs bénéficiaient de l'enseignement secondaire. Les universités du pays ne comptaient alors que 300 étudiants noirs. Grâce aux efforts du ministère, et en trois ans seulement, l'éducation primaire fut accessible à tous, 65 % des enfants purent suivre le cursus secondaire, et les universités comptèrent 10 000 étudiants.
« C'est une des conditions du développement », explique Chung, « Sans éducation on ne peut aller bien loin. »
Éducation pour les femmes
Le destin de Chung, qui souhaita à un moment être journaliste, la poussa vers une carrière dans l'éducation. Lorsqu'elle se rendit en Chine pour la première fois en 1973, elle fut surprise d'apprendre que beaucoup de membres de sa famille, du côté de son père ou de sa mère, étaient enseignants. « Ce doit être dans mes gènes », plaisante Chung.
Dans le village de sa famille, beaucoup de femmes mariées dans les années 1930 qui avaient vu leurs maris partir pour ne jamais revenir lui demandèrent alors ce qui était arrivé à ces hommes.
« Ces femmes ont perdu leurs maris », dit-elle. Les hommes sont partis du village et se sont dispersés dans le monde entier.
La grand-mère de Chung aurait pu faire partie de ces femmes. Le grand-père de Chung retourna en Chine dans les années 1930 et épousa une femme au cours d'un mariage arrangé par sa famille. Mais il parti ensuite pour l'Afrique, laissant derrière lui sa femme et sa fille. Lorsque leur enfant eu 12 ans, la grand-mère de Chung en eu assez d'attendre et parti retrouver son mari en Rhodésie.
« Elle était vraiment spéciale », dit Chung de sa grand-mère. Cet exemple de femme intelligente et courageuse, qui prend en main sa destinée, a guidé Chung tout au long de sa vie.
Au Zimbabwe, Chung commença à mener des recherches sur les premiers arrivants chinois. Elle découvrit que la majorité de ceux-ci n'avait jamais vraiment cherché à offrir une éducation aux filles, à la différence des garçons. En Chine, le cousin de Chung, lui même enseignant, refusa d'envoyer sa fille à l'école. Chung commença alors à se sentir encore plus passionnée par l'éducation des femmes.
Elle fut un des membres fondateurs du Forum des enseignantes africaines, qui travaille à l'amélioration de l'éducation pour les filles et les femmes d'Afrique. Elle aida aussi à la fondation de l'Association pour l'amélioration de l'enseignement supérieur des femmes en Afrique.
« Vingt ans après l'indépendance du Zimbabwe, j'ai réalisé que l'enseignement pour les femmes était toujours en retard », explique Chung, qui s'inquiète de l'urgence de la situation. « Seulement 5 % des femmes dans toute l'Afrique vont à l'université », explique-t-elle, « je pense qu'il est nécessaire de démocratiser encore plus l'enseignement secondaire pour les femmes. »
En 2002, Chung fonda au Zimbabwe l'Université des femmes d'Afrique.
« Je pense qu'une université pour les femmes peut aborder plus efficacement les questions importantes qui les concernent », explique Chung. « Par exemple, 70 % des femmes au Zimbabwe travaillent dans l'agriculture, mais très peu sont formées pour devenir des spécialistes agricoles. »
Chung, qui a quitté le ministère de l'Éducation suite à un désaccord avec le gouvernement, continue à mettre en place dans les pays en développement des programmes similaires à ceux engagés au Zimbabwe, grâce à sa position de chef du groupe sur l'éducation de l'UNICEF à New-York. En 1998 elle est retournée en Afrique et a fondé en Éthiopie l'Institut pour le renforcement des capacités en Afrique de l'UNESCO.
Aux élections parlementaires de 2008, Fay King Chung a fait son retour dans la vie politique et s'est présentée comme candidate indépendante. Pour elle, quel que soit son travail, l'éducation reste la priorité de sa carrière. |