Nuo
Tout récemment, le prix Nobel de littérature 2012 a été attribué à l'écrivain chinois Mo Yan. Zhang Yimou, un célèbre réalisateur chinois avait tourné un film inspiré de son œuvre Le Clan du sorgho, et présenté au monde entier la culture chinoise. Quelques années plus tard, un autre film de Zhang Yimou Riding Alone for Thousands of Miles dévoile un genre théâtral chinois mystérieux : le Nuo. Dans ce film, un père japonais vient en Chine tourner une pièce de théâtre chinoise Riding Alone for Thousands of Miles pour son fils. Émus par l'affection entre le père et son fils, les cinéphiles sont aussi attirés par cet art mystérieux chinois du Nuo. Derrière chaque masque coloré, se cache-t-il quelque chose d'unique ?
Qu'est-ce que c'est en fait le Nuo? C'est un théâtre originaire de l'ancien rituel d'exorcisme, donc un phénomène à la fois culturel et local. Dans l'antiquité, les Chinois croyaient que les maladies, les désastres, la mort et toutes les sortes de démons pouvaient être expulsés grâce à un rituel religieux, et portaient à cette occasion des masques coloré et dansaient avec passion en poussant le cri : « nuo, nuo » pour expulser des fantômes. C'est ainsi qu'est apparu la première pièce de théâtre de Nuo. Ensuite, pour attirer plus de gens à admirer le spectacle de Nuo, les sorciers engagés dans la cérémonie du Nuo ont commencé à y ajouter des chansons et des danses traditionnelles chinoises. C'est ce qui a donné naissance au théâtre de Nuo contemporain. De part sa longue histoire, le Nuo est considéré comme le témoin vivant de la culture et du théâtre chinois.
Au début des années 50 du 20ème siècle, les activités de Nuo ont été interdites en Chine. Mais dans les régions éloignées du sud-ouest, en particulier dans la zone où se rassemblent les minorités, à cause des faibles conditions de transport et d'équipement technique, l'art du Nuo a été conservé plus ou moins. Aujourd'hui en Chine, l'art de Nuo est exploité comme ressource culturelle par les autorités locales pour attirer plus des touristes et experts à admirer ou rechercher cet ancien art chinois.
Nous ne pouvons pas parler du Nuo sans en évoquer les masques. Il y a un proverbe chez les minorités Tujia et Miao : « Tant que quelqu'un porte un tel masque, il devient immédiatement le Dieu, et une foi qu'il l'enlève, il redevient un homme. » « Le masque » désigne ici les masques de Nuo. Comme les masques africains, les masques de Nuo sont de toutes les sortes avec des formes exagérées et des couleurs différentes. Selon les croyants de la culture Nuo, les masques sont le symbole de Dieu et donc, les pratiquants et les porteurs doivent se conformer à des règles strictes. Par exemple, il est interdit aux femmes de porter ou même de toucher le masque. Seuls les hommes ont le droit de porter les masques et de pratiquer les activités religieuses. Pendant le déroulement de la cérémonie, les hommes ne doivent pas parler ou agir à la légère, parce qu'ils incarnent le dieu à ce moment-là. Porter le masque en jouant est la caractéristique unique du théâtre de Nuo par rapport aux autres formes de théâtres chinois.
Bien que les masques soient dotés d'une signification religieuse, ils ont aussi des valeurs culturelles importantes. Ils sont en eux-mêmes une sorte d'art, et leurs formes sont souvent différentes selon les différents rôles.
Ces dernières années, les études et les recherches sur la culture du Nuo se sont multipliées. En 2006, dans la liste du « patrimoine culturel immatériel» publiée par le ministère chinois de la Culture, figuraient une vingtaine de danses et des chansons liées au Nuo. Le 15 août de cette année, la plus grande exposition de masques de Nuo à ce jour a été inaugurée au Grand Théâtre National. La Chine a organisé aussi une fête internationale du Nuo et a invité des troupes de théâtres d'exorcisme d'Afrique, d'Asie du Sud-Est et d'Amérique du Sud à y participer.
Mais nous ne pouvons pas nier le fait que pour diverses raisons, l'espace vital de l'art du Nuo devient de plus en plus étroit. Malgré cela, en tant qu'art venant du peuple, le Nuo conservera ses racines dans les campagnes et continuera à exprimer les réflexions sur la mort et la nature. |