BELLE COUPE : Natho Masisa occupée à coiffer une cliente
Le salon de coiffure Majesty de l'arrondissement de Chaoyang à Beijing est toujours animé, même le lundi matin. Presque chaque siège est occupé et six stylistes lavent, coupent et bavardent avec les clients. On entend parler anglais, chinois et français et le brushing s'accompagne de tressages, de dreadlocks et d'assouplissements de cheveux. Ce salon est le premier à s'être spécialisé dans les cheveux africains.
Jerry Darwin de Londres s'est installé en Chine en 2005 pour apprendre et pratiquer la médecine chinoise traditionnelle, mais l'entrepreneur qui sommeille en lui a refait surface à Beijing. Darwin, dont les parents sont originaires de Trinité-et-Ghana, possède plusieurs entreprises en Afrique sous le nom Majesty International Group, et a décidé après son arrivée d'en créer une nouvelle ici.
« Quand je suis arrivé en Chine, J'avais des tresses et il n'était pas facile d'en prendre soin ici », explique-t-il. « J'ai vu les besoins de la population africaine à Beijing et souhaité soutenir ma communauté. » Darwin a ouvert les portes du Salon Majesty le 3 Juillet 2008. Son salon a d'abord rencontré des difficultés. Il a été contraint de déménager en 2009, et obtenir du matériel et des fournitures spécifiques pour les textures de cheveux africains s'est avéré difficile et couteux de surcroit. Mais il estime que l'effort en vaut la peine et croit qu'il est important de fournir un service de qualité en Chine.
Avec leur texture de cheveux unique, de nombreux membres de la communauté noire de Beijing doivent se résigner à les porter court ou attendre de rentrer au pays pour obtenir le style de coupe recherché. Le tressage des cheveux longs peut prendre plusieurs heures, et beaucoup de femmes ont recours à la pose d'extensions de cheveux et de tresses, qui peut être extrêmement laborieuse. Dans le salon Majesty, une adolescente patiente assise que les deux coiffeurs ajoutent à ses cheveux naturels des extensions de cheveux violets tressés. « Cela va prendre trois à quatre heures », dit l'un des stylistes.
Maria Kargbo, une chanteuse originaire du Sierra Leone, explique que quand elle est arrivée en Chine il y a six ans, elle a essayé plusieurs coiffeurs chinois sans succès. « Ils ont vraiment essayé », dit-elle. « Mais ils ne savent pas comment couper les cheveux africains. Ils essayaient de me tresser les cheveux, mais cela ne tenait pas. » Maria, en tant qu'artiste de scène, change de coiffure très souvent, et viens toujours voir Natho Masisa, la styliste du Majesty. « Quand je participais à Miss Monde en 2009, je n'ai pas touché à mes cheveux jusqu'à ce que je revienne à Beijing voir Natho, » confie-t-elle.
Natho Masisa explique que ce salon de coiffure africaine, le plus ancien de Beijing, attire des clients de toute la Chine, y compris des personnes originaires du Shandong, du Hebei et même de Shanghai. Elle était coiffeuse à Kinshasa, au Congo, quand elle a été approchée par un homme d'affaires congolais qui lui proposa de travailler à Beijing. Elle a déménagé en 2006, et a commencé à travailler il y a un an au Majesty. « J'aime Beijing », dit-elle. « Je sais maintenant parler un peu chinois et coiffer les chinois et européens, alors qu'au Congo je ne coiffais que des Africains. »
Étonnamment, le Majesty a un nombre important de clients chinois. Beaucoup de ces clients ont des dreadlocks ou des tresses, mais certains viennent juste pour des coupes et des coiffures simples. « Mes clients chinois posent beaucoup de questions parce qu'ils sont curieux au sujet des cheveux africains », déclare Natho. « Travailler sur des cheveux chinois était différent mais j'ai appris rapidement. » De même, les coiffeurs chinois du salon ont appris à travailler la texture des cheveux africains et ont même commencé à apprendre à faire les tresses et les dreadlocks.
Darwin explique qu'en répondant à la fois à la communauté chinoise et afro, son salon est devenu un lieu privilégié pour les échanges interculturels. « Nous innovons ici. Nous comblons le fossé culturel à travers la coiffure », plaisante-t-il. Comme pour prouver son point de vue, une jeune femme africaine entre à ce moment dans le salon avec un ami qui y vient pour la première fois. Une femme chinoise entre à leur suite pour faire boucler ses longs cheveux – à la manière de Beyonce. |