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Des habitants de Beijing parcourent des livres lors d'une foire du livre organisée à Beijing le 11 avril |
Les rats de bibliothèque à Beijing disposent désormais d'un nouvel endroit pour lire dans le calme de la nuit. En effet, la librairie Sanlian Taofen (LST) du district de Dongcheng est devenue, le 8 avril dernier, la première librairie de la ville ouverte 24h sur 24.
Dotée de quelque 80 000 ouvrages exposés dans un espace de 1 500 mètres carrés, la LST est désormais considérée comme un des emblèmes culturels de la capitale.
M. Fan Xi'an, directeur général de la LST, a emprunté l'idée d'ouvrir une librairie ouverte 24/24 à la chaîne de librairie taiwanaise Eslite. « J'ai été ravi d'y trouver un si grand nombre de lecteurs la nuit lors de ma visite à Taiwan en 2010 », a-t-il confié à l'Agence de presse Xinhua.
Bien que Beijing soit l'épicentre culturel de la Chine, il est rare d'y trouver une librairie qui permette aux lecteurs de lire de manière agréable. Il arrive que ces derniers soient obligés de parcourir un livre en un temps limité car ils n'ont nulle part pour s'asseoir et se détendre.
Selon M. Fan, grâce à un programme gouvernemental visant à couvrir 56 librairies à travers le pays à compter du début de l'année 2014, les librairies traditionnelles sont maintenant exonérées de TVA, et le gouvernement a d'ailleurs déclaré avoir débloqué 90 millions de yuans (14,6 millions de dollars) pour soutenir des démarches comme celle de la LST et permettre ainsi aux librairies de relever le défi posé par l'essor du livre numérique.
Lorsque la nuit tombe, la LST abonde en lecteurs et clients. Devant presque toutes les bibliothèques se tiennent ou s'assoient des gens, avec le nez dans leurs livres. La vie nocturne des habitants de Beijing est enrichie d'une autre activité culturelle : celle de la lecture.
Le casse-tête lié à la lecture
Aujourd'hui, le marché de l'édition chinois connaît un essor sans précédent. En 2012, le pays a publié 7,9 milliards de livres répartis entre 414 005 catégories, se dressant ainsi au premier rang du monde. Pourtant, une récente enquête sur l'état de la lecture en Chine a montré le revers de la médaille.
Selon un rapport annuel publié le 21 avril dernier par l'Académie chinoise de la presse et de l'édition basée à Beijing, seulement 57,8 % des habitants ont déclaré lire des livres tous les jours en 2013 et les Chinois ont lu en moyenne 4,77 livres l'année dernière, soit 0,38 livre de plus qu'en 2012, un chiffre qui place la Chine encore loin derrière plusieurs pays. Selon les statistiques publiées par l'UNESCO, les Scandinaves lisent 24 livres par habitant par an alors que les Américains en lisent sept en moyenne. En Asie, la Corée du Sud est classée au premier rang avec onze livres lus par habitant.
En Chine, les gens privilégient les livres portant sur l'art culinaire et la santé ainsi que les romans et les guides de préparation aux examens. Les Chinois passent tous les jours en moyenne 100 minutes à regarder la télévision, 45 minutes à surfer sur Internet, alors qu'ils ne consacrent que 15 minutes à la lecture.
52,8 % des personnes interrogées ont admis qu'elles avaient peu lu l'année dernière faute de temps, comme Wang Yan, un col blanc âgé de 37 ans.
« J'aurais voulu lire davantage, mais mon travail est épuisant. En plus du stress au bureau, je suis obligé de passer des heures dans les transports entre mon domicile et mon lieu de travail. Je dois par ailleurs passer du temps avec ma femme et mon enfant le week-end. Pendant les précieux moments qui me restent, je ne peux que parcourir des nouvelles sur mon smartphone ou des titres intéressants via des réseaux sociaux », a-t-il expliqué.
En fait, la plupart des pays sont confrontés au problème lié à la lecture et à l'apprentissage. C'est ainsi qu'en 1995, l'UNESCO avait nommé le 23 avril la Journée mondiale du livre et du droit d'auteur afin d'encourager chacun à découvrir le plaisir de la lecture. Depuis, cette journée est célébrée annuellement dans plus de 100 pays à travers le monde comme un grand événement visant à la promotion de la lecture.
Des efforts pour promouvoir la lecture
À la veille de la Journée mondiale du livre de cette année, le gouvernement municipal de Beijing a lancé en avril la 4ème édition de la Saison de la lecture de Beijing, qui avait vu le jour en 2011, dans le but de promouvoir la lecture au sein de tous ses habitants à travers diverses activités. Cette année, l'événement ne se limite plus à Beijing pour se transformer en un programme national autour de la lecture.
« Cette année, 26 départements des gouvernements locaux ont participé à l'organisation de la Saison de la lecture, une grande célébration qui durera trois mois », a expliqué M. Wang Yijun, directeur du département de l'édition relevant du Bureau de la presse et de l'édition de Beijing, également membre du conseil d'organisation pour la Saison.
Selon M. Wang, 6 335 librairies et bibliothèques ainsi que 4 495 salles de lecture communautaires mettront à la disposition des habitants des conditions favorables à la lecture, notamment en prolongeant les heures d'ouverture et en organisant des séances qui permettront aux fans de rencontrer leurs idoles littéraires.
« Nous voudrions établir une plate-forme intégrée facilitant la lecture aux résidents de Beijing. Grâce aux efforts de plusieurs années, la Saison est devenue une marque culturelle locale reconnue, permettant à tous de découvrir le plaisir de la littérature », a dit M. Wang.
De leur côté, les ONG et les volontaires se sont joints aussi aux efforts de la promotion. Li Yiman, un chercheur dans une institution éducative appelée New Reading Institute, a réuni un groupe de mères en 2010, afin d'organiser des activités tous les mois permettant aux parents et à leurs enfants de lire ensemble.
« Il y a quelques années, quand ma femme et moi lisions des histoires à notre enfant, je me suis aperçu qu'accompagner les enfants dans leur lecture est une bonne méthode d'éducation familiale. Il s'agit aussi d'un moyen efficace pour stimuler chez des enfants l'amour de la lecture », a expliqué M. Li.
« En lisant en compagnie de leurs parents, les enfants posent souvent des questions sur tout ce qu'ils trouvent intéressant. C'est un moment propice pour diffuser les connaissances et développer l'imagination chez les enfants », a-t-il dit.
Bien que le temps disponible pour la lecture soit insuffisant, la plupart des Chinois sont conscients de l'importance qu'elle tient. Ils espèrent qu'en plus d'événements visant à la promotion de la lecture au sein du grand public, les amateurs de livres pourront profiter de plus de conditions favorables. |