ARJ21
Le COMAC C919, premier grand avion de ligne chinois, devrait effectuer son premier vol d'ici la fin de l'année prochaine, marquant une étape importante dans l'industrie aéronautique du pays.
À terme, le fabricant, la Commercial Aircraft Corporation of China (COMAC), compte concurrencer Boeing et Airbus sur le marché mondial de l'aviation.
« Je ne doute pas de la volonté des dirigeants chinois de créer une industrie aéronautique viable et concurrentielle. La Chine est une puissance économique mondiale qui a déjà conquis l'espace ! », explique à CHINAFRIQUE Scott Hamilton, expert du secteur et directeur général du cabinet de conseil Leeham. « Pour ce faire, vous devez rivaliser avec les plus grands. »
Pour tous les acteurs, les enjeux sont énormes.
Le marché chinois des avions de ligne est actuellement le deuxième plus grand dans le monde, après les États-Unis. Pour faire face à la demande croissante de la classe moyenne du pays, au cours des 20 prochaines années les compagnies aériennes chinoises devront acquérir 6 000 nouveaux avions, d'une valeur de 780 milliards de dollars, selon Boeing. L'Administration générale de l'Aviation civile de Chine (CAAC) prévoit de créer environ 80 nouveaux aéroports jusqu'en 2020, dans de nombreuses villes de second rang.
L'enjeu est énorme pour la COMAC, créée en 2008 sous les auspices du Conseil des affaires d'État afin de concevoir et fabriquer des avions pour le secteur civil. La COMAC a depuis concentré ses efforts sur deux projets de plusieurs milliards de dollars - le C919 à fuselage étroit, capable d'accueillir environ 170 passagers avec une portée de 5 500 km, et l'ARJ21, un petit jet régional qui peut accueillir environ 100 passagers.
Le développement de ces deux projets a toutefois rencontré des difficultés. L'ARJ21 attend la certification de CAAC ou de l'Administration fédérale de l'aviation (FAA). La compagnie annonce au moins 250 commandes pour son jet et attend une certification plus tard cette année. Toutefois, les retards et les incertitudes perpétuelles ont nui à la compétitivité de l'ARJ21.
« J'ai toujours considéré ces deux programmes comme des expériences d'apprentissage pour l'industrie aéronautique chinoise », déclare Hamilton, ajoutant que les erreurs de parcours sont inévitables lorsque l'on part de zéro. « Les prochains avions seront plus compétitifs et concurrenceront Airbus et Boeing. »
Le C919 a été conçu sur le modèle des fameux Boeing 737 et Airbus A320. Son design et sa fabrication sont entièrement nationaux, mais pour l'instant il s'appuie sur une technologie étrangère pour de nombreuses pièces de base, y compris le moteur, vendu par General Electric. Le C919 a reçu environ 400 commandes. Dont 20 pour la compagnie aérienne de leasing de General Electric, seul acheteur étranger jusqu'à présent. Après un premier vol courant 2015, la COMAC prévoit l'entrée en service du C919 fin 2016 ou début 2017.
Créer une industrie aéronautique solide et compétitive à l'échelle mondiale est un objectif clé du gouvernement chinois, comme souligné dans le 12ème Plan quinquennal (2011-15) : « Le secteur de l'équipement haut de gamme doit mettre l'accent sur le développement de l'aéronautique. »
À cette fin, le gouvernement soutient financièrement le développement de l'industrie. Au cours des prochaines années, le cabinet de conseil Kuick Research estime que le gouvernement chinois y injectera 250 milliards de dollars, dont 7 milliards de dollars ont déjà servi au programme C919.
Malgré le financement public et un flux régulier de commandes des transporteurs nationaux, la COMAC fait face à de sérieuses questions. Un récent rapport par le groupe de recherche sans but lucratif de RAND Corp a annoncé l'échec probable du C919 et de l'ARJ21 en raison de la sortie imminente de nouveaux modèles de Boeing et d'Airbus et de l'inexpérience de l'entreprise chinoise. Les promoteurs du programme ont fustigé le rapport, affirmant que Boeing et Airbus avaient connu des problèmes similaires à leurs débuts et que l'amélioration vient seulement avec le temps.
Évaluant ce qui constituerait un succès pour la COMAC et la Chine, Hamilton dit simplement : « Un C919 qui fonctionne économiquement [pour les compagnies aériennes] en Chine et qui est fiable serait déjà un succès à partir duquel la prochaine génération d'avions s'appuiera. » |