Xi Jinping : La gouvernance de la Chine, une compilation de discours et écrits du Président chinois Xi Jinping, offre aux lecteurs un excellent aperçu des opinions du chef d'État chinois et de l'avenir de la Chine. Le volume de quelque 500 pages contient presque 80 discours, interviews, instructions et lettres.
Ce livre comprend beaucoup de discours sur l'Afrique et la communauté internationale. Xi fournit un compte rendu rare et honnête de la Chine, évoquant à la fois son histoire, sa situation actuelle et ses perspectives d'avenir. Certaines stratégies de gouvernance et de réforme discutées sont des principes fondamentaux applicables dans tous les États. Par exemple, l'éthique professionnelle est applicable partout dans le monde, ainsi que la croissance scientifique stimulée par l'innovation.
Ce qui distingue ce livre d'autres livres visionnaires est la manière dont il explique les politiques concrètes et constructives, améliorant ou transformant des réformes basées sur le socialisme à la chinoise. Ce livre souligne également la confiance de Xi à l'égard du socialisme à la chinoise, qui consiste à la fois en une voie, une théorie et un système.
Réformes et croissance
Xi discute de la signification de la réforme et de l'ouverture. Cette réforme et ouverture de la Chine concernent le programme de réformes économiques entendu sous le terme de « socialisme à la chinoise », qui a été initié en décembre 1978 par les réformistes du Parti communiste chinois dirigé par Deng Xiaoping. Les premières réformes de Deng ont porté sur le domaine de l'agriculture. Des réformes ont été aussi mises en place dans les zones économiques spéciales et la politique d'ouverture.
Les réformes économiques et la politique d'ouverture ont conduit à une croissance remarquable. Il y a 30 ans, la Chine était aussi pauvre, voire plus, que les pays africains. Mais dès le début des réformes, la croissance économique a été en moyenne de 10 % par an pendant plus de 30 ans. Il n'y a pas de pays dans l'histoire moderne qui ait connu une croissance si exceptionnelle pendant une si longue période. La croissance économique rapide a permis d'augmenter considérablement le niveau de vie de la population chinoise. Selon la Banque mondiale, pendant cette période, plus de 600 millions de Chinois sont sortis de la pauvreté extrême (soit moins de 1,25 dollar chaque jour.)
Réaliser le Rêve chinois
Le Président met l'accent sur le patriotisme comme une force intérieure qui relie et unifie les Chinois autour des réformes et de l'innovation. Dans le but de réaliser le Rêve chinois – renouveau de la nation chinoise, amélioration de la vie de la population, prospérité, construction d'une société meilleure et d'une armée renforcée – le Président met en avant l'éthique professionnelle comme un facteur essentiel. Dans le chapitre Travailler dur permet de réaliser son rêve (page 47), il affirme que « le travail est la source de la richesse et du bonheur. Le travail a formé la nation chinoise et son histoire, et c'est le travail qui va créer l'avenir de la Chine. Le travail est la force de propulsion pour le progrès de la société humaine. Pour réaliser le Rêve chinois, les Chinois doivent encourager l'esprit national, avec comme noyau dur le patriotisme. »
Quelle leçon peut-on tirer de ce Rêve chinois, en particulier pour l'Afrique du Sud et le continent africain ? Comment pouvons-nous réaliser la vision portée par l'Agenda 2063 - le plan sur la transformation structurelle de l'Afrique, adopté par les dirigeants de l'Union africaine en 2013 ? Comment unir les forces de l'Afrique du Sud et du continent africain ? En Afrique du Sud, comment unifier les rangs et poursuivre un rêve commun à travers le Plan de Développement national ? Comment surmonter l'écueil consistant à réaliser d'excellents plans d'action mais ne jamais les mettre en pratique ? Les plans d'action ne peuvent jamais plaire à tout le monde - c'est là où interviennent le patriotisme et l'altruisme.
D'après mon expérience dans les communautés chinoises, les Chinois considèrent le travail comme un élément de patriotisme : il s'agit de travailler pour le pays. Qu'ils travaillent dans une usine dans une zone économique spéciale ou à construire des ponts, ils travaillent pour le pays. C'est une philosophie que nous devons intégrer en Afrique du Sud. Le Président Xi l'explique lorsqu'il affirme que « les ouvriers chinois doivent avoir plus conscience de leur mission historique et de leur responsabilité, travailler dur et avoir toujours à l'esprit les intérêts du pays. Au moment de poursuivre leurs idéaux et le bien-être de leurs familles, ils doivent également travailler à rendre le pays prospère et puissant. » Avec ce genre d'idée, je suis convaincu que Eskom (l'Unité électrique de l'Afrique du Sud) aurait pu avoir fini depuis longtemps la station Medupi (une centrale thermique en construction dans la province de Limpopo en Afrique du Sud.)
Gouvernance et État de droit
Pour de bien gérer le pays, le Président estime important de bien gérer le Parti – ce qui signifie le diriger de manière plus stricte et d'exiger des cadres l'intégrité, la loyauté politique et l'absence de corruption. Xi Jinping affirme ainsi que « les vers ne peuvent se développer que sur quelque chose de pourri. » Il souligne aussi que personne n'est supérieur à la loi, et que les puissants doivent être punis au même titre que les personnes ordinaires. La corruption est un thème central au livre de Xi Jinping. Il se concentre clairement sur la construction d'un système intégré pour lutter contre la corruption et promouvoir une culture gouvernementale plus vertueuse.
Le Président met l'accent sur la décision d'améliorer le système et la capacité gouvernementale du pays. Selon lui, la capacité gouvernementale du pays est incarnée non seulement dans son système institutionnel, mais également dans sa capacité à l'exécuter. D'après lui, le système chinois est bien adapté au cadre général de la Chine, mais aussi au contexte de nombreux pays africains, que les différents modèles occidentaux n'ont pas aidés (notamment le Consensus de Washington, qui s'applique aux nations demandant l'assistance des corps économiques internationaux comme la Banque mondiale et le Fond monétaire international.)
Pouvons-nous dire que notre système de gouvernance est adapté à notre pays ? Pouvons-nous apprendre de cette notion de système et de capacité de gouvernance ? Pouvons-nous élaborer un modèle similaire à celui préconisé par le Président chinois pour son pays ? Quel est notre Consensus africain qui va promouvoir des documents comme l'Agenda 2063 ?
En conclusion, ce livre est très éclairant et donne de précieux aperçus sur l'avenir économique de la Chine. Beaucoup d'experts posent actuellement la question de la fin du miracle chinois et se demandent si le ralentissement récent prouve que la Chine est tombée dans le « piège des revenus intermédiaires ». Dans ce livre, on peut clairement identifier les différentes stratégies employées pour mettre en place les réformes économiques. Comme Zheng Liu, économiste à la Banque de Réserve fédérale de San Francisco, l'a écrit dans son article Le miracle de la croissance chinoise est-il terminé ? présenté dans Lettre économique de la banque en août, si les plans de réforme structurelle évoqués dans la troisième Session plénière du 18e Comité central du Parti communiste chinois peuvent être exécutés avec succès, alors que le ralentissement récent pourrait n'être qu'une transition en douceur au lieu d'un difficile atterrissage.
Joseph Stiglitz, prix Nobel en économie et ancien chef économiste de la Banque mondiale, affirme dans un article publié dans Vanity Fair en janvier que « la Chine vient de dépasser les États-Unis comme la plus grande puissance économique mondiale. » En d'autres termes, la Chine continue à poursuivre la trajectoire qu'elle a planifiée, à s'ouvrir et à poursuivre les réformes du socialisme à la chinoise, qui ont fait d'elle une puissance économique internationale.
(L'auteur est un chercheur du Conseil de recherche sur la science humaine, à Pretoria, en Afrique du Sud)
