Dans un discours fait lors du Second Global Think Tank Summit, qui se tenait à Beijing le 25 et 26 juin, le docteur Essop Pahad a déclaré que le G20 devait travailler en collaboration étroite avec les pays africains et les structures continentales lorsqu'il avait à traiter des problèmes africains. L'un des points soulevés par l'ancien ministre de la présidence d'Afrique du Sud est que l'Afrique devrait être mieux représentée au G20. Il a demandé comment cette organisation pouvait prétendre et au leadership si 172 pays étaient exclus de ses réunions. Voici le discours qu'il a adressé lors du sommet :
Étant donné que le G20 représente plus de 85 % du PIB mondial, plus des deux tiers de la population mondiale et environ 80 % du commerce international, il est dans une situation de force pour influencer le commerce mondial, les marchés, les investissements internationaux et les tendances socio-économiques mondiales, ainsi que la croissance et le développement.
Mais la question est : est-ce que le G20 peut réellement travailler avec les pays pauvres, marginalisés, faibles et en retard de développement et leur apporter son aide ? Peut-il prétendre à une légitimité universelle et au leadership si 172 pays son exclus de ses réunions, de ses délibérations, de ses décisions et de ses contacts, qu'ils soient formels ou informels ?
À l'heure actuelle, le seul pays d'Afrique qui a sa place dans l'organisation est l'Afrique du Sud. Même si personne ne désire que le G20 devienne une institution au fonctionnement lourd, n'y a-t-il pas la place en son sein pour un autre pays africain ? Le Nigéria, pays important en termes d'économie, de population et de situation géostratégique, pourrait être un atout pour améliorer la gouvernance économique et promouvoir le développement commun.
Je voudrais soulever quelques problèmes dans une perspective africaine :
1. Il est généralement admis que pour parvenir à un développement et une croissance économiques durables, un pays doit avoir des taux d'épargne et d'investissement supérieurs à 30 %. Cependant, aucun pays africain n'est susceptible d'atteindre cet objectif si on le laisse faire les efforts tout seul. Dans ce contexte, il est prématuré de recommander un transfert de l'épargne des pays qui en ont vers ceux qui n'en ont pas. Néanmoins, certains mécanismes doivent être étudiés pour encourager une culture de l'épargne domestique.
2. D'après notre expérience, nous savons que les prêts du FMI, de la Banque mondiale, des pays développés et du secteur privé aux pays africains étaient conditionnés à des conditions onéreuses et irréalistes. Dans quelle mesure relève-t-il de la responsabilité du G20 et d'autres institutions d'assurer des prêts aux pays africains avec des conditions plus favorables ?
3. N'est-il pas possible de travailler collectivement pour assurer que l'allègement de la dette est utilisée non pour créer plus de dette mais pour une bonne gouvernance, des placements sûrs et une croissance et un développement économiques durables.
4. Il est indispensable que le G20 réduise, sinon élimine, les subventions agricoles dans le monde développé, qui ont des conséquences négatives sur la capacité des pays africains à produire et à vendre leurs propres produits.
5. Il est nécessaire d'encourager l'investissement intérieur et étranger dans la production agricole et les infrastructures dans les zones rurales.
6. Des mesures plus fortes sont nécessaires pour réguler le comportement, le modèle d'investissement et les accords unilatéraux signés par les entreprises transnationales opérant en Afrique. De manière évidente, ces dernières n'investiront que si elles obtiennent un retour sur investissement substantiel. Mais est-ce trop demander qu'elles réinvestissent une grande part de leurs profits dans l'économie intérieure ? Est-il possible d'arriver à une situation gagnant-gagnant ?
7. Un nouvel élan de développement demande des investissements, en hommes et en capitaux, dans les domaines de l'éducation, de la santé, du traitement des eaux, de l'assainissement et des infrastructures. Dans quelle mesure les mécanismes actuels de la gouvernance mondiale favorisent-ils cela ?
8. La corruption épuise les ressources et freine la qualité de vie des pays africains. Beaucoup trop de dirigeants et de membres de l'élite ont bénéficié des dépenses de la majorité de la population. N'est-il pas possible de réformer le système actuel de manière à ces que les agents de corruption payent le prix fort pour leurs agissements ? Ces personnes doivent être poursuivies, jugées et emprisonnées.
Il est évident que le G20 continuera à influencer le développement du continent africain, et réciproquement. Bien entendu, les pays africains doivent également approfondir leur unité et la coopération au sein de l'UA, du mouvement des non-alignés, et du dialogue Nord-Sud.
Nous devons nous souvenir que les problèmes de l'Afrique, qui font l'objet d'une publicité importante, ne sont qu'un des aspects de l'histoire. L'Afrique est un continent débordant de potentialités. Comme l'archevêque Ndungane le rappelait récemment : « répondre aux aspirations de la jeunesse est essentiel pour libérer les énergies africaines. La jeunesse est créative, dynamique et pleine d'énergie. La population africaine, de 1 milliard actuellement, devrait doubler en 2050. L'atout démographique du continent est que 63 % de la population a moins de 24 ans. Cet avantage d'être le continent le plus jeune et le plus dynamique devrait être exploité et être considéré comme une opportunité pour lancer un élan africain. » [The Thinker, juillet 2011/vol. 29]
Une Afrique démocratique respectueuse de la liberté d'association, ayant des élections libres et égales, et gouvernée dans le respect des droits de l'homme et des différences religieuses et ethniques peut et doit jouer un rôle dans l'amélioration de la gouvernance mondiale et le développement durable commun. |