
Pour les Chinois, la piété filiale désigne l'attachement fervent et respectueux aux parents et aux autres membres de la famille. Elle constitue, depuis l'époque de Confucius, un élément essentiel de la culture traditionnelle chinoise. Aujourd'hui, ce concept ancien fait son entrée dans le monde du travail puisqu'il a été défini comme l'un des critères de sélection des fonctionnaires dans un district du nord de la Chine. Cette décision a soulevé un vif débat au sein du public.
Selon un règlement proposé par Qi Jinghai, secrétaire du comité du district de Weixian (province du Hebei, nord de la Chine) du Parti communiste chinois (PCC), les candidats aux emplois publics du district ne seront pas retenus s'il est prouvé qu'ils n'ont pas respecté ou pris soin de leurs parents. De même, les fonctionnaires déjà en poste ne pourront bénéficier d'une promotion si de tels faits sont avérés. Les autorités locales expliquent ainsi qu'avant de nommer un agent de la fonction publique, le gouvernement mènera une enquête auprès des parents, des beaux-parents, de la compagne et éventuellement des enfants du candidat. Il sera demandé à ces derniers de signer un certificat attestant de la piété filiale du candidat, à défaut duquel celui-ci ne pourra postuler à un emploi public.
À ce jour, onze fonctionnaires de Weixian ont vu leur demande de promotion refusée, leurs parents n'ayant pas voulu attester leur piété filiale.
Cette initiative a suscité diverses réactions au sein de la société chinoise. Ses partisans sont convaincus que la piété filiale reflète la moralité d'un fonctionnaire. Quiconque ne respecte pas ou ne s'occupe pas de ses parents n'est pas qualifié pour entrer dans le service public. Pour les détracteurs de cette décision, la piété filiale est du ressort de la vie privée et ne doit pas être confondue avec la loyauté envers l'intérêt public ou l'État. Selon ces derniers, les gens pieux ne sont pas forcément de bons fonctionnaires.
POUR
Feng Wenshu
Blog.sina.com.cn
La piété filiale est la plus importante vertu aux yeux des Chinois. Si une personne ne respecte pas ses parents ou beaux-parents, comment pourrait-elle se préoccuper du bien-être de ses proches, amis ou collègues, sans parler de son sens de la responsabilité sociale ou de son amour pour le peuple ou la patrie ? Pourtant, toutes ces qualités sont indispensables à un bon fonctionnaire. À cet égard, il est nécessaire d'introduire la piété filiale comme l'un des critères de promotion des agents de la fonction publique et d'évaluation de leurs performances.
La compétence et l'intégrité morale constituent deux normes essentielles et inséparables dans la sélection des fonctionnaires du PCC. À ce titre, les personnes vertueuses, mais incompétentes ne pourront pas non plus devenir des fonctionnaires qualifiés. Il est donc préférable que la sélection des agents de la fonction publique auxquels le peuple accorde sa confiance repose également sur la vérification préalable de sa piété filiale.
L'initiative prise à Weixian devrait inciter les fonctionnaires à se soucier de leur moralité personnelle, ce qui ne peut être que favorable à une gouvernance fondée sur les vertus.
Li Wei
Employé de bureau, Beijing
Je suis favorable au système instauré à Weixian.
D'une part, cette initiative a pour objectif premier de préserver l'intérêt du peuple et cela mérite approbation. Respecter et prendre soin de ses parents et proches aînés constitue le fondement de la moralité sociale. L'examen de la piété filiale d'un fonctionnaire fait partie intégrante de l'évaluation de son intégrité morale.
D'autre part, les bons exemples que les fonctionnaires donneront dans ce domaine encourageront les citoyens à faire de même, favorisant une meilleure prise en charge et un plus grand respect des personnes âgées.
Lors de l'examen de la piété filiale d'un candidat, le gouvernement doit s'en tenir à des critères précis et éviter que ce contrôle ne devienne une simple formalité.
Huang Yunming
Professeur d'éthique
Je pense que l'initiative de Weixian visant à retenir de nouveaux critères de sélection des fonctionnaires est une démarche constructive.
Le débat sur la distinction entre les vertus publiques et privées n'en est pas pour autant injustifié. Les pays occidentaux font ainsi clairement la différence entre les deux. Néanmoins, dans la culture traditionnelle chinoise, il n'existe pas de ligne de démarcation nette entre les deux notions. Il existe aujourd'hui des normes spéciales d'évaluation des compétences professionnelles des fonctionnaires. Afin de contenir le côté sombre de la nature humaine, il est également nécessaire de s'assurer légalement de leur intégrité morale.
|