En juillet, le gouvernement a dévoilé un projet d'amendement du règlement sur les péages d'autoroutes. Le règlement révisé vise à prolonger la période de péage sur les autoroutes financées par le gouvernement.

Dans son rapport annuel sur le péage des autoroutes publié en décembre dernier, le ministère des Transports et Communications a indiqué que la Chine avait accumulé un déficit immense – 66 milliards de yuans (10,4 milliards de dollars) – dans sa construction et son opération du plus grand réseau d'autoroutes au monde.

Selon le règlement précédent, les autoroutes financées par le gouvernement sont autorisées à collecter des péages jusqu'à 15 ans après leur construction.

Au centre et dans l'ouest de la Chine, où l'économie est moins développée, cette période peut être prolongée jusqu'à 20 ans. Au contraire, le nouveau règlement ne détermine pas de période précise de maintien du péage.

Le projet a provoqué une vive discussion.D'après les détracteurs de ce projet, prolonger la période du péage ne peut que porter atteinte à la crédibilité du gouvernement.

Néanmoins, d'autres estiment que les péages sont le moyen le plus juste de financer le fonctionnement et l'entretien des vastes réseaux autoroutiers chinois.

Pour

Chen Bin

Commentateur des médias

Selon les statistiques du ministre des Transports et Communications, le coût moyen pour construire 1 km d'autoroute atteignait quelque 100 millions de yuans (15,7 millions de dollars) en 2013. Des fonds réguliers sont également demandés pour les maintenir en état. Les autoroutes ne peuvent pas être construites comme par magie. Les perspectives économiques signifient qu'il n'y a pas d'autoroutes gratuites.

Deux catégories d'acteurs peuvent construire ces autoroutes, qui constituent finalement une sorte de produit commercial. L'une est des entreprises privées, et l'autre est les acteurs gouvernementaux.

Quelle que soit l'origine des fonds, faire payer ceux qui utilisent ces autoroutes est le moyen le plus efficace pour les maintenir en état de fonctionner. Même si les individus peuvent rouler gratuitement sur les routes construites par le gouvernement, certains sont obligés de payer pour la construction, le fonctionnement et le maintien – ce sont les contribuables. Or certains contribuables n'utilisent jamais ou rarement les autoroutes : ce n'est donc pas juste pour les faire payer.

En outre, une utilisation gratuite peut conduire à des embouteillages sur l'autoroute. En 2010, Guangzhou [au sud de la Chine] a arrêté le péage sur une autoroute, aboutissant à une fréquentation accrue, surtout aux heures de pointe. Un trajet qui ne prenait auparavant que 15 minutes met désormais une demi-heure.

Cette politique de péage gratuit a des conséquences importantes. Chaque contribuable doit payer pour les autoroutes et les utilisateurs perdent leur temps dans les transports. Plus de transports, plus d'accidents. En cas d'urgence, l'autoroute n'est plus une option rapide. Tout cela montre que l'option qui paraît gratuite est en réalité celle qui coûte le plus cher. La période actuelle de péage des autoroutes doit donc être prolongée.

Contre

Hu Yinbin

Quzhou Daily

Comme la construction des autoroutes demande un très grand investissement et est essentielle pour le développement économique et social, il est acceptable de faire payer les péages. Mais, ceux-ci doivent être limités. Le gouvernement ne peut pas étendre la période de péage à la durée nécessaire pour rembourser la construction des autoroutes.

D'une part, les informations actuelles des revenus des péages manquent de transparence. Prenons la province du Guangdong par exemple. Selon une déclaration des autorités provinciales des transports du 29 juin, ses autoroutes ont tiré un profit de 390 millions de yuans (61,2 millions de dollars) pour l'année 2014. Cependant, un communiqué précédent publié par les mêmes autorités le 11 juin a montré que les mêmes autoroutes avaient entraîné un déficit de 2,88 milliards de yuans (452 millions de dollars).

Si les chiffres donnés par les autorités provinciales peuvent changer aussi radicalement, qu'en est-il de la crédibilité des chiffres du déficit – 66 milliards de yuans (10,4 milliards de dollars) – donnés par le ministre des Transports et Communications ?

Peut-on faire confiance aux périodes de remboursement basées sur ces chiffres confus ? À cela s'ajoutent les intérêts des gouvernements locaux ou de certains départements, qui sont susceptibles de prolonger la période de remboursement pour des raisons fictives. Sans transparence, le public ne peut pas contrôler le bien fondé de [ces mesures]. De plus, si les autoroutes sont autorisées à percevoir un péage pour une période illimitée, les gouvernements locaux pourraient y voir une aubaine financière et construire des autoroutes en surnombre. La construction répondrait à leurs intérêts propres plutôt qu'à ceux des consommateurs.

Pour

Jing Qiaoxi

People.com.cn

Puisque les conducteurs représentent seulement une petite proportion de la population chinoise, le moyen le plus juste est de faire payer seulement ceux qui utilisent les autoroutes. La principale question est que l'utilisation des péages n'est pas transparente et que les compagnies de construction pourraient en tirer des profits illégaux. Prolonger la période des péages pourrait engendrer plus de corruption.

D'après moi, la politique de péage ne va pas nécessairement conduire à la corruption. Même si les autoroutes sont gratuites, il peut y avoir de la corruption. Donc, en même temps qu'on prolonge la période de péage, il convient de mettre en place des politiques anti-corruption.

Si le gouvernement sollicite l'opinion publique, pourquoi ne pas l'écouter ? Il y a beaucoup à faire pour le gouvernement, notamment mettre les revenus des péages sous la surveillance du public, et expliquer pourquoi il encourage des déficits énormes.