Il y a quarante ans, à travers le monde, les mères disaient à leurs enfants : « Finis ton assiette, pense aux gens qui meurent de faim en Chine. » Mais les temps ont changé et les choses sont aujourd'hui bien différentes. En fait, la situation est si différente que loin d'avoir trop peu à manger, le pendule a oscillé vers l'autre extrême.
Il y a peu, j'étais assis dans le coin d'un McDonald's dans le centre de Beijing en sirotant un chocolat chaud et en regardant les gens autour. C'est mon passe-temps favori en Chine. À côté de moi, une mère et son jeune fils, au plus âgé de huit ans, se sont installés avec leur plateau.
J'ai regardé le garçon avaler bruyamment deux cheeseburgers, deux grandes portions de frites, un grand gobelet de Coca-Cola, une tarte aux pommes et une sorte de crème glacée pour dessert.
Ce qui était fascinant était la manière dont il mangeait, ou plutôt dévorait. La mère n'a pas pris une bouchée, elle s'est contentée de le contempler avec adoration. Ce qui m'a fait observer cette scène est que le garçon était gros au point d'être obèse. Ses joues commençaient directement sous ses yeux et sa chair ondulait vers le bas de son corps en bourrelets. Rien de tout cela ne semblait troubler sa mère, qui l'encourageait activement en lui tapotant la tête et en roucoulant.
En jetant un regard autour de la salle, j'ai vu qu'il y avait au moins cinq autres garçons boudinés accompagnés d'adultes, sans doute leurs parents, occupés au même rituel. Abondant est le mot qui vient à l'esprit.
Il y a quelque chose d'intrinsèquement étrange à voir un Chinois trop gros. C'est comme voir une Ferrari blanche ou Jackie Chan dans un film romantique. En quelque sorte, cela n'est pas normal. Après tout, la Chine est une nation connue pour ses silhouettes minces et son mode de vie sain.
Le plus triste dans tout cela, c'est que les enfants chinois s'arrondissent de plus en plus vite. Ce peut être dû au fait que les parents devenus riches de ces petits « empereurs » leur donnent ce qu'ils n'ont jamais eu durant leur propre enfance, ou que selon un raisonnement étrange, un peu de graisse donne une image flatteuse d'aisance et de santé à de nombreux parents.
Uniques enfants dans une famille élargie, ces jeunes sont gâtés par leurs parents et leurs grands-parents (des deux côtés de la famille) et sont récompensés avec des aliments, en particulier avec de la restauration rapide, contenant une grande quantité de matières grasses et de calories. Ils font également moins d'exercice, sont souvent inactifs et regardent la télévision en grignotant.
Le gouvernement cherche à remédier à cette tendance, notamment en construisant des aires de jeu, en ouvrant des colonies sportives d'amincissement et en obligeant les écoliers à faire une heure de sport chaque jour dans leur établissement.
Mais ce n'est pas seulement une question d'exercice. Un nombre croissant de Chinois mange plus de plats préparés riches en viande, en gras, en sel et en sucre, et moins de céréales et de légumes, ce qui est souvent associé à la modernisation du mode de vie dans les pays en développement comme la Chine.
En 2013, le nombre de mineurs obèses a atteint 120 millions, selon le Centre chinois de contrôle et de prévention des maladies. Inévitablement, cela conduit à une grande augmentation des cas d'hypertension artérielle et de diabète.
J'ai vu le garçon chinois trop rond et sa mère se lever pour partir. Elle lui a souri et a pris sa main potelée. Tandis qu'il se dandinait au loin, j'ai songé que ces bourrelets superflus étaient le prix payé par les Chinois pour leur nouvelle prospérité et leur nouveau mode de vie. Il est peut-être temps que la relation entre la croissance économique et le tour de taille s'élargissant encore plus rapidement donne matière à réfléchir, et que les parents-poules apprennent à dire non. |