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  2020-03-31
 

Nuées mortelles

par Godfrey Olukya  ·   2020-03-31
Mots-clés: criquets; Afrique de l’Est

Les criquets pèlerins sont capables de causer des dégats considérables en peu de temps. (GODFREY OLUKYA)

 

Ils arrivent par millions, dans un nuage vrombissant qui assombrit le ciel en Afrique de l'Est. Sur leur passage, ils sèment la peur, la colère et le désespoir.

Depuis plusieurs semaines, une violente invasion de criquets pèlerins fait rage dans les pays de la région. La Somalie, le Kenya, l'Éthiopie, Djibouti, l'Érythrée, la Tanzanie, le Soudan du Sud, la République démocratique du Congo et l'Ouganda sont touchés.

De grands hectares de cultures vivrières et commerciales, d'arbres et de végétation en général ont été dévastés dans ces pays qui s'efforcent, avec l'aide de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO), de détruire les criquets pèlerins, notamment par la pulvérisation aérienne.

 

Du jamais vu en 25 ans

Selon la FAO, l'invasion acridienne a commencé au Yémen et en Somalie, où les criquets ont pondu leurs œufs l'année dernière. Ils se sont ensuite déplacés en Éthiopie, en Érythrée et à Djibouti. En raison du manque de ressources au Yémen et en Somalie, la surveillance et le contrôle de leur nombre s'avèrent particulièrement difficiles.

« Un cyclone qui a balayé le nord-est de la Somalie et l'est de l'Éthiopie a provoqué de fortes pluies dans la région, créant des conditions idéales pour la reproduction des insectes », a déclaré Keith Cressman, responsable des prévisions acridiennes de la FAO.

Le secrétaire général de l'ONU, Antonio Guterres, a déclaré qu'il existe un lien entre le changement climatique et cette crise sans précédent en Afrique de l'Est. « Des mers plus chaudes signifient plus de cyclones, générant des lieux de reproduction idéaux pour les criquets. Aujourd'hui, les essaims sont de la taille de grandes villes et ça empire de jour en jour », a-t-il indiqué.

Début février, la FAO a annoncé que le nord-est et l'est de l'Afrique subissait la pire invasion en 25 ans et que des dizaines de milliers d'hectares de cultures et de pâturages étaient détruits. L'organisation a également averti du danger imminent auquel la région allait devoir faire face.

Le 2 février, après que les criquets se sont multipliés et étendus, la Somalie a déclaré l'état d'urgence nationale.

Le 28 décembre 2019, déjà, le premier essaim avait traversé la frontière kényane en provenance de Somalie. Là, d'immenses essaims, atteignant 60 km de long et 40 km de large, ont envahi tous les comtés du nord du pays et certaines zones centrales, causant des dégâts considérables aux cultures en l'espace d'à peine un mois.

Selon Mohamad Adbi, gouverneur du comté de Wajir, qui a subi de plein fouet l'invasion, les criquets pèlerins ont endommagé 470 000 acres (190 202 hectares) de cultures et 741 000 acres (299 872 hectares) de végétation.

 

Des déplacements rapides

Depuis l'arrivée des criquets, le Kenya pulvérise des insecticides. Début mars, la FAO a fait don aux autorités de trois avions pour tenter d'éradiquer les criquets qui se sont répandus dans 26 comtés, portant à cinq le nombre total d'appareils livrés dans le pays.

Tobias Takavarasha, représentant de la FAO au Kenya, a déclaré que ce don permettrait d'intensifier les opérations aériennes, mais également au sol. « Nous espérons que cela poussera la réponse du Kenya à une échelle supérieure, qui se trouve actuellement en situation d'urgence de niveau trois », a déclaré le représentant.

Sur le terrain, les fermiers sont désespérés, à l'instar de James Okulo.

« J'ai perdu toutes mes récoltes. En une journée, mon champ de maïs de 5 acres a été détruit », se lamente l'agriculteur.

Les premiers essaims sont entrés en Ouganda une semaine plus tard.

Le ministre de l'Agriculture, de l'Industrie animale et de la Pêche, Vincent Ssempijja, a annoncé que les criquets avaient été aperçus pour la première fois le 9 février.

« Ils ont d'abord été aperçus dans deux districts. Mais au 20 février, ils se trouvaient dans plus de 20 districts, et 27 districts au 26 février », indiquant la vitesse de déplacement des insectes.

Le gouvernement ougandais a débloqué des fonds pour combattre le fléau. À ce jour, 35 milliards de shillings (9,5 millions de dollars) ont été affectés. Des avions ont été utilisés pour pulvériser les criquets et

2 000 soldats ont été formés à l'utilisation de matériel de pulvérisation, et envoyés dans les zones touchées.

« Nous pulvérisons continuellement les criquets. Les insectes qui nous arrivent sont ceux qui ont survécu aux pulvérisations dans d'autres régions », a expliqué le général Sam Kavuma, commandant de l'armée ougandaise en charge des pulvérisations.

Le 17 février, l'essaim a atteint le Soudan du Sud. Onyoti Adigo Nyikiwec, ministre de l'Agriculture, a déclaré que les insectes s'adaptaient : « Les criquets fonctionnent comme des êtres humains. Ils envoient un essaim de reconnaissance pour s'assurer qu'il y a de la nourriture et que la nouvelle zone est propice à la reproduction avant que le gros de l'essaim n'arrive. » La dernière invasion de criquets dans le pays remonte à 70 ans.

Mais l'essaim ne s'est pas arrêté là. Le 21 février, il a atteint l'est de la République démocratique du Congo. « Ils ravagent nos cultures. Ils ne sont pas nombreux mais ils sont destructeurs », constate Louis Longwa, un agriculteur local.

 

Menace pour la sécurité alimentaire

Dans un communiqué du 24 février, la FAO a déclaré que si l'invasion n'était pas maîtrisée rapidement, les agriculteurs pourraient voir leurs récoltes décimées. Une nouvelle génération de criquets devrait éclore en février, avec de nouveaux essaims attendus début avril, ce qui coïnciderait avec les prochaines plantations.

Le directeur général de l'organisation, Qu Dongyu, a indiqué que la recrudescence des criquets pèlerins dans la Corne de l'Afrique et en Afrique de l'Est était susceptible de provoquer une crise humanitaire. Il a ainsi appelé à un financement urgent pour lutter contre l'épidémie et protéger les moyens de subsistance et la sécurité alimentaire de la région.

La FAO a déjà débloqué 15,4 millions de dollars sur les 76 millions de dollars demandés pour les cinq pays les plus touchés, mais elle s'attend à ce que les besoins augmentent en raison d'une possible propagation à d'autres pays. Le service d'information sur le criquet pèlerin de la FAO a déclaré que la situation est extrêmement alarmante et s'aggraverait encore avec de nouvelles infestations, attendues en avril.

L'invasion représente une menace sans précédent pour la sécurité alimentaire dans toute la sous-région, où plus de 19 millions de personnes subissent déjà un degré élevé d'insécurité alimentaire, a indiqué l'organisation.

Selon la FAO et d'autres spécialistes, l'invasion pourrait devenir un fléau si elle n'était pas maîtrisée rapidement.

 

 

Le criquet pèlerin, vorace et sans frontière

Le schistocerca gregoria, de son nom scientifique, est une espèce unique de criquets gloutons à cornes courtes.

Selon les experts de la FAO, il s'agit de l'un des nuisibles migrateurs les plus destructeurs au monde. Il est très mobile et se nourrit en grandes quantités de toute végétation verte, y compris les cultures, les pâturages et le fourrage. Un essaim typique peut être composé de 150 millions d'individus par km² et peut parcourir jusqu'à 150 km en une journée grâce au vent. Un petit essaim d'un kilomètre carré peut ingérer la même quantité de nourriture en une journée que 35 000 personnes. Le criquet pèlerin est un nuisible transfrontalier qui détruit l'agriculture et les moyens de subsistance des populations des pays qu'ils envahissent.

 

Reportage du Kenya

  

  

  
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