Une actrice béninoise poursuit son rêve de cinéma en Chine afin d’établir des ponts entre les deux cultures. 

Rawdoth Alazi Soumaila lors du Forum de coopération économique et commerciale sino-béninoise, à Beijing, le 2 avril 2022. (COURTOISIE) 

Rawdoth Alazi Soumaila, jeune actrice et mannequin originaire du Bénin, brille désormais sur le grand écran chinois. Formed Police Unit, un film récent du réalisateur hongkongais Lee Tat-Chiu, met en vedette son talent artistique. Adoptant le nom chinois de Mulan, Rawdoth exprime son désir de se distinguer et d’incarner une figure héroïque, à l’instar de la légendaire guerrière chinoise, admirée pour sa bravoure et son humilité depuis plus de 1 500 ans. En explorant le monde du septième art, elle souhaite également jouer un rôle de messagère entre l’Afrique et la Chine. 

Rawdoth Alazi Soumaila interprète le rôle d’un témoin africain dans le film Formed Police Unit. (COURTOISIE) 

Une prestation émouvante 

Le film décrit l’épopée d’un témoin africain, interprété par Rawdoth, survivant d’une attaque par un groupe armé dans son village natal. Il est protégé par des policiers chinois en mission de maintien de la paix dans un pays de l’Afrique de l’Ouest. Malgré les dangers, ces derniers escortent le témoin jusqu’au tribunal. Malheureusement, l’un des policiers chinois est capturé et torturé par le groupe armé qui demande la remise du témoin. Face à ce dilemme cruel, le témoin implore, d’une voix étouffée : « Revenons le sauver ! Vous avez risqué vos vies, maintenant, c’est à notre tour de vous protéger ! » L’interprétation de Rawdoth, empreinte d’une vive émotion, a ému profondément les spectateurs. 

Afin d’entrer dans la peau de son personnage, Rawdoth a effectué de nombreuses recherches approfondies sur les missions de maintien de la paix et a créé un univers fictif en s’immergeant dans un pays ravagé par les conflits. Même dans ses rêves, elle discutait avec son personnage pour le connaître sur le bout des doigts. Cette méthode lui a permis d’exceller lors du tournage, où, malgré sa stature modeste, elle démontre une détermination et un courage remarquables. Souvent émue aux larmes, elle incarne la voix de ceux qui ont enduré la guerre sans pouvoir exprimer leur douleur. Consciente de l’immense perte qu’ils ont subie, elle témoigne de sa gratitude envers la Chine pour l’envoi de Casques bleus dans les zones de conflit sur le continent africain et appelle à la préservation de la paix et de la sécurité dans le monde. 

Son opinion est partagée par Christiane Bokpe Adovelande, épouse de l’ambassadeur du Bénin en Chine. Après avoir visionné le film, celle-ci a exprimé son admiration pour la bravoure et le sens des responsabilités montrés par la police chinoise dans le maintien de la paix mondiale. Elle a également salué le rôle positif de Rawdoth dans le renforcement des liens d’amitié et de coopération entre l’Afrique et la Chine en partageant son amour de la culture chinoise avec un public plus large. 

Rawdoth Alazi Soumaila (deuxième à gauche) lors de la première du film Formed Police Unit à Beijing, le 29 avril. (COURTOISIE) 

Se convertir à l’art 

L’histoire de Rawdoth en Chine a débuté en septembre 2013 par une année d’études de chinois à l’Université Jiaotong de Chongqing, grâce à une bourse offerte par l’Institut Confucius de l’Université Abomey Calavi au Bénin. Par la suite, elle a poursuivi ses études de licence en commerce international à l’Université de technologie et de commerce de Chongqing. 

Bien que son chemin semble s’orienter loin du monde du spectacle, un rêve d’enfance a réveillé sa passion pour l’art. « Ma mère m’a raconté que, dès l’âge de trois ou quatre ans, je manifestais le désir de devenir une vedette à la télévision. Pour moi, c’était un destin tout tracé de m’intégrer dans l’univers du cinéma », se remémore Rawdoth. 

De plus, le renforcement des échanges culturels est considéré comme essentiel pour rapprocher les peuples africains et chinois. « L’amitié entre la Chine et l’Afrique a été cultivée par les dirigeants de la génération précédente et transmise jusqu’à nos jours. Il revient à notre génération de continuer à entretenir cette amitié », partage Rawdoth avec CHINAFRIQUE. Selon elle, le cinéma est un moyen efficace pour immortaliser cette relation amicale à l’époque numérique où les jeunes sont passionnés par les vidéos. 

Pour se frayer un chemin dans l’industrie cinématographique, elle s’est plongée dans l’étude du cinéma et a suivi des cours particuliers avec un professeur d’art dramatique. Grâce à son expérience dans le mannequinat acquise depuis le lycée, elle a développé un bon sens de l’objectif. Ses échanges réguliers avec des cinéastes comme Jackie Chan et certains membres de son équipe de tournage lui ont permis de se familiariser davantage avec ce métier. En surmontant de nombreux obstacles, elle a réussi le concours d’entrée très sélectif de l’Institut du cinéma de Beijing. Cet été, elle a obtenu son diplôme de master en arts du spectacle en tant que première étudiante africaine de son département. Par ailleurs, une série télévisée, intitulée Happiness Juncao, dans laquelle Rawdoth a participé au tournage, est prévue pour être diffusée au cours du deuxième semestre de cette année. Un avenir prometteur s’annonce pour elle. 

Rawdoth Alazi Soumaila accompagnée de Jackie Chan lors de la Semaine internationale des films d’action de Jackie Chan, à Datong, dans la province du Shanxi, en 2018. (COURTOISIE) 

La vision d’une productrice 

Rawdoth ne voit pas son diplôme en commerce international comme un obstacle à sa carrière d’actrice, mais plutôt comme un atout précieux, enrichissant sa compréhension de la production cinématographique. « Cela signifie que je peux contribuer à la coproduction entre la Chine et l’Afrique, car je saurai comment attirer des investissements pour les films », analyse-t-elle. 

Lors de sa première rencontre avec l’équipe de production du film Formed Police Unit, par exemple, ses compétences en commerce international, sa maîtrise du chinois, ainsi que ses connaissances sur l’Afrique et la Chine, font d’elle un choix de prédilection pour son personnage. « Le producteur ne me considérait pas entièrement comme une actrice, mais me plaçait dans la position d’une collaboratrice. Pour lui, j’étais pleine de ressources potentielles », explique-t-elle. 

Bien qu’incertaine des opportunités futures, elle est proactive, envisageant de produire et d’écrire des films. Elle souhaite explorer la collaboration entre la Chine et l’Afrique dans sa carrière. « Les relations sino-africaines se renforcent, offrant à l’industrie cinématographique une occasion de faciliter la diplomatie culturelle », indique-t-elle. 

En avril, elle est retournée dans son pays avec deux producteurs chinois. Ils collaborent avec les ministères béninois de l’Industrie, du Commerce, du Tourisme, de la Culture et des Arts pour une coproduction cinématographique. « Le film sera tourné au Bénin, permettant au public chinois de découvrir la culture, le commerce et la vie quotidienne en Afrique », s’exclame-t-elle. 

Lors d’un entretien avec le ministre du Tourisme, de la Culture et des Arts, elle s’est déclarée très fière de pouvoir apporter sa contribution à son pays et à la coopération sino-africaine. Elle espère continuer sur sa lancée en s’inspirant de l’esprit de Mulan.