La coopération sino-africaine doit promouvoir une modernisation durable en Afrique. 

Ouvriers à l’œuvre sur une chaîne d’assemblage de véhicules électriques à Chongqing, dans le sud-ouest de la Chine, le 25 avril 2024. (XINHUA) 

L’Afrique abrite plus de 30 % des réserves mondiales de minéraux critiques, mais ne contribue qu’à environ 4 % des émissions mondiales de carbone. Pourtant, elle subit de plein fouet les impacts du changement climatique en raison de son sous-développement, de sa fragilité économique, de sa forte exposition et de ses ressources financières limitées pour l’adaptation. 

Rien qu’en 2023, au moins 15 700 personnes ont perdu la vie à cause de catastrophes météorologiques extrêmes, tandis que 34 millions d’autres ont été touchées sous diverses formes par la crise climatique. Alors que ses vastes ressources naturelles continuent d’attirer l’intérêt des grandes puissances, notamment pour l’approvisionnement en matériaux essentiels à l’industrie manufacturière et aux technologies, le continent fait face aux conséquences environnementales et socio-
économiques de l’exploitation des ressources : pollution des sols, des eaux et de l’air, accumulation de déchets et émissions toxiques. Ces effets néfastes font de la sécurité et de la durabilité des ressources des enjeux centraux de la géopolitique mondiale. 

Il devient impératif d’adopter une exploitation plus efficace et plus respectueuse des ressources naturelles, avec un moindre impact sur l’environnement et la santé humaine. Le changement climatique est le résultat direct de modèles de développement non durables : il est donc essentiel d’exploiter les richesses naturelles de l’Afrique de manière responsable et pérenne. 

Développement conscient 

Depuis les années 1990, la présence chinoise en Afrique s’est intensifiée, favorisant la croissance économique du continent. Consciente de l’impact environnemental de l’exploitation des ressources, la Chine met en place des stratégies pour concilier sécurité, durabilité et préservation de la communauté de destin sino-africaine. 

La Chine a réalisé des avancées majeures en matière de développement durable, notamment à travers ses technologies de pointe dans les énergies renouvelables et les véhicules électriques. En 2023, elle représentait plus de 60 % de la production mondiale de véhicules électriques, plus de 70 % de la production de batteries lithium-ion et plus de 80 % de la production de panneaux solaires. Ces réalisations ont consolidé son rôle de leader dans l’économie verte et les énergies propres, éléments clés de son processus de modernisation. 

Cette dynamique témoigne de l’engagement de la Chine dans la lutte contre le changement climatique. En adoptant une nouvelle approche de gouvernance environnementale, le pays s’impose comme un acteur clé des discussions mondiales sur le climat. Le rapport au XX^e Congrès national du Parti communiste chinois souligne que la modernisation chinoise vise à « assurer un développement de qualité, enrichir le monde spirituel de la population, réaliser la prospérité commune du peuple tout entier, favoriser la coexistence harmonieuse entre l’homme et la nature, promouvoir la construction d’une communauté de destin pour l’humanité […] ». 

Cette vision met en lumière la complémentarité entre la Chine et l’Afrique, tout en ouvrant des perspectives de coopération dans les domaines des énergies renouvelables, de l’industrie manufacturière, des infrastructures et des minéraux essentiels. L’expérience chinoise en modernisation offre une précieuse référence pour l’Afrique, notamment en gestion des ressources, innovation et transfert de technologies. 

Engagements concrets  

Lors du Sommet de Beijing du Forum sur la Coopération sino-africaine (FCSA) en 2018, le Président Xi Jinping avait annoncé huit initiatives majeures, définissant un cadre de collaboration dans des secteurs clés : la connectivité des infrastructures, la promotion industrielle, la facilitation du commerce, le développement vert, le renforcement des capacités, la santé, les échanges humains et culturels, ainsi que la paix et la sécurité. Parmi ces axes, le développement vert et le renforcement des capacités apparaissent comme des leviers essentiels pour garantir une modernisation écologique de l’Afrique. 

Lors du Sommet 2024 du FCSA à Beijing, le Président Xi a réaffirmé l’engagement de la Chine en faveur de la transition énergétique et du développement vert en Afrique. Il a annoncé 30 projets d’énergies propres, une coopération sur les catastrophes climatiques, la préservation de la biodiversité et la création de 30 laboratoires communs pour l’innovation verte. 

Ce partenariat doit être pleinement exploité par l’Afrique. Par ailleurs, dans le cadre de l’initiative « la Ceinture et la Route » (ICR), la Chine a intensifié son soutien aux infrastructures durables, aux énergies renouvelables et aux transports écologiques. Elle participe également activement à la Coalition internationale pour le développement vert de l’ICR, témoignant de sa volonté de promouvoir un modèle de croissance plus durable. 

Étapes futures 

Comment la Chine et l’Afrique peuvent-elles concrétiser cette ambition d’une modernisation respectueuse de l’environnement ? 

La Chine doit approfondir son partage d’expérience en matière de modernisation avec les pays africains. Une coopération accrue permettra d’élaborer des plans de développement socio-économique adaptés aux réalités locales, de renforcer les capacités institutionnelles et d’améliorer l’efficacité de la gouvernance. 

Ensuite, la technologie et l’innovation sont essentielles au développement. En Afrique, la durabilité doit guider l’industrialisation et la montée en compétences. Le progrès technologique représentant les trois quarts de la croissance économique, son absence pourrait freiner l’essor du continent. D’où l’importance du transfert de technologies promis par la Chine, qui doit s’inscrire dans une logique écologique pour un développement durable. 

La Chine doit continuer à promouvoir le développement vert à travers l’ICR en Afrique. L’Initiative 2021 pour le partenariat ICR sur le développement vert, signée par la Chine et 28 pays, prône des actions climatiques basées sur les principes d’équité et de responsabilités communes mais différenciées, tout en renforçant la 
coopération sino-africaine en matière de gestion des ressources et d’innovation verte. 

La Chine et l’Afrique prennent conscience de leur interdépendance et des enjeux environnementaux mondiaux. Leur coopération n’est pas seulement une nécessité morale, mais un choix stratégique pour une prospérité durable. Face au changement climatique, seule une collaboration renforcée offrira des solutions viables et efficaces. 

L’auteur est professeur de relations internationales / études stratégiques et d’études sino-africaines à l’Institut nigérian des affaires internationales à Lagos, et professeur invité émérite à l’Institut d’études africaines de l’Université normale du Zhejiang.