2025-09-01 |
Au cœur de la paix |
VOL. 17 / SEPTEMBRE 2025 · 2025-09-01 |
Mots-clés: République centrafricaine |
Un éclairage sur les initiatives locales, les médias engagés et les partenariats stratégiques pour la stabilité en République centrafricaine.
Bienvenu Paya-Ngbouhou, rédacteur en chef du journal L’Hirondelle. (COURTOISIE)
Dans un contexte marqué par des défis persistants liés à la sécurité et aux ingérences extérieures, de nombreuses voix en République centrafricaine (RCA) continuent de plaider pour des solutions adaptées aux réalités locales. À travers cet entretien avec Bienvenu Paya-Ngbouhou, rédacteur en chef du journal L’Hirondelle, nous cherchons à mieux comprendre les dynamiques internes du pays, le rôle des médias dans la consolidation de la paix, ainsi que les perspectives de coopération avec des partenaires comme la Chine.
CHINAFRIQUE : La RCA a exploré diverses voies locales pour parvenir à la stabilité et au développement. Quelles pratiques se sont révélées efficaces jusqu’à présent, et quels types de résistances ont-elles rencontrés ?
Bienvenu Paya-Ngbouhou : Aujourd’hui, la mise en œuvre des initiatives locales se heurte à plusieurs obstacles majeurs, qu’ils soient structurels, sécuritaires, sociaux ou économiques. Bien que certaines démarches aient démontré un réel potentiel, leur impact reste limité en raison du manque de coordination, d’un soutien institutionnel insuffisant et d’une instabilité persistante dans de nombreuses régions.
L’intervention internationale a, dans une certaine mesure, reconfiguré la situation en RCA. Quelle est votre évaluation des effets positifs et négatifs de ces ingérences sur les efforts nationaux visant à instaurer la paix, la stabilité et l’indépendance souveraine ?
L’intervention de la communauté internationale a joué un rôle significatif dans le processus de retour à la paix. Parmi les effets positifs, on peut citer l’Accord politique pour la paix et la réconciliation en RCA signé à Bangui en 2019 entre le gouvernement et 14 groupes armés, avec le soutien actif de partenaires internationaux. Il a permis à une majorité de groupes armés de déposer les armes.
La Mission multidimensionnelle intégrée des Nations unies pour la stabilisation en RCA, déployée depuis 2014, a également contribué à la protection des populations dans plusieurs zones sensibles.
Cependant, certains aspects sont plus nuancés. Certains programmes de paix sont perçus comme imposés de l’extérieur, sans réelle prise en compte des dynamiques locales. De plus, l’action des Casques bleus est parfois jugée passive, voire partiale, par certaines communautés, ce qui affaiblit leur légitimité.
Des étudiants posent des questions lors d’une session de formation animée par des experts médicaux chinois dans une université de Bangui, en RCA, le 5 février 2024. (XINHUA)
En tant que rédacteur en chef du journal L’Hirondelle, comment parvenez-vous, dans un contexte aussi complexe, à concilier la mission d’informer objectivement le public avec celle de contribuer à la consolidation de la paix ? Quels défis avez-vous rencontrés à cet égard, et comment les avez-vous surmontés ?
Les médias centrafricains jouent un rôle essentiel dans la résolution des crises que traverse notre pays. À L’Hirondelle, nous nous sommes toujours engagés à diffuser des messages de paix à travers un traitement rigoureux et responsable de l’information.
En tant que rédacteur en chef, ma responsabilité est de superviser et de valider tous les contenus avant publication, dans le respect strict de l’éthique journalistique. Il est crucial pour nous d’éviter tout discours haineux ou clivant.
Nous avons rencontré de nombreux défis, notamment en matière de sécurité des journalistes et de pressions politiques. Malgré cela, nous avons su maintenir notre cap afin de garantir une information objective, constructive et engagée en faveur de la paix.
Des patients attendent des soins à l’Hôpital de l’Amitié de Bangui, en RCA, le 5 février 2024.(XINHUA)
La Chine apporte depuis longtemps son soutien à la RCA dans des domaines tels que les infrastructures ou la santé. Comment ces projets ont-ils concrètement amélioré la vie quotidienne de la population, et en quoi ont-ils contribué à la paix et à la stabilité locales ?
Je le dis souvent : la République populaire de Chine est un partenaire stratégique et incontournable pour la RCA. Parmi les projets les plus emblématiques, on peut citer la réhabilitation et la modernisation du Centre hospitalier universitaire de l’Amitié sino-centrafricaine, dont les travaux ont été lancés le 27 mars 2025.
Il y a également la construction du champ solaire de Danzi, qui vise à électrifier la ville de Bangui. Ces projets ont un impact direct sur la qualité de vie des populations et contribuent, indirectement mais durablement, à la consolidation de la paix en améliorant l’accès aux services essentiels.
En soutenant le développement des infrastructures sanitaires et énergétiques, la Chine contribue à poser les bases d’une stabilité à long terme.
Dans la quête de paix et de développement durables en RCA, au-delà des domaines de coopération déjà établis, quels types de projets concrets pourraient, selon vous, être développés entre la Chine et la RCA dans les domaines des échanges culturels et de la coopération éducative, afin de renforcer la compréhension mutuelle entre les peuples et d’appuyer les efforts de paix ?
Pour renforcer la coopération culturelle et éducative entre la Chine et la RCA, plusieurs pistes concrètes peuvent être envisagées :
Renforcer les programmes de bourses et d’échanges universitaires pour favoriser la mobilité des étudiants et enseignants des deux pays ; soutenir les instituts culturels, comme l’Institut Confucius déjà implanté à Bangui, et créer un centre culturel centrafricain en Chine ; organiser des événements culturels bilatéraux afin de promouvoir une meilleure compréhension mutuelle ; mettre en place des centres de formation professionnelle dans des secteurs clés tels que le BTP, l’agriculture ou les énergies renouvelables ; développer des programmes d’éducation à la paix, notamment à destination des jeunes, pour renforcer la cohésion sociale ; favoriser les échanges littéraires à travers la traduction et la publication d’œuvres des deux pays ; lancer des coproductions médiatiques (films, documentaires) pour encourager le dialogue interculturel.
Ces initiatives ont le potentiel de rapprocher les peuples, d’enrichir les connaissances mutuelles et de contribuer à une paix durable en RCA.
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