Des enfants de Chengdu découvrent des livres du PEPSJC, d’éducation sexuelle et de prévention du sida

« Qu’est-ce qui vous vient immédiatement à l’esprit, lorsqu’on parle de sexe ? » À Dujiangyan dans le Sichuan, Mme Du Li, enseignante, pose cette question à des parents d’enfants en école primaire lors d’un cours d’éducation sexuelle, déclenchant une discussion animée sur l’éducation sexuelle à la puberté.

« Mon fils m’a demandé comment cela se faisait que lui et son père pouvaient faire pipi debout, tandis que je devais m’accroupir », raconte une mère gênée, dont l’histoire involontairement drôle illustre ses explications sur les différences de sexe à son fils. « Mon mari n’a pas su comment lui répondre et a bredouillé : “C’est le gouvernement qui l’a ordonné”. »

Expliquer le corps et le sexe

Comment répondre aux questions fréquemment posées par les enfants, comme la façon dont sont faits les bébés ? De nombreux parents évitent de donner une réponse directe, du fait de l’attitude traditionnelle des Chinois envers le sexe.

Il est largement reconnu, que l’éducation sexuelle est inadaptée dans les écoles chinoises. Cela a des effets importants sur les jeunes Chinois et peut engendrer des grossesses précoces, des avortements prémaritaux, le harcèlement sexuel et des infections par le virus du sida. Cette situation appelle à une prise de conscience, notamment de la part des parents, sur l’importance d’une éducation sexuelle appropriée. « Si nous les éduquons correctement sur leur corps et leur sexe, ils apprendront à se protéger », explique Zeng Yan, père d’un enfant de six ans.

Co-fondatrice du Projet d’éducation et prévention du sida pour les jeunes chinois (PEPSJC), Zhang Yinjun s’efforce de promouvoir une éducation sexuelle scientifique : « En dehors de la connaissance biologique, l’éducation sexuelle [que nous apportons] inclue une connaissance psychologique et morale, et aborde la responsabilité sexuelle. Il s’agit d’une part importante, que nous essayons d’enseigner aux jeunes générations ». L’PEPSJC a été fondé en 2006 et propose des cours d’éducation sexuelle et de prévention sur le sida dans une approche adaptée à chaque âge, en travaillant avec des écoles locales à travers le pays. Les cours pour parents de Du Li à l’école primaire Dingxin Xin Jian de Dujiangyan sont un exemple de réussite de ce projet.

Gou Ping, professeur en psychologie à l’Université de Chengdu dans le Sichuan, veut s’assurer, que ses étudiants cultivent un sens de la responsabilité, en ce qui concerne l’amour et le sexe. « Nous enseignons aux étudiants le principe d’amour et de responsabilité. Nous essayons de leur faire prendre conscience, que chaque décision qu’ils prennent sous l’influence de l’amour affectera définitivement leur futur, pour le meilleur et pour le pire. Les rapports sexuels devraient être vus comme une activité sérieuse, ayant des conséquences à vie », explique Gou Ping, qui travaille également avec le PEPSJC.

Gou Ping ajoute, que l’option facultative la plus populaire à l’Université de Chengdu est l’éducation sexuelle. La demande est telle pour ce cours, que toutes les places sont prises en l’espace de quelques minutes. L’Université de Chengdu est la seconde institution d’éducation supérieure dans le pays à proposer une option « Education sexuelle », après l’Université normale de la capitale, à Beijing.

Protéger le futur

La popularité des leçons d’éducation sexuelle montre, que les jeunes générations veulent avoir une meilleure connaissance sur ce sujet. Le manque d’éducation sexuelle crée de nombreux problèmes.

Un rapport publié en 2015 par la Commission nationale de santé et du planning familial indique que l’âge moyen pour le premier rapport sexuel chez les Chinois se situe à quinze ans et onze mois. Par conséquent, les grossesses précoces et non-désirées sont en augmentation et la plupart se terminent par un avortement. Près de 13 millions d’avortements sont pratiqués chaque année en Chine. Le manque d’éducation sexuelle pourrait en partie expliquer les taux de grossesses et d’avortements chez les jeunes générations, indique le rapport.

Une étude réalisée l’année dernière par le Centre chinois de contrôle et de prévention des maladies indique, que plus de la moitié des étudiants universitaires chinois ne savent pas comment utiliser correctement un préservatif. Selon Zhang Jianxin, professeur à l’École de santé publique de Chine de l’Ouest de l’Université du Sichuan, cela expose les jeunes Chinois aux maladies sexuellement transmissibles (MST), notamment le VIH.

Les experts estiment que c’est à l’école primaire, que les enfants sont le plus à même d’être éduqués dans ce domaine. « Il faut une éducation sexuelle continue et adaptée à chaque âge, pour aider à développer des comportements positifs sur les connaissances en matière de sexualité », explique Gou Ping. Selon elle, les écoles primaires devraient être encouragées à proposer une éducation sexuelle adéquate, plutôt que d’être critiquées dans leurs efforts.

En effet, certains parents pensent qu’à l’école primaire, leurs enfants sont trop jeunes pour recevoir une éducation sexuelle. Le manque de matériel pédagogique et faisant autorité dans le pays a aggravé la situation. Il y a quelques années, une série de livres scolaires pilotes avait déclenché la polémique à Beijing, du fait des descriptions explicites de rapports sexuels accompagnées d’illustrations graphiques. Ces livres essayaient d’éduquer les enfants sur le sexe et la façon d’éviter les abus sexuels, mais certains parents ont estimé, que le contenu était trop explicite et inapproprié pour les élèves.

Du Li estime que l’éducation sexuelle devrait débuter naturellement, à la maison : « En tant qu’éducateurs, nous devons éduquer les enfants, en premier lieu par l’intermédiaire de leurs familles. Ainsi, nous pouvons nous assurer que l’orientation morale - qui doit aller de pair avec l’éducation sexuelle - renforce la cohésion, ainsi que les normes sexuelles traditionnelles », explique-t-elle. « Il y a beaucoup d’incompréhension sur notre enseignement, explique Gou Ping. Notre tâche est d’apporter aux étudiants des conseils, et non de cautionner ou d’encourager les comportements sexuels à l’adolescence. »

Comparés aux générations pércédentes, les adolescents du XXIe siècle en Chine ont un accès plus important aux connaissances en matière de sexualité. « Les notions de genre et de sexualité ont augmenté dans une certaine mesure, mais ce n’est toujours pas suffisant », affirme Zhang Yinjun. Selon elle, pour rendre l’éducation sexuelle plus efficace pour les adolescents, celle-ci doit être intégrée dans le système éducatif à travers des efforts concertés et la compréhension de la société.

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