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Culture et Société
  2016-06-06
 

Nouvelle Perception

par Rachel Richez | VOL.8 JUIN 2016 CHINAFRIQUE
Mots-clés: tradition arabe;street art

 

Le quartier Manshiyat Nasr est l’un des plus pauvres de la capitale égyptienne 

 

Du haut de la montagne du Mokattam, au Caire, on peut désormais admirer la nouvelle œuvre de l’artiste franco-tunisien eL Seed, Perception. S’étendant sur plus de 50 immeubles, cette peinture murale orne le quartier dit des chiffonniers, ou Manshiyat Nasr. Si vous évoquez le quartier, vos amis Cairotes n’hésiteront pas à utiliser le péjoratif surnom donné à ses habitants : Zabbaleen, « les gens des poubelles ». Depuis des décennies, cette communauté copte vit des déchets de la capitale égyptienne, ayant développé un efficace système de recyclage. Malgré l’évidente utilité de cette activité, elle leur vaut le mépris des habitants de la ville. Avec Perception, le street artiste veut combattre cette vision négative, « J’ai voulu ouvrir un dialogue sur la façon dont nous jugeons nos semblables, sur l’importance et la responsabilité de chacun dans la société. Et plus largement, rendre hommage à la communauté de Manshiyat Nasr », confiait eL Seed à CHINAFRIQUE.  

 

Pour changer la perception des Cairotes, eL Seed a donc créé un « calligraffiti » circulaire de près de 300 mètres, finalisé au mois de mars 2016. Nom donné à ses compositions, le calligraffiti est un mélange de calligraphie arabe et de graffiti, style emblématique de l’artiste. Par des couleurs vives et des compositions uniques, il parvient presque à faire disparaître la calligraphie. Car si le message écrit est important, l’œuvre doit suffire et pouvoir être comprise et ressentie sans avoir à déchiffrer les mots qui s’y cachent. Pour Perception, l’artiste a composé un impressionnant cercle blanc, orange et bleu. La nuit, la peinture blanche fluorescente illumine le quartier. Derrière les belles calligraphies, on retrouve les mots de l’évêque copte du IIIe siècle, Athanase d’Alexandrie : « Quiconque veut bien voir la lumière du jour doit d’abord s’essuyer les yeux. » Un message de tolérance, à visée universelle : « Le quartier des chiffonniers du Caire n’est qu’un prétexte pour ouvrir un dialogue sur le thème de la perception. Comment nos préjugés sur une communauté nous poussent à les juger, à les condamner sans pour autant les connaître », explique eL Seed à CHINAFRIQUE.  

  

Un style rassembleur  

EL Seed est né en France de parents tunisiens. À l’adolescence, une crise identitaire le pousse à se tourner vers ses origines africaines. Il découvre alors la calligraphie arabe et très vite commence à l’intégrer dans ses graffitis. Mélange de tradition et de street art, il s’approprie ce style qui lui permet d’accepter son identité française et tunisienne. Ce style semble en effet par ses origines diverses avoir une force unificatrice. « Née d’une quête identitaire, mon approche artistique se développe pour devenir un modeste outil de rapprochement des peuples et des cultures », raconte eL Seed.  

 

Ses œuvres semblent tout naturellement devoir voyager, et elles le font : Algérie, Afrique du Sud, Qatar, Canada, France, Italie, Allemagne, Australie, Emirats arabes unis, Dubaï, entre autres. Pour l’artiste, ce travail à l’international requiert une proximité avec les populations : « Chaque œuvre que je crée se place dans un contexte politique, économique et social différent. Il est important pour moi qu’une œuvre en Afrique du Sud ou en Tunisie soit différente d’une œuvre en France ou en Grèce. L’œuvre devient propriété de la communauté. Je m’en détache complètement une fois l’œuvre achevée. » En 2012, eL Seed appelle à l’unité et à la tolérance avec une peinture murale de 47 mètres de haut recouvrant la mosquée de Jara, dans la ville tunisienne de Gabès. Pour cette œuvre, il choisit de citer le Coran :  

« Ô hommes ! Nous vous avons créés d’un mâle et d’une femelle et nous avons fait de vous des peuples et des tribus afin que vous puissiez vous connaître. »  

  

La nouvelle œuvre du street artiste eL Seed vise à changer la Perception des Cairotes 

 

Inspiration africaine  

L’Afrique semble tout particulièrement attirer cet artiste, pour qui le choix du lieu a une grande importance. « Le continent africain est une source d’inspiration. L’accueil et la chaleur humaine y sont spéciaux », confiait eL Seed à CHINAFRIQUE. « En Algérie, au septième étage d’un bâtiment que je peignais sur l’Avenue Didouche à Alger, une femme a ouvert la fenêtre et m’a demandé si j’avais déjeuné. Je lui ai répondu que j’allais manger plus tard. Elle m’a tendu une assiette de couscous chaude, qu’elle avait spécialement préparé pour moi. Et au Cap, en Afrique du Sud, la communauté du bidonville de Philippi m’a offert le seul mur en briques du quartier, celui de l’école primaire. Une dizaine d’enfants m’ont aidé à remplir de couleurs un mur célébrant les propos de Nelson Mandela : ‘Cela semble toujours impossible, jusqu’à ce qu’on le fasse’. » 

 

La générosité de ces populations, qui n’ont pourtant pas grand-chose, motive eL Seed dans sa promotion du respect entre les peuples, thème au cœur de ses œuvres. Aujourd’hui installé au Québec, l’artiste de 34 ans veut continuer à diffuser son message de paix, notamment en Chine où il aimerait avoir l’opportunité de travailler.  

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