2016-01-12 |
L'âme des humanoïdes |
par Chen Ran | VOL.8 JANVIER 2016 |
Mots-clés: enfants autistes ; humanoïdes ; Économie |
Un enfant touche NAO pour la première fois aux côtés d’Édith Liu (d.) au Centre d’intervention pour les enfants ayant des besoinsspéciaux Golden Age à Shenzhen, province du Guangdong
Il y a un an à peine, Édith Liu ne savait pas grand-chose des robots et prévoyait de faire comme ses camarades et rejoindre une société du Fortune 500 après l’obtention de son diplôme. Aujourd’hui, à 25 ans, Mlle Liu est co-fondatrice d’une entreprise en Chine qui aide les enfants atteints de troubles du spectre autistique (TSA) grâce à un robot humanoïde français. Quelle différence en un an !
Graine d’entrepreneur
Son entreprise, Open Source Maker Space, a lancé en septembre 2015 un projet robotique baptisé « Âme du robot » sur le site themakers.cn, une plateforme de financement participatif. À la date du 8 novembre, l’entreprise avait reçu 858 commentaires positifs sur ce site et recueilli 135 210 yuans (21 290 dollars), dépassant leur objectif de 120 000 yuans (18 900 dollars).
Le robot humanoïde NAO peut interagir en détectant l’humeur de son interlocuteur. Il mesure 58 cm et peut aussi se déplacer et parler. NAO est programmé pour communiquer avec les enfants atteints de TSA d’une voix familière, comme celle de leurs parents ou du pédiatre. Les enfants peuvent acquérir et pratiquer certaines compétences essentielles grâce au jeu interactif « Apprends avec moi » en compagnie du robot. Les initiateurs de NAO, Aldebaran Robotics, une société française de robotique basée à Paris, ont adopté le code source ouvert, qui permet à d’autres entrepreneurs de développer leurs propres applications pour ce robot. Selon cette société, NAO est utilisé dans les classes d’informatique et de sciences dans plus de 70 pays.
Mlle Liu, titulaire d’un MBA de l’École supérieure de commerce Audiencia de Nantes en France, a visité le siège d’Aldebaran en novembre 2014. C’est Nicolas Xie, 33 ans, diplômé dans les télécoms, un passionné de robotique qui allait devenir son partenaire commercial, qui avait organisé cette visite. Mlle Liu a tout de suite été captivée par les humanoïdes. « J’étais totalement fascinée par l’intelligence de NAO. C’était la première fois que j’ai découvert qu’un robot n’était pas qu’une machine froide et ne m’était pas étranger », explique-t-elle. « Amical et d’abord facile, il peut même devenir un bon compagnon. » Et d’ajouter : « Nous nous sommes décidés à présenter NAO aux enfants chinois atteints de TSA, parce que nous voulions offrir une nouvelle méthode, avec les technologies avancées, pour traiter l’autisme. »
Des humanoïdes au service des enfants autistes
Les TSA forment un spectre de troubles du développement humain caractérisés par des anomalies dans les interactions sociales et dans certains cas susceptibles d’affecter la capacité à penser. Les troubles spécifiques comprennent le syndrome d’Asperger et l’autisme. Selon un rapport publié par l’Organisation mondiale de la Santé en 2013, près d’un enfant sur 160 dans le monde souffre de TSA et des handicaps qu’ils causent. En Chine, quelque 1,64 million d’enfants sont diagnostiqués comme souffrant de TSA.
En décembre 2014, Mlle Liu, M. Xie et Louis Lu, un ancien ingénieur auprès de la filiale européenne de ZTE, ont créé l’Open Source Maker Space à Shenzhen, dans la province méridionale du Guangdong. Mlle Liu et son équipe ont passé six mois à consulter des experts, à effectuer des enquêtes et recherches sur le terrain et à concevoir des solutions. Ils ont mis en place une plateforme d’application adaptée à l’enseignement et à l’apprentissage basée sur NAO pour permettre une interaction individuelle ou de groupe entre les enfants atteints de TSA et le robot.
Selon Mlle Liu, leur innovation principale est d’avoir créé une plateforme dotée d’une télécommande qui permet aux pédiatres et aux parents n’ayant aucune connaissance en programmation de se servir de NAO. « Les évaluations en cours montrent que la plupart des enfants atteints de TSA ont une réponse positive à l’égard de la réhabilitation assistée par la robotique », précise-t-elle.
En mai 2015, leur entreprise a commencé à collaborer avec Golden Age, un centre d’intervention pour les enfants ayant des besoins spéciaux. Créé en 2004, ce centre est l’une des institutions non-gouvernementales à Shenzhen pour les enfants autistes. « Les enfants ici sont curieux du robot, ce qui suscite leur désir de communiquer », explique Wang Jing, une travailleuse sociale au centre.
L’initiative semble donner des résultats prometteurs. Certains enfants ont pu reconnaître Mlle Liu après sa visite au centre pour les séances d’évaluation à plusieurs reprises. « J’ai été impressionnée lorsqu’un enfant de quatre ans m’a embrassée et s’est directement assis sur mes genoux », confie-t-elle. « Un garçon de sept ans m’a dit «Robot»en me prenant dans ses bras. J’en ai été profondément émue. »
Mieux comprendre l’autisme
D’après Mlle Liu et M. Xie, leur prochaine étape consistera à déterminer les moyens d’évaluer les résultats du traitement. Est-ce que la combinaison de l’intelligence artificielle, des théories médicales et des applications pratiques répond aux attentes ? Tel est le défi. L’interaction humain-robot peut en effet s’arrêter si un enfant pousse NAO. Par conséquent, les deux entrepreneurs cherchent un robot plus grand et plus lourd pour résoudre ce problème. « Nous devons passer plus de temps à vérifier si le traitement a entraîné des améliorations », précise M. Xie.
Selon M. Lu, leur projet a aidé non seulement à traiter les personnes atteintes de TSA, mais aussi à accroître la sensibilisation sur ce handicap. « Il existe moins de 3 000 professionnels spécialisés dans la formation pour la réhabilitation des autistes sur le plan national. L’introduction des robots leur fournira certainement une aide salutaire », constate-t-il.
L’entreprise s’est engagée à utiliser tous les fonds recueillis grâce au financement participatif pour améliorer la plateforme d’application existante. À compter de ce mois, ils travailleront en collaboration avec un centre de traitement de l’autisme, en sélectionnant cinq familles pour concevoir des contenus d’enseignement adaptés aux enfants atteints de TSA. « Aujourd’hui, davantage de gens sont au courant de notre projet », explique Mlle Liu. « Plusieurs familles touchées par les TSA ont pris contact avec nous. Nous bénéficions également de la reconnaissance et de l’appui du gouvernement. Tout cela va au-delà de mes attentes. »
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