2023-03-21 |
Un art de vivre |
par Xia Yuanyuan VOL. 15 MARS 2023 · 2023-03-21 |
Mots-clés: Zambie ; temple Shaolin |
Des maîtres transmettent les arts martiaux au nouveau temple Shaolin en Zambie, renforçant les liens culturels entre la Chine et l’Afrique.
Dans le temple Shaolin en Zambie, un disciple fait sonner la cloche comme partie de sa pratique quotidienne. (COURTOISIE)
Un style architectural distinctif des bâtiments aux toits gigantesques, des statues solennelles et majestueuses de Bouddha dans la salle principale du temple, des sons puissants des pratiquants de kung-fu… Au premier regard, on pourrait croire qu’il s’agit d’un complexe de temples en Chine, plutôt que d’un lieu en Afrique.
En réalité, il s’agit du tout premier temple Shaolin érigé en Zambie, qui se trouve dans la capitale Lusaka.
Financée par des entrepreneurs chinois, la construction du temple a débuté en avril 2019 pour se terminer en septembre 2021. Avec une superficie totale de plus de 20 000 m², ce temple est l’un des plus vastes lieux de culte bouddhistes d’origine chinoise en Afrique.
Depuis janvier 2022, le temple a ouvert ses portes au public et propose des formations. Yan Lun, le directeur du temple, a révélé qu’environ 50 enfants, âgés de 6 à 16 ans et issus de milieux très vulnérables, reçoivent désormais un soutien éducatif, de la nourriture et un abri au temple.
Outre M. Yan, trois autres maîtres du temple Shaolin en Chine et un moine africain nommé Max Yollando, qui porte également le nom chinois Yan Ming, sont chargés de diriger les formations. « Le kung-fu est un excellent moyen d’aider les Africains à mieux comprendre la culture chinoise et de renforcer les liens d’amitié sino-africains », a soutenu M. Yan à CHINAFRIQUE.
Un art pour le corps et l’esprit
Le kung-fu Shaolin est un art martial qui puise ses racines dans la culture traditionnelle chinoise. Transmis de génération en génération pendant plus de 1 500 ans, il est considéré par les Chinois comme une vertu martiale autant qu’une pratique. Pour un véritable maître chinois de kung-fu, posséder un corps sain et des prouesses physiques n’est qu’une partie de l’équation ; il doit également être courageux et avoir un caractère fort.
Tout en pratiquant le kung-fu, les disciples en Zambie doivent aussi apprendre la langue et la culture chinoises, en plus d’assister à des cours de méditation quotidiens.
« Le kung-fu vous permet non seulement d’être en bonne santé et en forme, mais renforce également la discipline et le respect », a partagé M. Yan. Il a ajouté que les cours de méditation aidaient les étudiants africains à mieux comprendre le kung-fu, à acquérir la sagesse et l’illumination, ainsi qu’à apprendre la maîtrise de soi et la résolution pacifique des conflits.
« Apprendre le kung-fu m’aide à rester en forme et à mieux comprendre la riche culture chinoise. J’espère qu’un jour je pourrai voyager en Chine et visiter le temple Shaolin sur place », a confié Henry Memba, 13 ans, disciple du temple.
Certains critiques avancent que l’existence du temple est en conflit avec la déclaration de la Zambie en tant que nation chrétienne. M. Yan a expliqué que le temple n’avait pas été construit dans le but d’interférer avec les religions en Zambie, mais plutôt pour faire découvrir aux jeunes locaux leur potentiel à travers le kung-fu et la culture chinoise.
Le programme instille l’espoir parmi les personnes vulnérables en Zambie. Aujourd’hui, Henry et le disciple Jiang Fair, âgé de six ans, sont devenus des « stars du kung-fu » aux yeux de la population locale. Ils sont souvent invités à montrer leurs compétences exquises en kung-fu aux enfants des écoles locales. De plus en plus de Zambiens passionnés de kung-fu et de culture chinoise se rendent au temple pour apprendre et échanger des idées.
Certains des disciples viennent de la communauté défavorisée de Ngwerere, située à proximité du temple, où l’accès à l’éducation et aux équipements de loisirs pour les jeunes est limité. Les résidents de la communauté ont souligné que le temple est une source d’espoir pour de nombreux jeunes à Ngwerere et au-delà.
Des disciples du temple Shaolin en Zambie ont eu l’opportunité de partager leur passion pour le kung-fu en montrant leurs compétences exquises à la communauté locale. (XINHUA)
Un pont culturel
Le kung-fu Shaolin est largement connu en Afrique. Cet art martial chinois évoque des images de stars de cinéma emblématiques comme Bruce Lee, Jet Li et Jackie Chan, dont les superbes compétences de combat ont été appréciées sur tout le continent.
Le 4 avril 1998, les ambassadeurs de 28 pays africains en Chine ont visité le temple Shaolin dans la province du Henan et ont exprimé l’espoir de voir cette culture se propager en Afrique et bénéficier aux populations locales.
En 2012, le ministère chinois de la Culture a lancé un programme de formation de kung-fu Shaolin pour les disciples africains, afin de renforcer les échanges culturels entre la Chine et l’Afrique. Chaque année, une vingtaine d’amateurs d’arts martiaux sont invités à participer à ce programme de formation de trois mois. Les contenus d’apprentissage incluent le kung-fu Shaolin, la calligraphie chinoise, la médecine zen, et bien plus encore.
Chaque étudiant africain participant devient un ambassadeur des échanges culturels entre la Chine et l’Afrique à son retour chez lui. Certains étudiants travaillent en tant qu’instructeurs de kung-fu, tandis que d’autres ont ouvert des cliniques ou des « pavillons diététiques » basés sur les techniques de médecine zen qu’ils ont apprises dans le temple.
M. Yollando, le seul moine africain du temple Shaolin en Zambie, est l’un des bénéficiaires de ce programme. Originaire de Côte d’Ivoire, il s’est intéressé à la culture chinoise pendant ses études universitaires et a décidé de se rendre en Chine en 2015 pour approfondir sa connaissance de cette culture. Il a étudié au temple Shaolin pendant six ans avant de devenir maître en Zambie. « Je suis passionné de kung-fu depuis mon enfance. Chaque fois que je regardais des films de kung-fu, je rêvais de devenir comme les acteurs », a-t-il expliqué à CHINAFRIQUE.
Au cours de ses études au temple Shaolin en Chine, toutes les dépenses de M. Yollando étaient prises en charge par le temple. « Je suis très reconnaissant d’avoir eu l’opportunité d’apprendre le kung-fu en Chine. L’abbé du temple, Shi Yongxin, espérait que je pourrais devenir un pont entre la culture chinoise et africaine. C’est pourquoi, après la création du temple en Zambie, j’ai décidé de venir ici pour diffuser la culture Shaolin et la culture chinoise », a-t-il fait part.
Selon M. Yollando, l’apprentissage de la culture chinoise a élargi ses horizons et son séjour au temple Shaolin lui a appris l’importance de l’autodiscipline et du respect de l’humanité.
Il estime qu’il est important pour les Africains d’apprendre les cultures des autres pays afin de s’intégrer dans le système mondial. « Nous sommes ici pour partager avec le peuple zambien notre connaissance de la culture chinoise et espérons que cela contribuera à renforcer les relations sino-africaines. »
M. Yollando a expliqué que le mot « kung-fu » signifie littéralement « travailler dur » en chinois, et que, selon lui, les Africains devraient apprendre des Chinois leur diligence, leur esprit de travail acharné et leur résilience dans la poursuite d’une vie meilleure.
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