Des pommiers de Nuanshui. (COURTOISIE)

L’activité de vente de pommes est en pleine effervescence dans le village de Desheng Youliang, situé dans le canton de Nuanshui de la bannière de Jungar, à Ordos, en Mongolie intérieure. Jouxtant un entrepôt frigorifique d’une capacité de 2 000 m³, construit par la communauté villageoise, les employés se consacrent activement au ramassage, à l’emballage et au chargement des pommes pour répondre à la demande croissante.

Le développement d’une agriculture conventionnelle était auparavant un défi majeur dans la région de Nuanshui, en raison d’une couverture gréseuse occupant plus de la moitié de son territoire. Toutefois, l’introduction des premiers vergers de pommiers dans les années 1990 a marqué un tournant décisif, initiant une ère de prospérité pour le secteur fruitier local.

Des pommes adaptées

Le grès, une roche sédimentaire formée principalement de grains de sable, se métamorphose en boue au contact de l’eau et en sable sous l’effet du vent. Cette caractéristique a longtemps entraîné l’érosion intense de Nuanshui, exacerbée par les inondations qui arrachaient sédiments et sable pour les emporter dans le fleuve Jaune. Face à cette érosion dévastatrice, les autorités ont entrepris en 2009 des initiatives de réinstallation, transférant les habitants vers la communauté de Juxin, où ils ont fait face à des défis économiques majeurs faute d’activités viables dans l’agriculture ou l’élevage.

Cependant, en 2015, inspiré par les succès précédents de la culture de pommiers sur grès, Hua Shengming, alors secrétaire du Comité de la cellule du Parti pour le village de Desheng Youliang, a relancé cette pratique agricole. « Le grès est extrêmement dur, nous ne pouvons pas creuser avec des pelles mais progressivement avec des pioches dans les crevasses », indique-t-il. La préparation du sol pour la plantation exigeait une attention quotidienne rigoureuse, incluant la sélection des semences, la plantation, l’irrigation, le désherbage et l’application de fertilisants. Malgré les défis, le sol s’est révélé être étonnamment fertile, retenant bien l’eau et permettant une aération adéquate, tout en étant riche en minéraux essentiels. La région bénéficie également d’une exposition solaire abondante et d’importantes variations de température entre le jour et la nuit, conditions idéales pour la culture de pommes de montagne.

La communauté s’est alors engagée dans la plantation extensive de pommiers, avec un taux de survie des arbres s’améliorant progressivement. Les autorités locales ont apporté un soutien technique et aménagé des infrastructures telles que des routes, des systèmes d’approvisionnement en eau et en électricité, facilitant ainsi un développement de l’industrie. Les vergers s’étendent désormais sur 2 300 mu (153 hectares).

« Nos pommes se distinguent par leur haute teneur en eau et en sucre, ainsi qu’une saveur fruitée intense », affirme M. Hua. Cette qualité unique assure une vente rapide sur le marché. De plus, les vergers contribuent à stabiliser le sable, à prévenir l’érosion du sol et à purifier l’air, transformant radicalement l’écosystème fragile de Nuanshui. Selon Wang Long, chef du canton, le secteur de la pomme incarne désormais la clé de la restauration écologique et de la protection environnementale de la région.

Hua Shengming dans un verger. (YU XIANGJUN)

Des pommes en or

Les vergers de pommiers se sont avérés être une source de prospérité pour la communauté de Nuanshui, avec M. Hua comme figure de proue de cette réussite. Ayant démarré avec un modeste verger de 40 mu (2,6 hectares) en 2015, il gère désormais une exploitation étendue à 100 mu (6,6 hectares), lui rapportant un profit net de 900 000 yuans (125 458 dollars) par an.

Cette transformation a également bénéficié à l’ensemble de la communauté villageoise, qui a vu une nette amélioration de ses revenus grâce à la culture des pommiers. En 2019, encouragées par le soutien des autorités locales, 82 familles se sont regroupées pour former une coopérative et ont lancé un verger collectif de 150 mu (10 hectares). Les membres ayant concédé leurs droits de terres à la coopérative reçoivent 25 % des profits nets, tandis que le reste finance des projets d’intérêt public et le développement économique du village.

La culture de la pomme est devenue le pilier de l’économie de Nuanshui, produisant plus de vingt variétés différentes et une récolte annuelle pouvant atteindre 5 000 tonnes. Les bénéfices générés par cette activité dépassent les 80 millions de yuans (11,1 millions de dollars), dont 3 millions (418 194 dollars) sont attribués au collectif villageois.

Avec l’obtention du label bio pour tous les vergers du village, Nuanshui a ouvert les portes à un marché vaste et prometteur. La région a également introduit la marque « Monts de Nuanshui », la première marque publique régionale de pomme dans l’ouest de la Mongolie intérieure, consolidant ainsi sa réputation et sa position dans le secteur agricole.

De l’écologie à l’exploitation

Le secteur de la pomme à Nuanshui évolue vers plus de spécialisation et une commercialisation avancée. Les producteurs ont adopté de nouvelles techniques et variétés pour standardiser la production. Des ingénieurs agronomes forment les villageois en pratiques de plantation et en gestion des parasites, améliorant leurs compétences techniques. Zhao Yongjun, secrétaire du Comité de la cellule du Parti du village, note une progression significative des compétences locales, passant de méthodes traditionnelles à des connaissances techniques et de gestion avancées grâce à la formation spécialisée.

Dans l’objectif de générer une valeur ajoutée plus importante, Nuanshui a développé sa chaîne de production. La région a mis en place une ligne de production entièrement automatisée pour les produits dérivés tels que le vinaigre de pomme et les jus fruités, avec une capacité annuelle de traitement de 750 tonnes de pommes. Un entrepôt frigorifique d’une capacité de 400 tonnes a été établi pour prolonger la durée de conservation des fruits. Les avenues de commercialisation ont été diversifiées grâce à l’e-commerce, élargissant ainsi le marché accessible aux produits locaux.

La collaboration avec l’Université d’agriculture de Chine marque un tournant vers la digitalisation de l’agriculture, visant à créer une exploitation agricole intelligente. « À l’avenir, grâce à l’affichage en temps réel des données, les exploitants pourront ajuster précisément l’irrigation et la fertilisation, améliorant ainsi nettement la qualité et l’efficacité de la production », anticipe M. Zhao avec enthousiasme.

Par ailleurs, Nuanshui a investi dans la diversification agricole, plantant 200 000 mu (13 333 hectares) d’argousiers et 28 000 mu (1 866 hectares) d’abricotiers, transformant la région en une véritable « banque verte ».