Gao habite désormais dans un de ces appartements rénovés

Habitant dans un village montagneux du nord-ouest de la Chine, Gao Shiquan était habitué à la pauvreté. Le paysan de 50 ans habite dans le bourg de Niangniangba, de la province du Gansu. Il menait une vie difficile avec un revenu annuel de moins de 3 000 yuans (448 dollars), mais sa situation empire lorsqu'un glissement de terrain enterre sa maison en adobe en 2013. Gao essaye de dégager ses quelques affaires des décombres, sans succès. La catastrophe détruit également les maisons des autres villageois. Tous plongent dans une pauvreté encore plus extrême. C'est alors qu'apparaît une lueur d'espoir.

Cette année, les autorités du Gansu ont lancé un projet pour loger les villageois sans-abri. Gao et d'autres villageois ont été déplacés dans des appartements modernes flambant neuf construits par le gouvernement dans un village proche. « Je n'aurais jamais imaginé vivre dans un si bel appartement », confie Gao plein d'émotion dans son spacieux salon. Si Gao mène désormais une vie heureuse, il reste encore des défis à relever dans le Gansu pour résoudre le problème de la pauvreté. En 2013, un tiers de la population de la province, soit 6,9 millions de personnes, souffrait de la pauvreté.

Selon le classement du gouvernement chinois, les personnes ayant un revenu annuel de moins de 2 300 yuans (344 dollars) vivent en dessous du seuil de pauvreté, alors que selon le standard mondial le chiffre est de 1,25 dollar par jour. Il reste donc encore beaucoup à faire pour résoudre le problème de pauvreté dans le Gansu. Toutefois, on commence à voir les résultats d'une série de politiques lancées depuis 2013, 4 millions de personnes ont déjà été sorties de la pauvreté.

Mesures ciblées

En Chine, le relogement est une mesure efficace pour résoudre la pauvreté depuis les années 1980, surtout pour les personnes qui vivent dans les régions défavorisées au nord-ouest du pays. Par exemple, dans les régions montagneuses centrales du Gansu, qui ont été considérés inadaptées à l'habituation humaine par l'ONU, car en proie à de sévères sécheresses. Par ailleurs, la fréquence des catastrophes naturelles aggrave le sort des habitants dans ce lieu désolé. Depuis 2012, plus de 630 000 personnes ont été relogées dans des lieux plus sûrs, avec de meilleures infrastructures. 50 000 personnes de plus seront relogées d'ici 2020. 2 millions de personnes seront relogées en Chine cette année, quittant leur logement de fortune pour de modernes appartements. « Le logement est un indicateur critique des efforts de lutte contre la pauvreté », déclarait Bao Xiaowei, chef de l'Assemblée populaire nationale (APN) du bourg de Niangniangba, en charge des initiatives de lutte contre la pauvreté dans le village de Gao.

Depuis que le gouvernement chinois a mis en place la stratégie de « Lutte ciblée contre la pauvreté », en 2014, plus de 80 000 députés à l'APN, et 400 000 membres et fonctionnaires du Parti communiste chinois (PCC), ont été affectés à des tâches spécifiques dans le Gansu. Yang Zixing, vice-gouverneur de la province, explique que la première tâche a été de faire une enquête sur les familles pauvres. Les enquêteurs ont profilé chaque ménage, pour détailler leur situation financière et les causes de leur pauvreté. Le gouvernement a ensuite cherché des solutions aux problèmes constatés pour mieux s'adapter aux besoins de chaque famille. Par exemple, les familles avec des étudiants se sont vues accorder des prêts universitaires, tandis que celles avec des membres malades ont reçu des subventions médicales. « Sans ces mesures ciblées, il est difficile de garantir que les individus bénéficient des politiques de lutte contre la pauvreté du gouvernement », affirme Yang.

Deux types d'appartements sont disponibles dans le nouveau quartier de Gao. Ceux avec trois chambres coûtent 115 000 yuans (17 000 dollars). Gao a payé 65 000 yuans (9 713 dollars), soit toutes ses économies. Pour le reste, il a fait appel à un prêt sans intérêts du gouvernement. Les familles avec moins d'argent peuvent choisir les appartements à une chambre. Ceux-ci coûtent seulement 10 000 yuans (1 500 dollars), le reste est payé par l'État. Pour les personnes âgées ou handicapées, ces logements sont gratuits. En plus du prêt au logement, les villageois peuvent recevoir 50 000 yuans (7 500 dollars), sans intérêts, pour explorer des moyens de subsistance. « C'est super que les gens puissent être logés dans des nouveaux appartements. Mais après cela, ils ont encore besoin de trouver un moyen de se nourrir », rappelle Bao. La communauté aura bientôt un centre commercial, grâce à l'investissement d'une entreprise locale. Ce projet fournira des emplois aux villageois.

Une précieuse leçon

Xu Dehua n'est jamais allée à l'école. Elle vient d'une famille pauvre du sud-ouest du Gansu. Etant l'enfant la plus âgée de sa famille, Xu pensait que son destin serait de s'occuper de la ferme puis d'épouser un paysan. Mais les choses ont commencé à changer il y a quatre ans quand elle sent son village devenir une destination touristique. Xu reçoit alors un prêt de plus de 200 000 yuans (30 000 dollars) et devient propriétaire d'une auberge de jeunesse. « Je ne savais rien faire au début, mais j'ai appris à gérer l'auberge », raconte fièrement l'aubergiste de 42 ans. « Ceux qui n'ont pas voulu changer [de secteur] au début le regrettent beaucoup maintenant. » Ces derniers mois, les profits de l'auberge ont dépassé 200 000 yuans (30 000 dollars). Grâce à ce revenu, Xu a pu envoyer ses deux filles à l'université pour étudier respectivement l'anglais et la musique.

Situé dans une région montagneuse au sud du Gansu, le district de Kangxian est victime de ses terres cultivables très limitées. Plus des 80 % des ménages habitent sur la montagne ou dans les vallées. En 2012, les autorités locales décident de construire une route touristique. Le district se trouvant à la jonction de trois provinces, le paysage y est époustouflant. « Nous allons transformer ces montagnes vertes en mines d'or », a annoncé Li Tingjun, secrétaire du Comité du PCC pour le district de Kangxian. Selon Li, 75 % des 350 villages de ce district ont adopté le même type de développement, privilégiant l'industrie touristique et culturelle. Plus de 10 000 familles ont déjà bénéficié de ce développement. De leur côté, les villageois du district de Chengxian utilisent le e-commerce pour s'enrichir. Depuis 2013, plus de 900 boutiques en ligne ont été lancées pour vendre les produits agricoles locaux. Le secteur a créé 4 000 emplois dans le district. L'amélioration de la situation dans certaines zones est frappante. Dans le village de Caotan, par exemple, le taux de pauvreté est passé de 73 % en 2011 à 4 % en 2015.

Continuer la lutte

À la fin de l'année dernière, la population pauvre du Gansu a été réduite à 2,89 millions – presque 20 % de moins par rapport à 2013. « Honnêtement, les progrès réalisés sont fragiles et instables », affirme Yang. « L'éducation des enfants ou une grave maladie peuvent facilement faire retomber ces gens dans la pauvreté. » Pour évaluer ces risques, une plate-forme de données a été mise en place pour suivre les progrès de la lutte contre la pauvreté et la situation de chaque ménage. Afin d'encourager ces efforts, tout en évaluant les performances des fonctionnaires, le gouvernement provincial prend en compte l'amélioration du niveau de vie des groupes les plus pauvres, au lieu des indicateurs économiques.

Selon Liu Xiaoshan du Groupe pilote de lutte contre la pauvreté du Conseil des Affaires d'État, 700 millions de personnes ont été sorties de la pauvreté depuis que la Chine a adopté sa politique de la réforme et l'ouverture. Liu admet toutefois les difficultés pour poursuivre ce progrès. « Plus nous progressons, plus nous rencontrons des défis », conclut-il.

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