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Culture et Société
  2016-05-13
 

Un échange dramatique

Ji Jing
Mots-clés: Tang Xianzu; William Shakespeare; culture

La Chine et le Royaume-Uni commémorent la vie et les œuvres des dramaturges Tang Xianzu et William Shakespeare.  

 

 

Le 22 avril, au cours de la Semaine de la Culture de Fuzhou, des acteurs interprètent un épisode du Pavillon aux pivoines de Tang à Stratford-upon-Avon, où est né Shakespeare. Fuzhou, province du Jiangxi à l'est de la Chine, est la ville natale de Tang Xianzhu

 

Il y a 400 ans, à des milliers de kilomètres de distance, deux dramaturges de renom, Tang Xianzu (1550-1616) et William Shakespeare (1564-1616), respectivement de Chine et du Royaume-Uni, sont morts la même année. Cette année marquant le 400e anniversaire de leur mort, une série d'événements ont été organisés dans les pays qui ont vu naître leur héritage, pour célébrer leurs œuvres. 

 

 

Gu Zhengkun (deuxième à gauche), professeur de culture comparée et de traduction à l'Université de Beijing, assiste à un salon sur la nouvelle traduction des œuvres complètes de Shakespeare à Beijing en novembre 2015

 

Des liens interculturels 

Dolphin Books, filiale de China International Publishing Group (CIPG), a profité de l'occasion pour promouvoir les échanges culturels sino-britanniques. La société a publié une version anglaise du chef-d'œuvre de Tang, Le Pavillon aux pivoines, ainsi qu'une traduction chinoise des six tragédies de Shakespeare : Le Roi Lear, Roméo et Juliette, Hamlet, Othello, Macbeth ainsi qu'Antoine et Cléopâtre. Les ouvrages ont été présentés à la Foire du livre de Londres le 12 avril et principalement exposés au stand de CIPG, un conglomérat de médias chinois ciblant les lecteurs internationaux. 

Xu Yuanchong, professeur retraité de l'Université de Beijing capable de traduire du chinois vers l'anglais et le français, et vice versa, est le traducteur de ces classiques. M. Xu, 95 ans, a gagné le Prix Aurora Borealis en 2014, un prix d'excellence décerné par la Fédération internationale des traducteurs. Le Pavillon aux pivoines de Tang raconte l'histoire d'amour entre Du Liniang et Liu Mengmei, que M. Xu traduit par « Du the Belle » and « Liu the Dreamer of Mume Flower ». L'ouvrage présente l'idéalisme romantique que véhicule la recherche du bonheur individuel. « Shakespeare était plus réaliste que Tang, et Tang était plus romantique que Shakespeare. Shakespeare aimait la tragédie. Dans l'œuvre de Tang, l'héroïne est morte mais elle revient à la vie parce qu'elle aime le héros », indique M. Xu. « Cela n'arrivera pas dans les tragédies de Shakespeare, ce qui montre la différence entre les drames chinois et occidentaux ». 

Par ailleurs, la Foreign Language Teaching and Research Press de Beijing (FLTRP) a publié une traduction en chinois des œuvres complètes de Shakespeare pour lui rendre hommage. « La collection se compose de 38 pièces intégrant comédie, tragédie, drames de l'histoire, sonnets et autres poèmes », a déclaré Yao Hong, rédacteur en chef de FLTRP et responsable du projet Shakespeare. Il est à noter que la version originale en anglais est inclue dans la traduction chinoise de chaque volume.  

La première diffusion des œuvres de Shakespeare en Chine a eu lieu à la fin du 19e siècle grâce aux efforts de missionnaires britanniques. Shakespeare est actuellement l'un des auteurs étrangers les plus populaires en Chine, dont les traducteurs chinois reconnus sont Liang Shiqiu (1903-1987), Zhu Shenghao (1912-1944) et Fang Ping (1921-2008). Cependant, par rapport aux précédents traducteurs comme M. Fang et M. Liang, qui ont assumé seuls la traduction des œuvres complètes du poète, la dernière version est le résultat des efforts conjoints des 23 traducteurs et experts spécialisés dans les études shakespeariennes. La traduction d'Othello de M. Xu a été inclue dans la collection nouvellement publiée. « Nous avons passé beaucoup de temps à chercher des traducteurs appropriés. Ces derniers doivent, dans un premier temps, avoir fait des recherches sur les pièces de Shakespeare. Il leur faut ensuite se familiariser avec son style poétique », a précisé M. Yao. 

Gu Zhengkun, professeur de culture comparée et de traduction à l'Université de Beijing, a été désigné comme rédacteur en chef du projet. Des universitaires renommés tels que Cao Minglun de l'Université du Sichuan, Luo Xuanmin de l'Université  Tsinghua et Zhang Chong de l'Université Fudan ont été choisis en tant que traducteurs. M. Gu a traduit Hamlet, Macbeth, Roméo et Juliette et Le Marchand de Venise, ainsi que quelques sonnets. Reproduire le style poétique des pièces de Shakespeare dans une traduction n'a pas été simple. « Tout comme le Erhu, un instrument musical chinois, ne peut pas imiter le son d'un piano, il est impossible de reproduire la beauté de la langue anglaise à travers une traduction chinoise. Je veux réussir à peindre la beauté unique de la langue chinoise dans mes traductions », a indiqué M. Gu à Beijing Information. 

 La traduction s'est inspirée du travail de la Royal Shakespeare Company (RSC) avec L'œuvre complète (Complete Works), publiée par Macmillan Publishers en 2008. C'est la première et unique maison d'édition à être développée par et pour la RSC, principale compagnie de théâtre de Shakespeare dans le monde. « La traduction s'est inspirée du First Folio et est considérée comme la plus proche de l'original », a déclaré M. Yao. Le First Folio fait référence à une collection de 36 œuvres de Shakespeare publiée en 1623, qui constitue la principale source de textes contemporains de ses pièces. Etant donné que la traduction a été faite par un groupe de personnes, leurs interprétations et leurs styles peuvent être différents les uns des autres. Néanmoins, selon M. Gu, la version finale s'accorde avec les différents thèmes et styles des œuvres de Shakespeare.  

 

Les tragédies de Shakespeare publiées par la Foreign Language Teaching and Research Press de Beijing  

 

Une popularité durable 

La RSC a également joué un rôle dans l'ouverture des échanges culturels à travers sa tournée en Chine, qui s'est déroulée de mars à avril 2016. Gregory Doran, directeur artistique de la RSC, a déclaré dans un communiqué de presse : « Je pense sincèrement qu'en se racontant nos histoires, nous favorisons une meilleure compréhension de la culture de l'autre. Le riche patrimoine dramatique de la Chine est comme un miroir qui reflète l'échelle épique, la complexité et l'universalité de l'œuvre de Shakespeare, et dispose d'un programme national qui exige des jeunes l'étude de ses pièces ». 

M. Yao, s'exprimant au sujet de l'influence du dramaturge en Chine, précise « L'introduction en Chine de films comme Hamlet ou Roméo et Juliette il y a deux à trois décennies ont partiellement contribué à sa popularité. Même si l'on n'a pas lu ses œuvres, on a au moins entendu parler de son nom. Si les intellectuels n'en lisent aucune, ils doivent sentir qu'il leur manque quelque chose ».  

M. Gu a commencé à lire les œuvres de Shakespeare lorsqu'il était adolescent. La première pièce qu'il a lue était Le Songe d'une nuit d'été. A cette époque, les pièces de Shakespeare étaient trop romantiques pour lui, et il s'intéressait plus aux écrivains réalistes, comme le Russe Léon Tolstoï (1828-1910). Il aura fallu attendre qu'il lise Othello et quelques sonnets pour qu'il soit fasciné par Shakespeare. Il choisit même Hamlet comme sujet pour sa thèse de doctorat à l'Université de Beijing. « Les œuvres de Shakespeare racontent les histoires des rois comme des gens ordinaires, de la cour comme de la société populaire, des affaires internationales comme des affaires intérieures, de l'au-delà comme du monde laïc. Il n'y a pas d'autres écrivains capables de maîtriser une telle variété de sujets », a indiqué M. Gu. 

Ayant déjà traduit six tragédies de Shakespeare, M. Xu rêve de traduire tout le reste des ouvrages du dramaturge. Il apprécie particulièrement les compétences linguistiques de Shakespeare et respecte la complexité de son langage. M. Xu évoque, par exemple, la création de nouveaux mots tels que « dépeupler », afin de rendre sa description plus précise. Dans Antoine et Cléopâtre, Cléopâtre dit qu'elle va « dépeupler l'Egypte » en faisant de tous les citoyens ses messagers pour envoyer des lettres d'amour à Antony. 

« Le charme de Shakespeare est international. Les thèmes abordés dans ses ouvrages, comme la perte d'un être cher, l'amour et la jalousie, sont réellement universels », précise Nick Marchand, directeur d'arts et d'industrie créative du Conseil britannique (British Council) en Chine.  

 

Le Pavillon aux pivoines publié par Dolphin Books

 

Entre deux maîtres 

Les chercheurs ont établi un parallèle entre Shakespeare et son homologue chinois Tang Xianzu, dramaturge sous la dynastie des Ming (1368-1644), bien que le premier soit plus prolifique que le deuxième : l'auteur britannique a écrit 39 pièces de théâtre alors que le maître chinois n'en a créé que quatre.  

Selon M. Gu, Le Pavillon aux pivoines possède de belles paroles qui peuvent être chantées, tandis que les pièces de Shakespeare ne le permettent pas. « La pièce de Tang alterne entre lignes poétiques et langage familier, permettant aux lecteurs de faire une pause, alors que la plupart des œuvres de Shakespeare sont écrites sous forme de pentamètre iambique, ce qui est parfois ennuyant ». Il affirme néanmoins que Shakespeare excelle dans d'autres domaines. « L'intrigue de ses pièces est complexe, attrayante et parfois inattendue. Les histoires s'entrelacent, on parle de fantômes, de folie et d'assassinats », précise M. Gu à Beijing Information.  

Selon M. Marchand, le Conseil britannique (British Council), une organisation spécialisée dans les relations internationales en matière de culture et d'éducation, a organisé un programme intitulé « La vie de Shakespeare » à travers des événements tels que « The Dreamer », une collaboration entre le Centre d'arts dramatiques de Shanghai et la compagnie théâtrale britannique Gecko, qui relie Le Pavillon aux pivoines de Tang et Le Songe d'une nuit d'été de Shakespeare. 

En plus d'être traduites en chinois, les œuvres de Shakespeare sont également devenues un sujet essentiel dans le domaine de la recherche universitaire en Chine. « Cependant, par rapport aux pays occidentaux, la Chine a encore un fossé à combler en matière de recherches sur Shakespeare. C'est comme pour les étrangers qui étudient les ouvrages classiques des poètes chinois Li Bai (701-762) et Du Fu (712-770). Il y a forcément des obstacles », précise M.  Gu. Il suggère aux chercheurs shakespeariens en Chine d'aborder leur travail avec un point de vue chinois, afin d'en découvrir de nouvelles perspectives.

 

Beijing Information 

  

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