2016-03-10 |
Trois nouvelles institutions financières |
par Pang Xun | VOL.8 MARS 2016 CHINAFRIQUE |
Mots-clés: principales données économiques; Chine |
Les trois nouvelles institutions financières vont investir dans les pays en développement le long de la Ceinture et la Route et de la Route maritime de la Soie du XXIe siècle
Les principales données économiques de la Chine, publiées en janvier, permettent de constater que la croissance de l’économie chinoise a été de 6,9 % en 2015, la croissance annuelle la plus faible depuis un quart de siècle. Plombée par une faible reprise et une hausse des incertitudes, la croissance économique mondiale a ainsi ralenti en 2015, et elle continue de s’enliser dans une situation économique incertaine. C’est dans ce contexte que la Banque asiatique d’investissement pour les infrastructures (BAII), une banque multilatérale dont l’initiateur est la Chine, a été inaugurée au mois de janvier à Beijing. Marquant une étape importante dans la réforme du système de gouvernance économique mondiale, le lancement de cette banque encourage la reprise de l’économie mondiale.
La Chine fait des efforts pour mettre en place un meilleur mécanisme de gouvernance économique mondiale. La BAII, la Nouvelle banque de développement (NBD) et le Fonds de la Route de la Soie (FRS) ont été établis à l’initiative de la Chine. Les trois organismes sont des plates-formes ouvertes internationales visant à promouvoir les investissements dans les infrastructures, et sont extrêmement complémentaires. Ils ne constituent pas une menace pour les règles internationales existantes, mais changent, améliorent et réforment les mécanismes existants. Ces nouvelles institutions financières, qui sont mises en place avec la politique de développement économique à l’international de la Chine, fourniront également aux entreprises chinoises de plus en plus de possibilités d’investissement à l’étranger et leur assureront un soutien financier par divers canaux.
Les infrastructures transfrontalières
La BAII, la NBD et le FRS ont un objectif commun : l’investissement dans les infrastructures transfrontalières. Les trois nouvelles agences vont investir dans les pays en voie de développement le long de la Ceinture et la Route, et dans d’autres pays qui font face à l’insuffisance d’infrastructures, dans des domaines tels que le transport, les communications et l’énergie électrique, de manière à promouvoir l’intégration économique régionale. Selon la BAII, la demande d’infrastructures dans les pays asiatiques devrait être forte dans les dix prochaines années, avec des investissements annuels estimés à environ 730 milliards de dollars.
Le déficit d’investissement dans les infrastructures mondiales a atteint des sommets. Le financement national et le secteur privé sont incapables de combler le déficit de financement dans les infrastructures. Les secteurs privés internationaux ne prennent eux pas en compte les investissements dans les infrastructures transfrontalières, en raison de la longue durée des travaux, la faible capacité de gestion des risques et la complexité du calcul des risques. C’est pour quoi, les investissements dans les infrastructures transfrontalières reposent essentiellement sur des investissements d’aide bilatéraux ou multilatéraux. Par ailleurs, les infrastructures transfrontalières sont confrontées à des problèmes complexes concernant l’environnement de la construction et les normes écologiques. Ces problèmes expliquent la prudence et le conservatisme des autorités vis-à-vis des investissements dans les infrastructures.
Alors que la définition du développement des Nations unies s’est récemment tournée vers un développement social plutôt qu’économique, l’investissement public d’aide bilatérale et multilatérale dans les infrastructures diminue. L’essor économique des pays en voie de développement se trouve donc face à d’importants obstacles. La Chine a confiance dans la promotion du développement des infrastructures en Asie. Une des expériences essentielles du pays est celle d’avoir placé ses investissements à grande échelle dans les infrastructures et l’immobilier. L’aide dans la construction d’infrastructures est une caractéristique distinctive de l’aide chinoise à l’étranger à long terme. L’objectif commun, l’investissement dans les infrastructures transfrontalières, est au cœur des activités des banques et des fonds multilatéraux qui ont été mis en place, ou sont en préparation, par la Chine.
Positionnement et structure
Moins nouvelles, la Banque chinoise d’import-export, la Banque de développement de Chine et leurs fonds mettent en œuvre les politiques chinoises d’aide économique et commerciale et le développement du pays à l’étranger. Ces institutions financières interviennent dans les affaires mondiales, et pourtant, l’investissement transfrontalier dans la construction d’infrastructures ne représente qu’une petite part des tous leurs prêts. La BAII, la NBD et le FRS seront les institutions financières internationales multilatérales. Elles sont semblables aux institutions financières internationales existantes en termes de mécanismes et fonctionnement. Des prêts seront également accordés dans d’autres pays en voie de développement que la Chine, mettant l’accent sur les investissements dans les infrastructures.
La NBD, une banque de développement mondial, est l’une des agences internationales d’aide au développement du groupe BRICS (Brésil, Russie, Inde, Chine et Afrique du Sud). Cette banque vise à contribuer au développement mondial en investissant dans les infrastructures. La BAII, un organisme d’aide au développement multilatéral régional, est membre du réseau des banques de développement régional, duquel font partie la Banque asiatique de développement, la Banque africaine de développement, la Banque interaméricaine de développement, etc. Sa structure et fonctionnement seront similaires à celui des banques de développement régional existantes. Les banques de développement multilatérales visent à fournir une assistance financière aux pays en voie de développement, normalement sous la forme de prêts et de subventions. Les prêts sont utilisés dans des projets d’infrastructures ainsi que des programmes sociaux relevant de l’hygiène, la santé ou l’éducation. De leur côté, les prêts politiques visent à promouvoir les réformes politiques dans les pays emprunteurs. Les banques existantes privilégient de plus en plus les prêts politiques, qui ont balayé les pratiques de prêts du Fonds monétaire international.
Le FRS, un fonds gouvernemental ouvert de coopération multilatérale, utilise les réserves de change de la Chine comme financement de départ. Actuellement, il n’a pas d’affiliation à la BAII ou à la NBD. Le FRS devrait être un fonds souverain, bien qu’il soit rare pour les fonds souverains de faire des investissements dans les infrastructures axés sur les politiques. Les objectifs du FRS sont de réaliser l’initiative « une Ceinture et une Route » et de promouvoir la connectivité, en mettant l’accent sur la construction d’infrastructures transfrontalières. Par ses caractéristiques, le FRS a pu être perçu comme un fonds industriel. Cependant, par rapport aux banques de développement, le FRS devrait être davantage commercialisé et géré comme une entreprise. Pour l’instant, le fonds se concentre sur les investissements dans les infrastructures, mais il est encore très vague sur la façon dont il va équilibrer les avantages politiques, les prestations sociales et les rendements économiques.
Perspectives d’investissement
Grâce au relâchement de la politique de financement, la BAII et le FRS offriront des conditions préférentielles et des politiques d’incitation à l’investissement dans la construction d’infrastructures à l’étranger. Dès que les infrastructures le long de la Ceinture et la Route auront été progressivement améliorées et mises en service, les investissements se déplaceront vers le transport transfrontalier et la logistique, le développement énergétique et les principaux domaines de production et de transformation des produits agricoles.
Dans l’ensemble, il est audacieux de créer un certain nombre d’institutions financières multilatérales pour stimuler les investissements dans les infrastructures en Asie, ainsi que dans les pays concernés. Les grands risques générés par les investissements dans des infrastructures transnationales nécessitent des mécanismes pour réduire les incertitudes d’investissement et fournir une protection de l’investissement, de manière à permettre aux investisseurs du secteur privé et des fonds souverains d’entrer dans le domaine. Ces institutions financières doivent réduire le risque d’investissement, assurer un investissement de canaux diversifiés dans le secteur des infrastructures, et encourager la connectivité à travers les efforts de la Chine et la coopération régionale.
(L’auteur est professeur au département des relations internationales à l’Université de Tsinghua, directeur adjoint du Centre Carnegie-Tsinghua)
![]() |
|
||
24 Baiwanzhuang, 100037 Beijing République populaire de Chine | ||
Copyright CHINAFRIQUE tous droits réservés 京ICP备08005356号 |