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Économie
  2016-08-18
 

Une opportunité en or

par Rachel Richez | VOL. 8 août 2016
Mots-clés: Afrique; aide

Helen Hai face au siège des Nations unies, à New York

 

La petite Helen était tout excitée. Pourcélébrer son septième anniversaire, elle visitait la capitale chinoise avec son père. C’était une grande occasion, d’autant plus que la famille de Changchun, au nord-est de la Chine, allait séjourner dans un des hôtels les plus prestigieux de Beijing. Chaque détail de cet hôtel cinq étoiles impressionnait la petite fille qui n’avait jamais connu un tel luxe. Mais quand la réceptionniste annonce à son père le prix de la chambre, cette journée idéale prend une sombre tournure. « C’est trop cher », s’écrie alors outré celui qui voulait tant faire plaisir à sa fille, avant de la diriger vers la sortie. 100 dollars la nuitée, c’était en effet bien trop cher pour la majorité des Chinois dans les années 1970. En quittant le palace, la petite Helen se demande pourquoi elle n’a pas accès à ce monde de luxe et d’élégance. Puis son innocent regard se tourne vers les étrangers calmement installés dans le hall d’entrée. Pourquoi sont-ils les seuls à pouvoir accéder à ce monde ?, s’interroge l’enfant.

En quête de sens

30 ans plus tard, la Chine est devenue la deuxième économie mondiale et la petite fille de Changchun est devenue Helen Hai, une femme d’affaires accomplie. Il y a deux ans, elle crée l’Initiative « Made in Africa », qui aide les industries voulant transférer leurs activités en Afrique. L’organisation promeut une « collaboration triangulaire », faisant converger les prix compétitifs et les avantages géographiques du continent africain, le savoir-faire industriel asiatique et le marché global. Mais c’est avant tout une quête de sens qui pousse la jeune femme à créer cette initiative : « Avant mes 30 ans, ma vie était typiquement celle d’une fille chinoise née à la fin des années 1970 – je réalisais le rêve de mes parents : trouver un bon travail dans une multinationale et gravir les échelons. Mais une fois arrivée à un poste de haut niveau, j’ai commencé à me dire que la réussite n’était pas tout, qu’il fallait aussi donner du sens [à ma carrière]. »

Envoyée en Angleterre pour étudier les sciences actuarielles à 17 ans, Helen Hai poursuit ensuite une brillante carrière à Londres. Elle revient en Chine en 2007, comme actuaire en chef pour les Services Financiers de Zurich. Bien que fière de ses succès professionnels, elle décide de prendre une année sabbatique pour tenter de trouver un sens à sa carrière. Elle envisage d’abord la création d’une marque de chaussures, projet pour lequel elle rencontre Zhang Huarong, président de Huajian, un des plus grands fabricants de chaussures en Chine. Celui-ci vient alors d’être invité en Éthiopie par le Premier ministre de l’époque, Meles Zenawi, qui cherche à attirer des investisseurs dans son pays. Impressionné par l’expérience de la jeune actuaire, le président de Huajian l’invite à le suivre en qualité de conseillère lors de ce voyage.

C’est ainsi qu’Helen Hai se retrouve à l’hôtel Sheraton d’Addis-Abeba fin 2011, où ses souvenirs d’enfance refont surface : « En regardant autour de moi, je n’ai vu aucun Éthiopien. Je me suis dit qu’à l’extérieur du Sheraton, il devait y avoir de nombreuses jeunes filles se posant exactement les mêmes questions que moi 30 ans auparavant. Mais ce qu’elles ne savent pas, c’est que si leur pays peut s’engager sur la bonne route du développement, leur vie peut radicalement changer. » À la fin du voyage, Zhang décide d’investir en Éthiopie et demande à Hai de lancer l’opération. « Ça m’a pris trois mois, de la conception à l’investissement, à la production et l’exportation. Après un an, j’ai recruté 2 000 travailleurs locaux, et 3 500 à la fin de la deuxième année. » Très enthousiaste suite à ce succès, le gouvernement éthiopien recrute la jeune femme comme conseillère pour l’industrialisation et la promotion des investissements.

Motivée par cette expérience et inspirée par la théorie du développement de Justin Yifu Lin, la jeune actuaire décide de se dédier à la promotion du développement industriel du continent africain. Selon la théorie de l’ancien économiste en chef de la Banque mondiale, l’incroyable développement économique qu’a connu la Chine dans les années 1980, s’explique par sa capacité à capturer les opportunités liées aux transferts industriels, et ainsi créer des millions d’emplois. « Aujourd’hui, 30 ans plus tard, la Chine est sur le point de transférer 85 millions d’emplois. C’est une opportunité en or pour l’Afrique, parce que si le continent peut capturer cette opportunité, il pourra connaître la même transformation économique », assure Hai.

Redorer l’image de l’Afrique

Toutefois, pour que cette transformation soit possible, il est essentiel d’améliorer l’image du continent. « Les investisseurs en dehors de l’Afrique ne savent rien sur les pays africains. Avant d’aller en Afrique, qu’est-ce que je savais sur le continent ? Si vous m’aviez demandé quelques mots, j’aurais dit guerres, maladies, corruption et safaris. Parce que c’est ça l’Afrique qu’on connaît par la BBC, CNN, et les autres médias. » Pour combattre cette image, Hai partage son expérience africaine dans divers sommets économiques à travers le monde. « J’ai travaillé de très près avec le ministre éthiopien de l’Industrie (Tadesse Haile). Je l’appelais parfois à dix heures du soir, et même s’il avait un emploi du temps très chargé le lendemain, il me donnait rendez-vous à sept heures du matin dans son bureau pour essayer de m’aider. Alors oui, il y a beaucoup de problèmes en Afrique, dans cette phase initiale [de développement], mais si vous avez un ministre prêt à venir au bureau avant les agents d’entretien, ça signifie beaucoup. »

L’Initiative « Made in Africa » aide les pays africains à découvrir quel est leur avantage comparatif et leur fournit le savoir-faire industriel asiatique pour lancer le développement. Selon Hai, la main-d’œuvre compétitive est un des avantages des pays africains. Par ailleurs, certains de ces pays ont des accords avec les États-Unis et l’Europe qui leur permettent de bénéficier d’une exemption de taxes sur de nombreux biens importés. « Il s’agit d’un avantage considérable, car en transférant leurs commandes de la Chine à l’Afrique, de nombreux acheteurs européens et américains peuvent immédiatement économiser 30 % grâce à ces taxes », affirme la femme d’affaires. De plus, le continent bénéficie d’un avantage géographique, étant plus près des marchés européens et américains. Pour convaincre les investisseurs, l’initiative se concentre sur des « succès rapides », comme celui de l’usine éthiopienne, « pour que les gens puissent réellement se rendre compte que c’est possible de le faire rapidement ».

L’année dernière, Hai s’est associée avec l’industriel textile chinois Candy Ma pour étendre ses activités au Rwanda, un projet qui aurait déjà créé 500 emplois. La femme d’affaires a également aidé au lancement de la zone industrielle Diamniadia à Dakar, au Sénégal. Et ses efforts ne passent pas inaperçus, puisqu’elle a été nommée ambassadrice de bonne volonté par l’Organisation des Nations unies pour le développement industriel. « J’ai bénéficié du développement et de la transformation économique de la Chine. Et aujourd’hui, je passe de bénéficiaire à contributrice dans le développement africain », conclut Helen Hai, qui semble avoir réussi à donner un sens à sa carrière.

 

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