La présidence sud-africaine permettra de renforcer l’engagement des BRICS pour le multilatéralisme. 

Lors du 10e Sommet des BRICS tenu à Johannesburg, en Afrique du Sud, les 26 et 27 juillet 2018, les dirigeants des BRICS posent pour une photo de groupe avec les leaders et délégués des pays invités ainsi qu’avec les responsables des organisations régionales en Afrique. (XINHUA) 

Dans un contexte géopolitique mouvant et en perpétuelle mutation, l’essor des marchés émergents et des pays en développement au cours des trois dernières décennies a joué un rôle décisif dans le remodelage de la dynamique de l’ordre international. L’ascension des pays du Sud peut être attribuée aux mutations économiques et politiques survenues durant les années 1990. Au sortir de la guerre froide, les réformes orientées vers le marché ont commencé à dominer le paysage mondial. Ces changements ont eu pour effet de libérer l’énorme potentiel de croissance des pays du Sud et de les positionner en tant que puissance économique et géopolitique majeure à l’échelle planétaire. 

C’est dans ce cadre qu’un ensemble de micro-
groupements latéraux a vu le jour, menant à la formation de nouvelles alliances et partenariats. Le G20 est devenu le principal forum financier et économique international, rassemblant les principales économies du Nord et du Sud. Tandis que le G7 continuait à défendre les intérêts de l’Occident, les enjeux et défis du monde en développement étaient trop souvent négligés. C’est dans cette perspective que le Brésil, la Russie, l’Inde et la Chine (BRIC) se sont associés pour représenter les intérêts des pays du Sud, appelant à une réforme tangible et significative de l’architecture multilatérale mondiale. 

Le premier sommet officiel des BRIC a été organisé en Russie en 2009. L’Afrique du Sud a été conviée à rejoindre les BRICS en 2010 par la Chine, ce qui a conduit à la modification de l’acronyme en « BRICS ». L’Afrique du Sud a pris part au Sommet des BRICS en 2011 à Sanya, sous la présidence chinoise. L’invitation de l’Afrique du Sud à rejoindre les BRICS visait précisément à renforcer l’esprit des BRICS en tant que porte-voix influent et défenseur des pays du Sud. Cette intégration a également permis d’inscrire les intérêts de l’Afrique au cœur des préoccupations de l’agenda des BRICS. 

Une approche inclusive 

Le fondement même des BRICS repose sur une approche inclusive visant à établir un ordre mondial basé sur la multipolarité, l’inclusivité et la centralité des objectifs, respectant les principes de la Charte des Nations unies ainsi que le droit international.  

Depuis la mise en place de l’ONU et des institutions de Bretton Woods à l’issue de la Seconde Guerre mondiale, le monde a continué d’être dominé par les mêmes puissances occidentales qui ont joué un rôle prépondérant dans la création de ces institutions. Cependant, l’état actuel du monde diffère grandement de l’époque de leur création et ces institutions ne reflètent plus les réalités mondiales contemporaines. Malgré les appels incessants à la réforme des institutions politiques, économiques et financières internationales, aucun mouvement n’a été initié pour rendre ces organisations véritablement inclusives et représentatives de l’ordre mondial actuel. Le secrétaire général de l’ONU, António Guterres, a récemment souligné que le Conseil de sécurité de l’ONU et les institutions de Bretton Woods nécessitaient une réforme profonde. Il a en outre affirmé que ces institutions sont non représentatives, désuètes et non pertinentes. Ces constats font écho à la position des BRICS au cours des quinze dernières années. 

De ce fait, la fondation des BRICS a fourni une plateforme cruciale pour consolider leur influence politique, économique et financière collective en défendant la création d’un ordre politique, économique et financier plus équitable et inclusif. Les BRICS, en exploitant leur puissance collective et en capitalisant sur leurs intérêts communs, continuent de contester l’hégémonie mondiale injuste des puissances traditionnelles. Ils s’efforcent de promouvoir la multipolarité et un monde qui ne marginalise personne, un objectif actuellement contrarié par la réticence de l’Occident à s’engager dans une réforme significative et réelle de l’architecture de la gouvernance mondiale. 

C’est dans ce contexte géopolitique historique et contemporain que l’Afrique du Sud accueillera le Sommet des BRICS en 2023, sous le thème « Les BRICS et l’Afrique : Partenariat pour une croissance mutuellement accélérée, un développement durable et un multilatéralisme inclusif ». Ce thème souligne et reflète notre vision des valeurs communes perpétuelles des BRICS en tant que partenariat des principaux marchés émergents et pays en développement. La présidence sud-africaine continuera de promouvoir une croissance économique mondiale inclusive, un développement durable et l’inclusion des pays du Sud dans une architecture de gouvernance mondiale plus juste et équitable. 

Au cours du 10e Sommet des BRICS tenu à Johannesburg, en Afrique du Sud, les 26 et 27 juillet 2018, le Président sud-africain Cyril Ramaphosa prend la parole lors d’une réunion des dirigeants des BRICS avec les chefs de délégation des États africains invités et les responsables des organisations régionales en Afrique. (SITE OFFICIEL DE LA PRÉSIDENCE RUSSE) 

Valoriser la collaboration 

Le thème ainsi que les objectifs énoncés soulignent l’importance croissante de la collaboration et la cohérence fonctionnelle entre les BRICS, le continent africain et les pays du Sud. L’Afrique du Sud s’attachera à renforcer et à élargir les collaborations existantes, en mettant l’accent sur des domaines clés tels que le commerce équitable, une croissance économique plus inclusive, le développement des infrastructures, les technologies de l’information et de la communication, le développement durable, et les échanges interculturels. En promouvant une intégration économique plus inclusive et un multilatéralisme inclusif, l’objectif est de créer un environnement favorisant une croissance et une prospérité partagées et inclusives pour les BRICS et les pays du Sud. 

De plus, les BRICS se concentreront également sur l’amélioration des possibilités de coopération Sud-Sud, d’innovation et de transfert de technologie, répondant ainsi aux défis de développement auxquels sont confrontés les BRICS, l’Afrique et d’autres pays en développement. 

Pour renforcer davantage le groupe, les BRICS poursuivront l’approfondissement des mécanismes institutionnels, le renforcement de la coopération dans divers secteurs, et la promotion des échanges interculturels. Ils s’efforceront d’élargir leur collaboration au-delà des domaines traditionnels, embrassant des secteurs émergents tels que l’économie numérique, les énergies renouvelables, et l’action climatique. Ils continueront également à valoriser la Nouvelle banque de développement en tant qu’importante institution multilatérale de développement engagée dans des projets d’infrastructure et de développement durable. 

Le 15e Sommet des BRICS, qui se tiendra à Johannesburg, en Afrique du Sud, du 22 au 24 août, constitue un moment crucial pour le groupe BRICS afin de renforcer les partenariats de gouvernance mondiale, favoriser une croissance inclusive et défendre le développement durable. La présidence sud-africaine offre également l’opportunité de mettre en lumière l’engagement des BRICS envers le multilatéralisme, et de faire progresser les intérêts de l’Afrique et des autres pays du Sud. 

Les traditionnels sommets BRICS Plus et BRICS Outreach, qui se tiendront le 24 août, constitueront l’un des plus grands rassemblements du Sud global. Ils permettront aux pays BRICS d’interagir avec les pays africains invités, ainsi qu’avec d’autres représentants des principaux organismes régionaux du Sud global. C’est une occasion unique pour les BRICS et les pays du Sud de relever collectivement les défis géopolitiques, sécuritaires, économiques et financiers actuels dans un monde de plus en plus polarisé. 

Les BRICS doivent saisir cette occasion pour démontrer leur leadership en favorisant la coopération, la paix et la stabilité mondiales, appuyées par un multilatéralisme centré autour d’une ONU réformée. Les BRICS doivent être à l’avant-garde pour façonner un futur monde multipolaire, multi-civilisationnel et multiculturel, exempt de puissances hégémoniques, centré sur l’humain et répondant aux aspirations de toutes les nations, particulièrement celles du Sud, afin de garantir qu’aucune ne soit laissée pour compte. 

L’auteur est ambassadeur itinérant pour l’Asie et les BRICS de l’Afrique du Sud.