2023-10-13 |
Un chemin vers la prospérité |
VOL. 15 OCTOBRE 2023 par Hu Biliang · 2023-10-13 |
Mots-clés: ICR |
L’initiative « la Ceinture et la Route » a connu des avancées significatives au cours de la dernière décennie.
Siège des Centres africains de contrôle et de prévention des maladies à Addis- Abeba, capitale de l’Éthiopie, construit avec le soutien de la Chine, le 11 janvier. (XINHUA)
Cette année, nous célébrons le 10e anniversaire de l’initiative « la Ceinture et la Route » (ICR). En dix ans, des projets ambitieux sont devenus réalité. Et bien que nous soyons submergés par d’innombrables raisons de commémorer cet événement, je propose que nous marquions un temps pour réfléchir.
Sur quoi devrions-nous nous pencher ? L’ICR, forte de ses dix années d’existence, nous offre matière à introspection. Je me suis posé ces questions essentielles : Quels sont les véritables succès de l’ICR ? Pourquoi a-t-elle gagné l’adhésion et le soutien de tant de pays et d’organisations à travers le monde ? Y a-t-il des éléments de l’ICR qui n’ont pas atteint leurs objectifs, conduisant certains à la percevoir de travers, voire à la critiquer, s’y opposer ou tenter de la neutraliser ?
Un récapitulatif
Pour commencer, les données ci-après illustrent concrètement les réalisations de l’ICR au cours de cette décennie.
À la date du 6 janvier 2023, la Chine avait conclu plus de 200 accords de coopération avec 152 pays et 32 organisations internationales sous l’égide de l’ICR. De nombreux projets d’infrastructure ont été lancés, avec une grande partie d’entre eux déjà achevés et opérationnels. Parmi ces réalisations, citons le chemin de fer Chine-Laos, le chemin de fer Mombasa-Nairobi, le chemin de fer Addis-Abeba-Djibouti, l’autoroute du Karakoram, l’autoroute Phnom Penh-Sihanoukville, le pont Maputo-Catembe, le pont de l’amitié Chine-Maldives, le pont de Peljesac, le pont Padma, ainsi que les ports de Gwadar, Hambantota et Kyaukpyu.
Plusieurs projets dans le secteur énergétique, en particulier ceux liés aux énergies renouvelables, ont aussi été finalisés et sont désormais opérationnels. Parmi eux, citons la centrale nucléaire de Karachi, la centrale hydroélectrique de Karot, le projet hydroélectrique en cascade de Nam Ou, le parc éolien de De Aar, la centrale solaire Al Dhafra PV2, ainsi que le projet solaire marocain Noor Tafilalt d’une capacité de 120 MW.
Avec l’approfondissement de la coopération internationale sur la capacité de production, de nombreux parcs industriels ont vu le jour dans les pays en développement d’Asie, d’Afrique, d’Amérique latine et d’Europe. Cela inclut des réalisations telles que le parc sino-biélorusse, le parc thaï-chinois de Rayong, la zone industrielle orientale en Éthiopie et la zone économique spéciale de Sihanoukville. De nombreuses entreprises, chinoises ou internationales, renforcent leur présence dans ces zones industrielles.
De plus, en collaboration avec les pays engagés dans l’ICR, la Chine a établi plusieurs laboratoires dédiés à la coopération et à la recherche en science et technologie. Ces laboratoires explorent des domaines tels que la lutte contre la désertification, l’agriculture moderne, la santé, la biologie marine et les énergies renouvelables. L’introduction du riz hybride chinois en Afrique, grâce à l’ICR, a grandement amélioré la production céréalière sur le continent. Le champignon chinois Juncao a permis aux habitants des îles du Pacifique Sud de sortir de la pauvreté. Les trains de fret Chine-Europe ont revitalisé la construction de chaînes d’approvisionnement stables à travers l’Eurasie. Quant au corridor terre-mer occidental de la Chine, il connecte désormais sa région occidentale à plus de 300 ports répartis dans plus de 100 pays.
Au cours de la dernière décennie, les entreprises chinoises ont investi près de 1 000 milliards de dollars dans les projets de l’ICR, bénéficiant directement ou indirectement à des pays représentant 65 % de la population mondiale. Cet investissement a rapidement amélioré les infrastructures vitales, l’éducation et les soins de santé dans ces régions, réduisant les coûts de transport, accélérant l’industrialisation et créant de nouveaux emplois. Ces avancées soutiennent activement la croissance économique et la lutte contre la pauvreté dans les pays concernés.
Parallèlement, il est manifeste que les entreprises chinoises ont diversifié leurs marchés d’investissement à l’international grâce à la mise en œuvre collaborative de l’ICR. La réalisation de grands projets a également stimulé la coopération commerciale entre la Chine et ses pays associés. On peut donc affirmer que la collaboration autour de l’ICR a encouragé un développement mutuellement bénéfique entre la Chine et ses partenaires.
Des étudiants laotiens qui ont fait un voyage en Chine en empruntant le chemin de fer Chine-Laos posent pour une photo de groupe à la gare de Kunming, située dans la province du Yunnan, au sudouest de la Chine, le 25 mai. (VCG)
Opter pour la bonne action
Selon mes observations, l’ICR a accompli au moins trois actions louables au cours de la décennie écoulée.
Tout d’abord, elle a défini avec justesse l’orientation pour encourager le développement, notamment en renforçant les infrastructures, l’énergie, le commerce, l’industrialisation, l’urbanisation, ainsi que les secteurs agricole et rural. L’ICR vise le développement à l’échelle nationale, régionale et internationale, en soutenant la modernisation accélérée des nations, y compris la Chine. De plus, elle favorise l’épanouissement global des citoyens et l’avancement sociétal, contribuant ainsi aux Objectifs de développement durable à l’horizon 2030 des Nations unies.
Deuxièmement, elle a emprunté la voie adéquate pour sa mise en œuvre, en privilégiant d’abord le développement des infrastructures. L’ICR aspire à établir un réseau de connectivité régionale et mondiale optimisé, facilitant ainsi une circulation plus fluide des différents facteurs de production. Cela se traduit par une réduction des coûts pour les entreprises et favorise une croissance régionale et mondiale interconnectée et plus efficiente.
Enfin, un cadre institutionnel adéquat a été établi. Ce cadre détermine l’ambition ultime de l’ICR : édifier une communauté de destin pour toute l’humanité. Il illustre également les spécificités de l’initiative, ouverture et inclusivité, suivant les principes fondamentaux de consultations approfondies, de réalisation conjointe et de bénéfices mutuels. Il adopte également une méthode de coopération qui s’appuie sur des directives gouvernementales, une orientation marchande, un leadership entrepreneurial et une collaboration pragmatique, tout en respectant les standards internationaux.
Des voix contre l’initiative
Si l’ICR est effectivement pertinente sur ces aspects essentiels, pourquoi certains pays et individus
continuent-ils de s’y opposer ?
En premier lieu, il y a des malentendus sur le projet de construction conjointe de l’ICR. Certains pensent à tort que la Chine cherche à établir une hégémonie via cette initiative, alors que son objectif principal est de promouvoir le développement. De plus, bien que l’ICR vise principalement à développer des infrastructures pour faciliter la circulation des facteurs de production et encourager le développement global, certaines personnes la perçoivent comme une « diplomatie du piège de la dette » ou du « néocolonialisme », accusant la Chine de chercher à exercer un contrôle politique et à exploiter économiquement d’autres pays.
L’ICR n’étant en place que depuis 10 ans, la Chine n’a pas encore pleinement exploré la coopération internationale à son égard ni optimisé sa communication à ce sujet. Bien que certains malentendus soient compréhensibles, il est impératif que la Chine intensifie ses efforts dans ces domaines pour permettre à la communauté internationale de mieux comprendre la véritable essence de l’initiative.
D’autre part, certains projets de l’ICR ont soulevé des préoccupations. Par exemple, la transparence de leur mise en œuvre a été remise en question. De plus, certaines entreprises impliquées sont accusées de causer des dommages environnementaux, de polluer, de ne pas embaucher suffisamment de travailleurs locaux ou de femmes, et de ne pas garantir la protection des droits des travailleurs.
Lors de mes visites sur le terrain, j’ai examiné plus de 20 projets de l’ICR et constaté leur impact positif : amélioration des infrastructures de transport, augmentation de la capacité énergétique, stimulation du commerce et de l’industrialisation, renforcement de la sécurité alimentaire, création d’emplois, lutte contre la pauvreté, augmentation des exportations et amélioration des services de santé et d’éducation. Cependant, j’ai également noté que certains projets rencontrent des difficultés financières après leur lancement, ce qui crée une pression économique importante.
De plus, quelques-uns des premiers projets de l’ICR ont soulevé des préoccupations environnementales, entraînant la réticence de certains locaux. L’instabilité et les revirements fréquents de politiques dans plusieurs pays ont conduit à l’arrêt de divers projets, engendrant des conséquences financières. En outre, l’évolution de la géopolitique internationale a impacté certains projets.
En troisième lieu, certains pays étrangers se montrent réticents vis-à-vis de l’ICR en fonction de leurs objectifs stratégiques propres. Certains vont même jusqu’à la dénigrer, la critiquer, s’y opposer ou tenter de la marginaliser délibérément.
Un ouvrier chinois (au centre) communique avec deux ouvriers indonésiens sur le chantier de construction de la ligne à grande vitesse Jakarta-Bandung, à Bandung, en Indonésie, le 1er juillet. (VCG)
La voie à suivre
Au final, il est essentiel d’émettre un avis objectif concernant la mise en place de l’ICR. Deux principales pistes d’amélioration peuvent être envisagées pour optimiser la construction conjointe de l’ICR.
D’une part, le gouvernement chinois et ses entreprises devraient renforcer leur collaboration avec les gouvernements locaux et les entreprises des pays hôtes. Outre la promotion du développement économique via les projets de l’ICR, il est essentiel de mettre davantage l’accent sur le soutien au développement social à long terme. Cela devrait se traduire par une amélioration des droits humains dans les pays hôtes, notamment en ce qui concerne l’emploi, l’éducation, la sécurité, les droits environnementaux, numériques, et les droits des femmes et des enfants au sein des communautés locales.
De plus, les projets d’infrastructure nécessitent d’importants capitaux et ont un cycle de construction prolongé, avec un retour sur investissement modeste et une sensibilité aux enjeux macroéconomiques et géopolitiques. Il est donc essentiel pour les investisseurs chinois de renforcer leur vigilance face aux risques et de prendre des mesures préventives. Les entreprises chinoises doivent se protéger contre divers risques, tels que les risques politiques, économiques, sociaux, culturels et légaux, pour garantir la sécurité et la rentabilité de leurs investissements dans les projets de l’ICR. Ainsi, cette dernière pourra apporter des avantages concrets, durables et de grande qualité.
En somme, la Chine, les pays et les entreprises impliqués dans l’ICR doivent renforcer leur collaboration et démontrer par des actions concrètes que cette initiative a réellement stimulé le développement mondial, amélioré la vie des gens, apporté des avantages tangibles à tous, renforcé les droits de l’homme dans divers pays, et contribué à la création d’une communauté de destin pour l’humanité.
L’auteur est doyen exécutif et professeur de la Faculté de « la Ceinture et la Route » à l’Université normale de Beijing.
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