2024-09-02 |
Un partenariat essentiel |
VOL.16 / SEPTEMBRE 2024 · 2024-09-02 |
Mots-clés: FCSA |
L’envoyé de l’Union africaine affirme que la coopération sino-africaine stimule la connectivité et le développement sur le continent.
Rahamtalla Osman, représentant permanent de l’UA en Chine. (DONATIEN NIYONZIMA)
La Chine a renforcé activement sa coopération avec l’Union africaine (UA). En 2014, elle a établi une mission diplomatique auprès de l’UA, consolidant ainsi les liens entre les deux entités. Reconnaissant le rôle central de l’union dans la promotion de l’intégration et le renforcement du continent africain à travers l’unité, la Chine soutient également son influence prépondérante dans le maintien de la paix et de la sécurité en Afrique. Par ailleurs, elle nourrit l’espoir que l’UA intensifiera son implication dans les enjeux régionaux et internationaux. À l’orée du Sommet du Forum sur la Coopération sino-africaine (FCSA) qui se tient à Beijing en septembre, Rahamtalla Osman, représentant permanent de l’UA en Chine, a exposé ses réflexions à CHINAFRIQUE concernant les dynamiques sino-africaines, le rôle de l’UA dans cette coopération, ainsi que ses attentes pour ce sommet. Voici quelques extraits choisis de ses propos :
CHINAFRIQUE : Quelles sont vos attentes concernant le Sommet du FCSA ? Pensez-vous que cela favorise une collaboration plus soutenue entre la Chine et les nations africaines afin de répondre aux défis mondiaux actuels ?
Rahamtalla Osman : Pour commencer, il me semble essentiel de revisiter le concept initial qui a mené à la création du FCSA. L’intérêt majeur de ce forum réside dans son rôle de mécanisme régulateur des échanges entre la Chine et l’Afrique, visant à les rendre plus efficaces et interactifs. Ce mécanisme se concrétise par des conférences triennales, complétées par des rencontres régulières de hauts fonctionnaires. Ces réunions ont pour but de renforcer nos relations bilatérales.
Le FCSA sert de plateforme essentielle pour aborder de nombreuses problématiques sino-africaines et offre également un espace pour dialoguer avec la Chine et partager nos perspectives sur des enjeux globaux. Un exemple marquant de l’utilité de ce forum est la période de la COVID-19, durant laquelle la Chine a apporté un soutien significatif à l’Afrique, nous aidant à surmonter les défis majeurs de cette crise. Ainsi, le FCSA se révèle être un outil précieux de coopération et de soutien mutuel.
Le Sommet de Beijing se distingue des éditions précédentes par une organisation axée sur des comités thématiques, chacun coprésidé par la Chine et un pays africain. Quelle est la portée de cette nouvelle approche ?
En effet, ce sommet marque un changement significatif puisqu’il se déroule au niveau des chefs d’État, contrairement aux éditions précédentes du FCSA qui se tenaient généralement au niveau ministériel. Cette année, 53 pays africains sont représentés par leurs chefs d’État, vice-Présidents ou Premiers ministres, ainsi que par d’autres hauts fonctionnaires. Étant donné que chaque représentant doit prononcer une déclaration ou un discours, le temps alloué peut s’avérer conséquent, souvent au détriment des discussions bilatérales. Pour optimiser l’emploi du temps, la conférence a été organisée en quatre sessions thématiques, chacune centrée sur des sujets d’intérêt commun. Cette nouvelle méthode de gestion semble donc plus efficace et adaptée que les formats antérieurs.
Depuis sa création en 2000, le FCSA a considérablement évolué. Il a vu son nombre de membres augmenter en réponse aux changements de priorités au fil des ans. Quels sont les avantages les plus significatifs que le FCSA a offerts à la Chine et à l’Afrique ?
L’avantage le plus notable est que nous organisons régulièrement des rencontres pour aborder des sujets d’actualité, car les défis auxquels nous faisons face évoluent constamment. La réunion de Dakar, qui s’est déroulée durant la pandémie de COVID-19, en est un exemple ; elle a naturellement influencé les thématiques abordées. Aujourd’hui, de nouveaux enjeux se présentent à nous, notamment les conflits mondiaux tels que la crise en Ukraine et les tensions à Gaza, qui ont des répercussions sur les relations et la situation économique en Afrique. Il est donc essentiel de pouvoir discuter de ces problématiques avec la Chine, avec qui nous partageons de nombreux points de vue convergents.
L’Agenda 2063 de l’UA représente un cadre stratégique crucial, définissant la voie vers la transformation socio-économique du continent pour les prochaines décennies. Quelle est votre perspective sur cet agenda et percevez-vous une synergie croissante entre l’Agenda 2063 et le mécanisme du FCSA ?
Je crois que cette synergie dépasse le cadre du FCSA. Elle s’étend également entre l’Agenda 2063 et l’initiative « la Ceinture et la Route » (ICR), qui est un autre mécanisme important. C’est pourquoi l’UA a formalisé un accord avec la Chine pour explorer les moyens de concrétiser la vision de l’Agenda 2063. Parallèlement, 52 pays africains ont signé des accords dans le cadre de l’ICR avec la Chine, envisageant ainsi une nouvelle voie de coopération. L’ICR apporte les ressources et les idées, et comme l’Agenda 2063 partage ces mêmes idées, il y a une convergence notable entre les deux.
L’instructrice de chinois Chen Ling (à droite) enseigne des chansons chinoises à ses apprentis pendant une pause de travail à Nairobi, au Kenya, le 23 mai 2023. Mme Chen travaille pour la section de maintenance des équipements électriques de l’Africa Star Railway Operation Company. (XINHUA)
L’ICR a été initialement lancée comme un mégaprojet pour améliorer les infrastructures dans les pays participants. Toutefois, elle a récemment élargi son champ d’action en incluant d’autres domaines tels que la transformation verte. Quels avantages considérez-vous que l’ICR a apportés à la Chine et aux pays africains ?
L’ICR est indéniablement fondamentale. En Afrique, nous avons hérité d’une infrastructure très limitée de l’époque coloniale, qui a fragmenté le continent. Notre objectif dans le cadre de l’Agenda 2063 est donc de renforcer la connectivité africaine. C’est pourquoi la vision de l’ICR sur la connectivité résonne tant avec nous. Cependant, cette connectivité ne devrait pas être envisagée isolément ; elle doit être intégrée avec le développement d’autres secteurs tels que l’agriculture, l’éducation et l’économie générale. Il est crucial de fusionner ces projets pour maximiser leur impact.
Actuellement, l’accent est mis sur l’industrialisation et la modernisation de l’agriculture en Afrique. Quel rôle la Chine a-t-elle joué dans ce processus ?
L’un des principaux défis des économies africaines est leur dépendance aux exportations de matières premières sans valeur ajoutée, ce qui nécessite une industrialisation accrue. L’an dernier, le Président chinois Xi Jinping a annoncé à Johannesburg que la Chine soutiendrait l’Afrique dans son industrialisation, sa modernisation agricole, ainsi que dans le renforcement des compétences. L’agriculture étant le moteur de l’industrie en Afrique, leur intégration peut valoriser les produits, améliorer les conditions de vie, créer des emplois et augmenter le PIB. Cette déclaration est donc bienvenue, et le FCSA en précise les modalités de coopération.
La Chine soutient le développement de l’Afrique en adhérant à des principes et politiques clairs. Comment évaluez-vous cette politique et que répondez-vous aux critiques de certains pays occidentaux sur le rôle de la Chine en Afrique ?
L’idée que la Chine exploite l’Afrique est incorrecte et nous la considérons comme une insulte. Nous sommes parfaitement capables de gérer nos affaires et de déterminer nos relations internationales. Nous valorisons notre coopération de longue date avec la Chine, qui remonte même à l’époque coloniale. Contrairement à certains pays occidentaux qui colonisaient notre continent, la Chine et quelques autres nations nous ont aidés à lutter contre la colonisation. Nos relations sont fondées sur la non-ingérence et le respect mutuel. Les critiques occidentales sont donc infondées et ne reflètent pas la réalité de notre partenariat.
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