2024-09-23 |
Un pont vers demain |
par ABBAS MAHAMAT TOLLI · 2024-09-23 |
Mots-clés: modernisation ; Afrique |
Modernisation de l’Afrique : le rôle prépondérant du partenariat sino-africain dans l’Agenda 2063
Abbas Mahamat Tolli, ancien gouverneur de la Banque des États de l’Afrique Centrale
L’Afrique se trouve à un tournant crucial de son développement, dotée d’un potentiel exceptionnel pour transformer son avenir économique et social. L’Agenda 2063, la feuille de route visionnaire de l’Union africaine, incarne les aspirations du continent pour un développement inclusif et durable. Ce plan stratégique vise à faire émerger une Afrique industrialisée, interconnectée et technologiquement avancée, capable de valoriser ses ressources au profit de l’ensemble de sa population.
Pour concrétiser ces ambitions, il est impératif que les Africains prennent pleinement en main la modernisation de leur continent. En mettant à profit les talents locaux, la dynamique de sa jeunesse et l’abondance de ses ressources naturelles, l’Afrique peut se réinventer. Cependant, des partenariats stratégiques demeurent essentiels pour accompagner cette transformation. Parmi ceux-ci, le partenariat sino-africain, renforcé lors du Sommet 2024 du Forum sur la Coopération sino-africaine (FCSA), apparaît comme un pilier sur lequel l’Afrique peut compter pour accélérer la réalisation des objectifs de l’Agenda 2063.
Lors de ce forum, la Chine a annoncé un engagement financier significatif de 51 milliards de dollars (360 milliards de yuans) sous forme de lignes de crédit, d’investissements publics et privés, et d’assistance pour les trois prochaines années. Ce soutien se concentre particulièrement sur les infrastructures, l’énergie, la technologie et l’industrialisation. Malgré les défis économiques auxquels la Chine est confrontée, cet engagement réaffirme la solidité de son partenariat avec l’Afrique et vise à stimuler la modernisation du continent.
Infrastructures et industrialisation : leviers essentiels pour un développement durable
Les infrastructures et l’industrialisation sont des piliers essentiels pour la réalisation des ambitions de l’Agenda 2063. Grâce à des investissements massifs dans des secteurs clés tels que les routes, les chemins de fer, les ports et les réseaux énergétiques, la Chine a joué un rôle déterminant dans la mise en place de projets structurants en Afrique, à l’image de la ligne ferroviaire Mombasa-Nairobi ou des initiatives énergétiques en Éthiopie.
Lors du FCSA 2024, le Président chinois Xi Jinping a annoncé le lancement de 30 nouveaux projets d’interconnexion des infrastructures, dont la construction d’un aéroport à N’Djamena, ainsi que de diverses initiatives industrielles et énergétiques destinées à stimuler l’industrialisation du continent. Ces projets visent à améliorer la connectivité, attirer des investissements et créer un million d’emplois locaux.
Il est crucial que les Africains jouent un rôle central dans ces initiatives, tant dans leur conception que dans leur mise en œuvre. À cet égard, la Banque Africaine de Développement (BAD) doit occuper une position clé en veillant à ce que ces projets s’alignent sur les priorités locales et contribuent à une croissance inclusive et durable. En soutenant la création de zones économiques spéciales, la BAD peut faciliter l’émergence de l’Afrique en tant qu’acteur majeur des chaînes de production mondiales, tout en garantissant que l’industrialisation profite directement aux populations locales et devienne un véritable moteur de croissance pour l’ensemble du continent.
Technologie et digitalisation : préparer l’Afrique pour l’avenir
Au-delà des infrastructures physiques, la digitalisation émerge comme un levier crucial pour la modernisation économique du continent africain. L’Afrique doit accélérer l’adoption des technologies numériques afin de transformer des secteurs essentiels tels que l’agriculture, l’éducation, la santé et l’administration publique. La Chine, en tant que leader mondial dans les technologies numériques et les énergies vertes, joue un rôle clé dans ce processus de transformation en Afrique.
Lors du Sommet 2024 du FCSA, le M. Xi a également mis en avant l’importance des projets « petits et beaux », conçus pour répondre aux besoins locaux tout en ayant un impact durable. Ces initiatives incluent le déploiement de la 5G, l’implémentation de solutions numériques visant à améliorer l’efficacité des services publics, ainsi que des investissements dans des secteurs de pointe tels que les véhicules électriques et les panneaux solaires. Ces projets visent non seulement à renforcer l’inclusion numérique à travers le continent, mais aussi à réduire la fracture technologique entre les zones urbaines et rurales.
Un partenariat stratégique pour un avenir partagé
Ce sommet a marqué une étape décisive en redéfinissant les relations sino-africaines comme une véritable « relation stratégique ». Dans ce cadre, la Chine et l’Afrique se considèrent désormais comme une « communauté de destin commun », une vision qui dépasse le simple partenariat économique en englobant des dimensions politiques, sociales et culturelles.
La BAD occupe un rôle central dans ce partenariat stratégique. En soutenant des projets qui renforcent la coopération sino-africaine, tout en veillant à ce qu’ils soient en phase avec les priorités locales et profitent directement aux populations africaines, la BAD peut être un catalyseur de la transformation profonde et durable du continent.
La modernisation de l’Afrique constitue un projet ambitieux, mais réalisable grâce à des partenariats stratégiques tels que celui établi avec la Chine. Il appartient avant tout aux Africains de façonner cet avenir, en s’appuyant sur ces alliances pour accélérer l’accomplissement des objectifs de l’Agenda 2063, garantir une croissance inclusive et construire un futur commun fondé sur une prospérité partagée.
Abbas Mahamat Tolli, ancien gouverneur de la Banque des États de l’Afrique Centrale
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