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Afrique
  2016-12-30
 

Les voix de l'espoir

par Sudeshna Sarkar | VOL.9 Janvier 2017
Mots-clés: Soudan du Sud; filles

Les jeunes filles de la CCC se produisent dans une église de Juba.

 

Les lignes de communication entre Beijing et Juba sont mauvaises. Il nous faut plusieurs essais pour réussir à joindre notre interlocutrice, et même lorsquon y arrive, les voix de lautre côté sont saccadées et finissent par être coupées. Mais comme par magie, quand la jeune Umjima commence à chanter Christ is born in Bethlehem, lune des plus célèbres chansons de Noël, la ligne se stabilise enfin. La jeune fille de 17 ans vient de rentrer de lécole et nous parle avant de se rendre à une répétition avec sa chorale, Confident Children out of Conflict (CCC ou Enfants confiants sortis du conflit, en français). Ces jours-ci, les filles de la CCC pratiquent autant que possible, elles savent que leurs belles voix sont attendues dans les églises de la capitale sud-soudanaise pendant les fêtes de fin dannée. CCC est une chorale unique, constituée de jeunes filles âgées de 12 à 17 ans, rescapées des rues du Soudan du Sud. Ce groupement musical représente un espoir pour la nation la plus jeune du monde, qui ne cesse de faire face à dinnombrables violences depuis la fondation du pays en juillet 2011. 

  

Les rencontres de Cathy 

Les violents affrontements dans le pays font de nombreux sans-abris, vivant dans une extrême pauvreté. La rencontre de jeunes filles dans cette situation émeut Cathy Groenendijk, qui décide de les aider. Née en Ouganda, Groenendijk sinstalle au Soudan en 1999. Le Nord et le Sud saffrontaient alors dans une terrible guerre civile. Lattention quon porte aux « garçons perdus » la surprend – plus de 20 000 enfants déplacés à cause des violences, qui périssent ou finissent dans des camps de réfugiés au Kenya –, alors que personne ne parle des « filles perdues », restées sur place après avoir subi de grands traumatismes, luttant au quotidien pour survivre. « Elles vivaient dans les rues, dans les marchés, et parfois même dans les cimetières », raconte Groenendijk. « Au début je ne faisais que leur parler, et leur offrir un repas. »  

Mais en 2007, elle décide daller plus loin et de créer lassociation CCC. Un espace où les enfants peuvent vivre, mais aussi suivre une éducation et réapprendre à vivre en société. Hébergeant majoritairement des filles, lassociation parvient à aider de nombreux enfants et reçoit un financement de lAgence de coopération et de développement international de Suède. « Nous accueillons des enfants qui nont aucun autre endroit où aller. Ce sont des enfants des rues, dont beaucoup ont subi de sévères agressions. Nous sommes dans une société dominée par les hommes, et la guerre a eu un impact très fort sur les traditions », explique Groenendijk. « Nous hébergions 60 filles, mais avec les récents éclats de violence, nous sommes passés à 89 enfants. »  

Hélène (nom demprunt) est née après que son père soit parti au combat. Elle vivait dans un marché avec sa mère alcoolique. « Quand jai rencontré Hélène, elle était très sale et mal élevée », se souvient Groenendijk. « Elle menait une vie de dangers et survivait grâce au vol. Elle avait aussi été abusée sexuellement, alors quelle navait que 7 ans. » Contrairement à Hélène, Alina (nom demprunt) arrive dans les locaux de la CCC accompagnée par sa mère. « Elle avait 12 ou 13 ans et son père et frères essayaient de la marier », raconte Groenendijk. « Les filles sont traitées comme des biens, particulièrement dans les zones de conflit. Une fille est toujours imaginée comme un arbre dont on peut cueillir les fruits. Ils lont offerte à un homme en échange de quelques vaches. »  

Groenendijk se rend compte que beaucoup de ces filles ont de très belles voix, et aiment chanter. Elle décide donc de créer une chorale : « La création de la chorale semblait être le choix le plus logique pour rapprocher les filles, et les aider à travailler ensemble. » À leur arrivée dans le foyer, les filles ont du mal à communiquer, ce qui cause de nombreuses disputes. La création de la chorale en 2007 les rapproche énormément, car elles apprécient toutes cette activité. Selon Groenendijk, le chant les a transformées, leur offrant lopportunité de se produire devant des personnalités du pays, leur donnant confiance en leurs capacités. « La chorale les aide à réaliser leurs rêves, et à devenir quelquun. » 

 

 

Lhistoire dune bénévole  

Quand Eleanor Caine chantait avec la Chorale de luniversité Clare de Cambridge pendant ses études, puis avec la Chorale nationale de la jeunesse de Grande Bretagne, elle ne simaginait pas quun jour elle chanterait avec des jeunes filles du Soudan du Sud. Alors quelle cherchait à travailler dans le secteur du développement, elle trouve un emploi auprès dun programme déducation au Soudan du Sud en 2015. Cest avec plaisir quelle découvre quune partie de son travail consiste à être bénévole dans les locaux de la CCC, notamment en aidant avec les activités musicales. « Il y a près de 15 filles [dans la chorale] et on se concentre majoritairement sur les voix, même si parfois nous travaillons aussi les percussions. Les filles sont très talentueuses, également avec les percussions », raconte Caine. « Elles nont pas suivi de formation, mais elles ont des voix extraordinaires. Et elles aiment chanter. » 

Lun des lieux où les filles sont le plus fières de se produire est la cathédrale All Saints de Juba. Comme de nombreuses églises du pays, celle-ci na cessé daccueillir des déplacés depuis le début du conflit. Les jeunes filles sont particulièrement motivées pour Noël et le Nouvel An, une période pendant laquelle elles font résonner les chants de Noël dans la cathédrale. Leur public est majoritairement sud-Soudanais, mais elles chantent aussi souvent pour des diplomates ou la communauté internationale travaillant à Juba. « Les gens ont encore leur huma-nité, ils veulent améliorer les choses et célébrer Noël avec ces filles, qui ont beaucoup souffert », estime Caine. « Les gens veulent la paix, et cette chorale leur donne de lespoir. »  

  

Projets davenir 

Regina, originaire de lÉtat dÉquatoria-Central, qui a connu des violences en 2016, fait un très simple vœu pour Noël : « Je suis en 6e, jespère passer en 5», confie la jeune fille de 15 ans. « Mon vœu pour Noël est de pouvoir finir lécole. » Et si elle tient à finir son cursus scolaire, cest quelle a un objectif très précis. « Je veux être ministre de lÉducation, pour que plus denfants comme moi puissent aller à lécole », explique-t-elle.  

Umjima est à la fois confiante et sociable. Toutefois, elle na pas toujours été comme ça : « Quand la guerre se passait à Juba et quon entendait des coups de feu, javais peur. » Mais quand elle chante, elle se sent heureuse et na plus peur. « Je me sens chanceuse. On ma donné lopportunité daller à lécole », insiste-t-elle. Umjima a aussi un objectif précis, « Quand je serais grande, je veux être avocate. Je veux défendre les droits des plus faibles », conclut-elle.  

 

Exclusif CHINAFRIQUE

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