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Culture et Société
  2017-08-07
 

Diriger leur avenir

par Sudeshna Sarkar et Xia Yuanyuan | VOL.9 AOÛT
Mots-clés: film
Ayanda, le film de Sara Blecher a remporté le Prix spéciale du jury au second Festival du film BRICS.
La productrice Bongiwe Selane s'attache à raconter des histoires depuis une perspective féminine.

Être une Sud-Africaine blanche n'a pas fait de Sara Blecher une privilégiée, même pendant l'apartheid. « Mon grand-père était juif lituanien et il est le seul de sa famille à avoir échappé à l'holocauste pendant la seconde guerre mondiale. Même si je suis blanche, je suis du mauvais côté de l'Histoire… »

Mais quelque chose a ajouté à sa peine : sa décision de devenir réalisatrice à une époque où l'industrie cinématographique sud-africaine était dominée par les hommes.

« Pour moi, le bonheur, c'était d'être assise dans un cinéma et de regarder des films », décrit Blecher en évoquant son enfance, avec une mère metteur en scène au théâtre. « Je n'ai jamais pensé faire autre chose que des films. »

Ses films ont une composante non-conformiste. Bien qu'elle parle anglais, ses trois longs-métrages sont en zoulou, en sotho et en afrikaans, soit toutes les langues officielles autochtones d'Afrique du Sud. Ayanda, réalisé en 2015, présente l'histoire d'une jeune fille ayant décidé de reprendre le garage de son père. Avec ce film, elle a remporté le prix spécial du jury au deuxième Festival du film BRICS de Chengdu, en Chine.

« J'espère que les BRICS permettront de montrer la diversité du monde et être un contrepoids à la culture hollywoodienne où tout est uniforme », explique-t-elle.

Affiches de Happiness is a Four-Letter Word et d'Ayanda

Pour cela, cette mère de trois enfants pense qu'il est important de faire des films dans d'autres langues que l'anglais. « Le monde est multiculturel et nous devons nous adresser à tout ce public », poursuit-elle.

La conception d'Ayanda repose en partie sur son désir de montrer à sa fille un modèle féminin « qui n'est pas celui que nous voyons à Hollywood. »

« J'ai fait partie du jury des Awards du film et de la télévision sud-africains il y a quelques années et nous ne pouvions pas remettre de prix à une œuvre féminine tout simplement parce qu'il n'y en avait aucune dans le paysage audiovisuel sud-africain », a-t-elle déclaré au site internet TakeOne.

Blecher loue les politiques encourageantes du gouvernement sud-africain pour les cinéastes et l'émergence d'organisations comme Sisters Working in Film and TV, qui ont permis à des réalisatrices, comme Blecher, d'obtenir des fonds pour leurs films.

Pour elle, les femmes occupent également des postes importants au sein du gouvernement et de la société. « Lorsque nous négocions avec le gouvernement et les chefs d'entreprise, la plupart de nos interlocuteurs sont des femmes. Les femmes occupent des fonctions très importantes en tant que décideurs et discuter avec elles rend notre lutte beaucoup plus simple. »

Thabo Philip Molefe, directeur général de la Fondation nationale du film et de la vidéo d'Afrique du Sud, l'attribue à la démocratisation en cours dans tous les secteurs de la société.

« Ce n'est pas seulement pour nous exposer en Chine », dit-il, en se référant à la délégation sud-africaine au Festival du film de Chengdu, composée en majorité de femmes. « Il y a égalité de représentation à tous les niveaux et dans divers secteurs. L'égalité des sexes est très importante parce que nous sommes issus d'une histoire déséquilibrée. Le gouvernement s'emploie à assurer la juste représentation à tous les échelons de la société. »

Bien que Happiness Is a Four-Letter Word, un film de la réalisatrice Bongiwe Selane, ait reçu de nombreuses critiques lors de sa projection à Chengdu – d'aucuns le considérant comme une romance à l'eau de rose – Selane insiste sur le fait que la culture des femmes metteurs en scène et productrices est précisément de raconter des histoires d'un point de vue féminin.

Happiness Is a Four-Letter Word, dont le bilan économique en termes de recettes est positif, retrace le parcours de trois success women. Selon la réalisatrice, le thème repose sur la quête des femmes sud-africaines dans l'accomplissement de leur propre destinée.

« Quand j'ai lu le livre sur lequel le film est basé, je me suis reconnue, ainsi que mes amies. Les femmes doivent continuellement négocier pour avoir de l'espace. C'est une lutte permanente entre ce qu'elles désirent et ce que la société veut d'elles. »

La réalisatrice Judy Naidoo, dont les films reposent aussi sur des protagonistes féminins, ressent la dynamique de l'industrie cinématographique sud-africaine. « Au départ, les films de femmes réalisatrices n'étaient pas rentables, mais nous sommes devenues un contributeur économique important », dit-elle.

Et puisque la majorité d'entre elles n'ont pas pu faire des films pendant l'apartheid, il est légitime d'affirmer qu'aujourd'hui, l'injustice est réparée. La Fondation nationale du film et de la vidéo est chargée de promouvoir les femmes et les réalisateurs noirs. « J'ai pu financer mon projet grâce à cela », ajoute-t-elle.

La femme de 42 ans a également constaté un changement dans la nature des films sud-africains. « Quand nous avons commencé à faire des films, ils tournaient tous autour de l'apartheid. Mais l'industrie a réalisé que le reste du monde n'était pas forcément intéressé. Les gens ne connaissent que Mandela, les autres grandes figures ne sont pas connues et donc non-viables du point de vue commercial. Avec l'émergence de nouveaux réalisateurs, nous avons plus de dimension humaine dans nos films. »

Naidoo, dont les ancêtres sont indiens, travaille actuellement sur son prochain film, dans la lignée du Parrain, mais avec un personnage principal… féminin. « Jusque-là, les femmes avaient des rôles typiques de mères, d'épouses ou d'infirmières. Vous aviez des hommes qui jouaient les rôles de méchant et c'était excitant à regarder, à l'instar de Marlon Brando dans Le Parrain. Alors je me suis demandé : et si le personnage avait été une femme ? »

Naidoo est très intéressée par la perspective d'une coproduction BRICS, mais reste prudente. « Je veux une vraie collaboration », dit-elle. « Peu importe d'où vient l'histoire, nous devons tous y adhérer, en partager la vision et les risques. »

Jusqu'à présent, son expérience collaborative a été quelque peu différente. « Je me souviens de ce réalisateur suédois qui m'a contactée pour me demander de lui fournir des images d'archive. Ce n'est pas de la collaboration. C'est une source d'argent, mais dans le fond, ce que nous voulons, c'est créer notre propre cinéma. C'est la seule manière de grandir.

(Reportage de Chengdu)

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