2023-05-16 |
Rencontre avec un premier de cordée |
VOL. 15 MAI 2023 par François Essomba · 2023-05-16 |
Mots-clés: Cameroun |
Un PDG camerounais impulse un partenariat dynamique entre la Chine et son pays.
Jean Marie Aboganena (deuxième à gauche) et quelques hommes d’affaires camerounais en visite dans une usine de bus à Shanghai, en 2019. (COURTOISIE)
Jean Marie Aboganena est à la fois l’initiateur et l’organisateur des Journées économiques, industrielles et commerciales du Cameroun en Chine (JEICAC), une plateforme réunissant régulièrement des hommes d’affaires camerounais et chinois. En outre, il est le PDG de la société African Business Development and Representation (ABUDER), dont le siège est situé à Yaoundé, capitale du Cameroun.
Il a été un grand reporter pour des publications internationales prestigieuses, avant de se tourner vers les affaires. Il a compris que la diplomatie moderne dépendait de l’économie et s’est donc concentré sur la Chine, où il a utilisé son réseau pour aider les entrepreneurs camerounais à se rapprocher des Chinois. CHINAFRIQUE a voulu en savoir plus sur son rôle dans la promotion du partenariat entre le Cameroun et la Chine, afin de mieux comprendre les opportunités et les défis pour les entreprises des deux pays.
CHINAFRIQUE : Quelles sont les nouvelles opportunités qui s’ouvrent aux entrepreneurs camerounais et chinois suite à la levée des restrictions liées à la COVID-19 ?
Jean Marie Aboganena : Les entrepreneurs camerounais attendaient avec impatience la levée des restrictions afin de renouer le contact avec leurs partenaires et explorer de nouvelles opportunités. Au cours des trois dernières années, la crise sanitaire a créé un déséquilibre dans les activités établies entre la Chine et le Cameroun. Les importateurs camerounais ne parvenaient plus à importer leurs marchandises et la livraison de certains produits en Chine devenait compliquée. Tout fonctionnait au ralenti, que ce soit pour les structures assurant le transport de colis vers le Cameroun ou pour le transport maritime.
L’annonce de la levée des restrictions en Chine et la facilitation des voyages ont suscité un sentiment de satisfaction et de joie chez les opérateurs économiques camerounais, qui sont impatients de relancer leurs activités, notamment les voyages en Chine.
Pouvez-vous dire un mot sur le développement du partenariat depuis l’optimisation de la réponse à la COVID-19 ?
Au sein du Réseau des entreprises innovantes pour l’industrialisation complète du Cameroun, notre objectif est d’attirer un grand nombre d’entreprises chinoises pour qu’elles s’implantent dans le pays et y créent des industries innovantes. Cela permettrait de produire localement les biens de grande consommation qui nous font actuellement défaut.
Il est important de souligner que le gouvernement camerounais a lancé un programme dit d’import-
substitution, qui vise à réduire les importations et à encourager la production locale. Nous soutenons pleinement cette initiative et travaillons en collaboration avec le gouvernement pour la concrétiser.
Quelles sont les ambitions de ces partenariats à court terme ?
Actuellement, nous avons de nombreux partenariats avec des organisations en Chine. Nous travaillons avec beaucoup d’entreprises chinoises pour développer des projets dans plusieurs secteurs, tels que le BTP, l’eau et la transformation. Nous avons également l’ambition de créer une université technologique en collaboration avec une organisation chinoise. Nous prévoyons d’organiser des voyages d’affaires en Chine, ainsi que des expositions pour présenter des équipements et des machines fabriqués en Chine et au Cameroun. Ces initiatives sont destinées à aider les petites et moyennes entreprises (PME) camerounaises qui souhaitent se lancer dans la production et la transformation des produits locaux, en bénéficiant de l’expertise et de la technologie chinoises. Nous sommes convaincus que ces actions renforceront la coopération entre les deux pays.
En tant qu’initiateur d’une plateforme qui rassemble régulièrement des hommes d’affaires camerounais et chinois, pourriez-vous nous en dire plus sur la genèse et les moments clés de ces rencontres ?
Nous sommes partis du constat que le Cameroun, qui ambitionnait de devenir un pays émergent, n’était pas suffisamment ouvert sur le monde. Nous avons alors décidé de nous tourner vers la Chine afin de comprendre comment elle avait réussi à transformer son industrie. Nous avons ainsi lancé les JEICAC, dans le but d’encourager les PME camerounaises ainsi que les industries à se frotter aux géants chinois pour booster la production et les industries du Cameroun.
En 2018, nous avons organisé un voyage avec 20 entreprises, ainsi que quelques sociétés d’État telles que les ports de Douala et de Kribi, le ministère des Forêts et de la Faune, et la Chambre d’agriculture, des pêches, de l’élevage et des forêts du Cameroun, afin de nous rendre à Shanghai. En 2019, nous avons récidivé avec 30 entreprises et nous avons parcouru Shanghai et les provinces du Hunan et du Shandong pour établir des partenariats avec les entreprises chinoises.
Malheureusement, la COVID-19 est apparue au retour de notre voyage en Chine. Depuis lors, nous n’avons plus effectué de voyage, mais nous avons accueilli des partenaires chinois au Cameroun avec qui nous travaillons toujours. Nous prévoyons de relancer l’organisation de voyages en Chine, ainsi que des expositions avec certains industriels chinois au Cameroun.
Quels avantages les rencontres entre hommes d’affaires camerounais et chinois offrent-elles ?
Tout d’abord, la rencontre physique permet de rapprocher les parties et de créer une certaine sympathie ainsi qu’une confiance entre les partenaires, ce qui est particulièrement important dans le cadre du business to business. Ensuite, la visite des usines permet de découvrir comment sont fabriqués les produits importés, et de montrer de l’intérêt pour l’expertise chinoise. Les Chinois, quant à eux, sont encouragés à venir découvrir le Cameroun, à voir comment créer des structures localement dans le cadre d’une joint-venture et à apprécier le marché qui est assez riche car l’Afrique est un continent en construction. L’organisation de ces voyages a donc un impact considérable dans le renforcement de la coopération, et la création d’opportunités pour les hommes d’affaires camerounais et chinois.
Comment envisagez-vous l’avenir du partenariat entre le Cameroun et la Chine, ainsi que celui entre la Chine et l’Afrique dans son ensemble ?
Je pense que le partenariat entre la Chine et les pays africains se renforce chaque jour davantage. Sans l’aide de la Chine, de nombreux pays africains auraient connu des difficultés considérables. Bien que la récession économique ait eu des répercussions dans le monde entier, la Chine est venue en aide aux pays africains en facilitant leur développement.
Prenons l’exemple du Cameroun : la Chine a contribué à la construction de quatre grands barrages hydroélectriques, ainsi que de trois autoroutes reliant Douala à Yaoundé, Kribi à Lolabé et Nsimalen à Yaoundé. La Chine a également mis en place le projet « 500 000 ordinateurs », dans le cadre duquel j’ai eu le privilège d’être le partenaire local de l’entreprise Sichuan Telecom, qui a fourni 500 000 ordinateurs au Cameroun. Ces ordinateurs ont été distribués dans toutes les universités du pays, dans le cadre du projet « E-National Higher Education Network ». Je peux donc affirmer que la Chine a joué un rôle majeur dans le développement du Cameroun, ainsi que de nombreux autres pays africains.
Reportage du Cameroun
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