2025-03-12 |
Prêcher par l'exemple |
VOL. 17 / MARS 2025 par BUSANI NGCAWENI · 2025-03-12 |
Mots-clés: La voix de l'Afrique ; Afrique du Sud ; G20 |
La présidence sud-africaine du G20 en 2025, une opportunité pour passer de la rhétorique aux résultats concrets.
Le Président sud-africain Cyril Ramaphosa prononce un discours liminaire lors de la réunion des ministres des Afaires étrangères du G20, à Johannesburg, en Afrique du Sud, le 20 février. (GOUVERNEMENT D’AFRIQUE DU SUD)
L’Afrique du Sud prend désormais en charge la présidence du G20 pour l’année 2025, une occasion unique de renforcer l’impact du groupe sur les enjeux de développement mondial. Dans ce cadre, elle a accueilli, les 20 et 21 février à Johannesburg, la réunion des ministres des Affaires étrangères du G20, un événement clé en amont du sommet prévu en novembre. Parmi les participants figurait notamment le ministre chinois des Affaires étrangères, Wang Yi.
Si le G20 veut demeurer pertinent, il doit s’engager dans des réformes audacieuses, privilégier les besoins des régions marginalisées et aller au-delà de son image de simple « salon de discussion ». Depuis sa création en 2008 en réponse à la crise financière mondiale, cette plateforme réunissant les principales économies s’est imposée comme un espace incontournable pour aborder les défis mondiaux : stabilisation économique, lutte contre le changement climatique, transformation numérique et développement équitable. Pourtant, malgré cet élargissement de son agenda, les critiques persistent quant à son efficacité réelle, notamment pour les pays en développement.
Cette analyse examine l’évolution du programme de développement du G20 depuis sa création, en mettant en lumière des enjeux clés comme la croissance économique, l’action climatique, les infrastructures, la réduction de la pauvreté et le renforcement des capacités des États. Elle explore aussi le rôle des pays BRICS, en particulier la Chine, l’Inde et le Brésil, dans l’orientation des priorités du G20 vers les besoins du Sud global, et évalue la position stratégique de l’Afrique du Sud dans la promotion du développement du continent africain.
Croissances économiques inégales
La croissance et la reprise économiques ont toujours été au cœur des préoccupations du G20. Lors du Sommet de Washington en 2008, les membres s’étaient engagés à « restaurer la croissance mondiale et réformer les systèmes financiers ». L’année suivante, à Londres, des mesures budgétaires sans précédent, incluant un plan de relance mondial de 1 000 milliards de dollars, ont été mises en place.
Cependant, ces efforts ont rapidement révélé des disparités : la reprise économique a été « inégale », les économies avancées progressant plus rapidement que les marchés émergents, comme l’a souligné le communiqué du Sommet de Saint-Pétersbourg en 2013. Conscientes de cette injustice, la Chine et l’Inde ont plaidé pour des réformes structurelles au sein des institutions financières mondiales. Le Sommet de Hangzhou en 2016 a marqué une reconnaissance officielle du besoin d’adapter l’architecture économique mondiale aux réalités des marchés émergents.
La lutte contre la pauvreté est un thème récurrent dans les discussions du G20, souvent abordé sous l’angle de la croissance inclusive et de la protection sociale. Le Sommet de Cannes en 2011 avait mis l’accent sur des programmes sociaux ciblés, tandis qu’en 2018, à Buenos Aires, le développement de la jeunesse et l’égalité des sexes étaient devenus des priorités.
Malgré ces engagements, les progrès restent limités. Les BRICS ont promu des initiatives de renforcement des capacités, notamment dans l’éducation et la formation professionnelle, mais les résultats concrets se font attendre. Le groupe de travail du G20 sur l’emploi des jeunes, créé en 2011, peine à produire des résultats tangibles, notamment en Afrique subsaharienne où le chômage des jeunes demeure alarmant.
Les infrastructures jouent un rôle clé dans les stratégies de développement du G20. Le Consensus de Séoul en 2010 a mis en avant l’investissement dans ce domaine comme un moteur du développement durable, une priorité renforcée à Brisbane en 2014 avec la Global Infrastructure Initiative, destinée à mobiliser des capitaux privés pour combler les déficits de financement.
Avec le temps, les BRICS ont pris une place centrale dans cette dynamique. L’initiative chinoise « la Ceinture et la Route » et la coopération Sud-Sud prônée par l’Inde ont introduit une nouvelle approche du développement des infrastructures. Le Sommet de Hangzhou a mis en avant l’industrialisation des pays du Sud, tandis que celui de New Delhi en 2023 a insisté sur le lien entre infrastructures numériques et industrielles.
L’influence grandissante des BRICS
Les BRICS jouent un rôle essentiel dans la redéfinition des priorités du G20. La Chine et l’Inde ont plaidé pour une réforme de la gouvernance financière mondiale afin de corriger les déséquilibres structurels des institutions de Bretton Woods.
La présidence brésilienne du G20 en 2024 a marqué une inflexion notable, avec un accent mis sur l’inclusion sociale, le développement durable et la coopération Sud-Sud. Le Brésil a jeté les bases d’une présidence sud-africaine ambitieuse en 2025, qui devra relever le défi de représenter un continent souvent marginalisé dans les grandes instances internationales.
En tant que seul représentant africain au G20, l’Afrique du Sud a la responsabilité de porter les revendications du continent. Sa présidence sera l’occasion de mettre en avant des enjeux cruciaux : viabilité de la dette, adaptation au climat, transformation numérique. Toutefois, elle devra naviguer avec prudence dans un contexte géopolitique complexe, afin d’éviter que les priorités africaines ne soient éclipsées par des intérêts plus larges.
Le G20 a certes élargi son agenda, mais ses progrès restent inégaux et fragiles. Bien que les BRICS aient poussé le groupe à mieux prendre en compte les réalités du Sud global, l’écart entre les discours et les résultats concrets persiste. La présidence sud-africaine de 2025 représente une opportunité précieuse pour combler ce fossé et promouvoir des actions plus concrètes en faveur des pays africains.
Si le G20 veut rester pertinent, il doit aller au-delà des déclarations d’intention et mettre en œuvre des réformes ambitieuses pour un développement plus équitable.
L’auteur est directeur de l’École nationale de gouvernement d’Afrique du Sud.
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