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Afrique
  2016-05-03
 

L'Afrique est belle

par Rachel Richez | VOL.8 MAI 2016 CHINAFRIQUE
Mots-clés: Abderrahmane Sissako;Afrique

Timbuktu a remporté sept Césars, dont celui du meilleur réalisateur. Abderrahmane Sissako est le

premier Africain à recevoir ce prix

 

Quand un réalisateur mauritanien vient  présenter un film sur le Mali en Chine, on ne s’attend pas forcément à voir une salle comble. Mais il ne s’agit pas de n’importe quel réalisateur ou de n’importe quel film. Francophones, étudiants en cinéma et autres cinéphiles étaient réunis aux Archives du film de Chine pour assister à la projection de Timbuktu en présence du réalisateur, Abderrahmane Sissako. Nominé pour l’Oscar du meilleur film étranger en 2015, le film a remporté sept Césars la même année, faisant du réalisateur le premier Africain à obtenir le César du meilleur réalisateur. Un film fort puisqu’il raconte la tragique actualité du Mali. Le Mauritanien a en effet choisi d’évoquer la prise de Tombouctou, « perle du désert », par les djihadistes en 2012. Marquant l’ouverture des Rencontres du cinéma francophone à Beijing – se tenant du 11 au 29 mars dans 20 villes de Chine – la projection a été suivie d’un débat entre Abderrahmane Sissako et Yang Chao, célèbre réalisateur chinois. 

  

Résistance pacifique  

Face à l’intégrisme islamiste, la population résiste comme elle le peut. C’est cette résistance qui est dépeinte par Abderrahmane Sissako dans Timbuktu. Ainsi, malgré l’interdiction de jouer de la musique, l’incroyable voix de Fatou (Fatoumata Diawara) résonne chaque nuit dans les rues de Tombouctou. Après la prohibition du football, les enfants de la ville font des matchs sans ballon. Avec un plaisir intact, ils driblent et marquent des buts imaginaires. Sur le marché, une vendeuse de poisson s’oppose formellement aux nouvelles lois des djihadistes qui lui imposent de porter des gants : « Porter des gants pour vendre du poisson ? Comment je les arrose avec des gants ? Nos parents nous ont élevé dans l’honneur. Sans porter de gants. Ça suffit ! Vous voulez couper des mains ? En voilà deux. Coupez-les ! »  

Si ces scènes sonnent si juste c’est que le réalisateur est allé à la rencontre des Maliens victimes de cette occupation. Il s’est inspiré de leurs expériences, de leurs souffrances. « Je n’ai pas construit un décor, je n’ai pas fabriqué de personnages, je n’ai pas inventé de costumes précis. J’ai peint l’Afrique comme elle est, elle est belle, elle est forte. Et ces femmes courageuses aussi », confiait Abderrahmane Sissako à CHINAFRIQUE. 

  

Obscurantisme et barbarie 

Face à cette résistance, le cinéaste présente la terreur d’un extrémisme sanguinaire. On assiste ainsi à la lapidation d’un couple non marié et suit le parcours d’une mère tentant en vain d’empêcher le mariage forcé de sa fille. On retrouve également la belle Fatou, voilée et à genoux, payant le prix de son amour pour la musique. Les coups de fouets ne l’arrêtent pourtant pas, ils rythment au contraire son chant de bravoure. De leur côté, les bourreaux ne sont pas diabolisés, le Mauritanien a choisi de montrer leur humanité. Ils fument en cachette, parlent de football tout en l’interdisant et dansent quand ils sont seuls. L’absurde et le ridicule de la situation contrastent avec la violence de leurs actions.  

En montrant cette barbarie par des images d’une incroyable beauté, le réalisateur nous force à ne pas détourner le regard. Un calme déroutant se dégage des paysages désertiques, participant à la profondeur de ce film très poétique. Timbuktu s’ouvre sur une gazelle tentant d’échapper aux tirs des djihadistes, comme le symbole d’une liberté traquée, attaquée. Le film permet ainsi d’évoquer une actualité parfois difficile à aborder. « Je suis très content. C’est un bon film, parce que c’est un film qui va sensibiliser, qui va permettre à la jeunesse mauritanienne de comprendre ce qu’est le djihadisme », se réjouissait le jeune Ismaila Sow, venu rencontrer son compatriote cinéaste aux Archives du film de Chine.  

  

Un espoir pour l’Afrique 

Et le jeune étudiant en business n’était pas le seul à venir rencontrer Abderrahmane Sissako. De nombreux jeunes africains espéraient obtenir un précieux « selfie » avec le plus célèbre des réalisateurs du continent. « Monsieur Sissako représente pour nous un espoir, pour l’Afrique. Le fait de voir aujourd’hui la projection du film Timbuktu, qui représente mon pays le Mali, vraiment, ça me fait vraiment plaisir. Je suis très très content », confiait le jeune Amadou Togo à CHINAFRIQUE. 

Si la ville a été libérée par des troupes françaises et maliennes en 2013, la région continue de subir la pression des groupes djihadistes. Le film a d’ailleurs été tourné en Mauritanie, sous la protection de l’armée. Après En attendant le bonheur (2002) et Bamako (2006), le réalisateur continue de montrer une Afrique très forte. « Malgré les difficultés qui peuvent exister sur ce continent-là, j’ai toujours envie de montrer un continent digne, débout », expliquait Abderrahmane Sissako à CHINAFRIQUE 

  

Des contacts culturels 

Yang Chao ne tarissait pas d’éloges sur les prouesses techniques du Mauritanien. Celui-ci l’a très humblement remercié avant de l’inviter à enseigner à la Ciné Fabrique à Lyon, école qu’il préside. « Je pense que ce qui est important c’est de créer des contacts culturels », a affirmé le cinéaste. Le réalisateur de Dai bi (2002) et Lu cheng (2004) s’est dit très honoré par cette invitation.  

Les relations Chine-Afrique intéressent Abderrahmane Sissako qui travaille actuellement sur un projet entre les deux régions, « une histoire d’amour » a-t-il confié. « Je pense que la Chine apporte beaucoup à l’Afrique, l’Afrique apporte beaucoup à la Chine, donc j’ai un regard positif. Je sais qu’il y a beaucoup de Chinois qui vivent en Afrique et des Africains qui commencent à vivre en Chine. Ce n’est pas des rencontres toujours faciles mais ce sont des rencontres irréversibles », concluait le cinéaste.

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