Les districts chinois misent sur leurs atouts locaux pour allier innovation, spécialisation et intégration urbaine-rurale. 

Un producteur de roses manipule des fleurs dans le district de Pingyin, province du Shandong, le 15 mai 2024. (XINHUA) 

L’économie des districts constitue une forme économique régionale complète et cohérente, façonnée par des conditions socio-historiques spécifiques et exerçant une influence profonde sur l’ensemble du tissu économique et social. Elle conserve un rôle central dans la modernisation de la Chine. En 2024, la Conférence centrale sur le travail économique a appelé à en promouvoir vigoureusement le développement. 

Ponts territoriaux 

Développer l’économie des districts constitue une étape clé pour fluidifier le circuit économique national. Cette dynamique repose sur une circulation harmonieuse et une allocation optimale des ressources entre zones urbaines et rurales, renforçant à la fois la connectivité et l’équilibre économiques afin de former un système organique et synergique. 

Un district, pierre angulaire de l’économie nationale, rassemble les trois grands secteurs : primaire, secondaire et tertiaire, ainsi que l’ensemble des chaînes de production, de distribution, d’échanges et de consommation. Interface entre villes et campagnes, il incarne une économie régionale façonnée par des spécificités locales. En ce sens, le niveau de développement des districts conditionne directement la qualité du circuit économique national. Adapter leur essor aux réalités locales, tout en fluidifiant les échanges entre villes et campagnes, est indispensable pour dépasser la structure duale urbaine-rurale, libérer le potentiel de la demande intérieure et élargir l’espace du grand circuit intérieur. 

Le développement de qualité en est la voie maîtresse. Longtemps, les districts chinois ont connu une croissance extensive, reposant sur l’exploitation des ressources et une main-d’œuvre abondante et peu coûteuse, évoluant d’une économie agricole monolithique vers un tissu économique diversifié et intégré. Mais face à l’exode rural, aux contraintes environnementales et à une concurrence extérieure accrue, certains sont menacés par le déclin industriel, voire par le dépeuplement. Le modèle extensif d’hier n’est plus soutenable. La nouvelle étape exige d’allier croissance quantitative et amélioration qualitative, de s’engager résolument sur la voie du développement de qualité. Nombre de districts disposent déjà d’une base solide, fruit de leur progression économique, leur permettant d’opérer cette transition. 

Ce développement qualitatif s’inscrit désormais dans un contexte spatio-temporel renouvelé. L’intégration urbaine-rurale, portée par des innovations institutionnelles, les percées technologiques majeures et la réorientation des structures productives dans un contexte d’ouverture économique, ouvre de nouveaux leviers de progrès. Les technologies de l’information de nouvelle génération et les réseaux de transport raccourcissent les distances, redessinent les liens de production, de sociabilité, d’innovation et de vie entre villes et campagnes, et modifient en profondeur les circuits de ressources. Les districts peuvent ainsi accueillir des industries délocalisées et s’inscrire dans des stratégies régionales plus vastes. Parallèlement, le déploiement des technologies numériques et vertes, appliquées à la production, à la transformation, à la distribution, à la consommation et aux services sociaux, modernise les secteurs traditionnels et fait éclore de nouveaux modèles et filières économiques. 

Une employée peint des moyeux d’éoliennes dans un parc industriel de fabrication d’équipements éoliens du district de Huimin, province du Shandong, le 29 août 2024. (XINHUA) 

Terroirs d’avenir 

Par nature, l’économie des districts est une économie de singularités. Elle doit s’appuyer sur les lois du marché, se modeler selon les réalités locales et bâtir un modèle de développement économique aux traits marqués, complémentaires et compétitifs. 

Former des industries dominantes et durables suppose d’adapter leur développement aux spécificités locales. Moderniser les filières traditionnelles ou créer de nouveaux secteurs passe par la valorisation des atouts propres à chaque territoire : produits du terroir et agroalimentaire pour les zones agricoles ; amélioration des infrastructures et clusters manufacturiers pour les régions industrielles ; alliance du tourisme, de l’agriculture et de la culture pour les zones touristiques ; exploitation de la proximité des grandes villes ou des axes de transport pour accueillir des industries délocalisées et diversifier l’économie. 

L’innovation dans l’allocation des facteurs urbains et ruraux est essentielle à une économie des districts dynamique. Elle passe par la libre circulation et une répartition optimisée des ressources, la suppression des obstacles institutionnels et leur orientation vers les secteurs productifs avancés. Moderniser les chaînes industrielles et créer un marché unifié ville-campagne permettront aux flux urbains d’irriguer les zones rurales et de revitaliser leurs industries. 

Renforcer la capacité d’innovation technologique des industries des districts est tout aussi essentiel. L’innovation scientifique et technique est le moteur du développement, mais viser exclusivement l’innovation originale reste irréaliste pour nombre de territoires. Il s’agit plutôt de favoriser, par différents moyens, l’intégration entre avancées technologiques et innovation industrielle. 

Le soutien aux industries locales est déterminant pour le dynamisme économique des districts. Il s’agit de renforcer leur capacité d’accueil par une urbanisation adaptée, la modernisation des zones industrielles et l’extension des réseaux commerciaux. Les grands projets doivent se concentrer dans les zones industrielles des districts, les unités de transformation agricole dans les centres ou nœuds logistiques des bourgs, et les filières comme l’agrotransformation, le commerce électronique ou l’entreposage frigorifique dans les villages centraux, afin d’organiser efficacement les échanges entre villes et campagnes. 

Grâce à la spécialisation, à la numérisation et à des politiques ciblées, l’économie des districts chinois entre dans une phase de développement de qualité. Les réussites illustrent une modernisation fondée sur l’innovation scientifique et l’intégration villes-campagnes, qui permet aux districts de passer de simples maillons industriels à moteurs technologiques. 

L’auteur est chercheur à l’Institut chinois de macroéconomie.