Des jeunes Kényans formés aux technologies numériques grâce à l’appui de la Chine. 

Des employéesde Kilimall font la promotion de produits par diffusion en direct à Mlolongo, au Kenya, le 3 juin. (XINHUA) 

Au cœur de la nouvelle cité Konza Technopolis, le bourdonnement des ordinateurs annonce une ère nouvelle pour la jeunesse kényane. Dans cet espace baigné du cliquetis régulier des claviers, les jeunes apprennent à dompter les arcanes de la programmation, de l’intelligence artificielle et du cloud computing. Situé à 60 km de Nairobi, ce projet phare du gouvernement kényan, surnommé la « Silicon Savannah », est en passe de devenir un parc scientifique et un pôle d’innovation. 

La révolution numérique qui traverse le Kenya est largement portée par la Chine. Au‑delà de son rôle dans la construction d’infrastructures, elle investit stratégiquement dans le développement des compétences, à Konza comme dans d’autres régions du pays. Cet engagement se traduit par la création de centres de formation, l’octroi de bourses, et la mise en place de partenariats avec des établissements d’enseignement locaux, notamment au bénéfice des communautés les plus vulnérables. 

L’un des protocoles d’accord les plus significatifs signés par le Président kényan William Ruto lors de sa visite d’État en Chine, en avril dernier, concerne précisément la formation professionnelle. Ce texte ouvre la voie à un transfert de compétences technologiques, à la co‑élaboration de programmes éducatifs et à des initiatives d’alphabétisation numérique ciblées vers la jeunesse kényane. Les centres de formation professionnelle bénéficieront d’un accompagnement chinois à travers la formation de formateurs, des équipements modernes et des approches pédagogiques éprouvées. 

Une priorité : la jeunesse 

Pour renforcer l’insertion professionnelle des jeunes dans le secteur numérique, le géant chinois des télécommunications Huawei a signé en avril un protocole d’accord avec le Département d’État kényan chargé de l’enseignement et la formation techniques et professionnels (EFTP), afin de promouvoir le développement des compétences numériques au sein de la main‑d’œuvre locale, selon l’Agence de presse Xinhua. « Cette collaboration avec Huawei constitue une étape essentielle pour doter la jeunesse kényane des compétences numériques requises pour réussir dans l’économie mondiale », souligne Esther Mworia, secrétaire principale du Département d’État chargé de l’EFTP. 

L’académie des TIC parrainée par Huawei à l’Université Kenyatta de Nairobi incarne cette ambition. Conçu à l’origine pour initier aux fondamentaux du réseau informatique, le programme propose aujourd’hui des certifications de haut niveau en intelligence artificielle et en cloud computing. 

Les retombées sont bien réelles. Brenda Atieno, 23 ans, n’avait quasiment jamais utilisé d’ordinateur avant de rejoindre l’académie Huawei. « Le numérique me semblait irréel », raconte‑t‑elle. Aujourd’hui, elle est ingénieure cloud junior : un rêve devenu réalité grâce à cette formation qui lui a donné des compétences techniques et la confiance nécessaire. 

Son parcours n’a rien d’un cas isolé. Partout dans le pays, des initiatives similaires voient le jour, portées par les nouveaux accords de coopération numérique entre le Kenya et la Chine. « Quand mon père est décédé il y a deux ans, j’ai perdu tout espoir. Il était le pilier de notre famille. Ma mère est sans emploi et ma sœur encore au lycée. Cette opportunité m’a ouvert de nombreuses portes », ajoute‑t‑elle. 

Changer des vies 

Le Kenya fait figure de pionnier numérique en Afrique de l’Est, fort d’un écosystème technologique en pleine effervescence et d’une population jeune avide de nouvelles technologies. Mais cet essor reste inégalement réparti, notamment dans les zones rurales ou marginalisées, où l’accès aux compétences numériques demeure limité. C’est précisément là que les entreprises chinoises interviennent, œuvrant à réduire les écarts. Le transfert de compétences, au cœur de l’investissement chinois dans le numérique, constitue la clé d’une croissance inclusive et durable. 

Dans les établissements de formation professionnelle kényans, les partenariats avec des entreprises chinoises permettent de moderniser les programmes et d’offrir aux étudiants un apprentissage pratique des technologies les plus récentes. Cette approche ancrée dans la réalité du terrain prépare efficacement les jeunes à un marché du travail en constante mutation. « La collaboration avec Huawei a transformé notre département », affirme Anne Mutahi, directrice de la faculté d’informatique à l’Université d’agriculture et de technologie Jomo Kenyatta. L’entreprise a fourni du matériel, formé les enseignants et offert des stages, rendant les diplômés directement opérationnels. 

Au‑delà de l’enseignement formel, des bootcamps de codage soutenus par la Chine se multiplient au Kenya, offrant aux jeunes sans diplôme universitaire un accès rapide au secteur technologique. « Je n’aurais jamais imaginé travailler dans le numérique », confie Samuel Kamau, 20 ans, originaire de Kibera, un quartier défavorisé de Nairobi. Après six mois de formation, il a décroché un emploi dans le commerce en ligne. « Ça a changé ma vie. » 

Gloria Wawira, directrice du Conseil national de la jeunesse (NYC), estime que les avancées chinoises offrent des leçons précieuses pour le Kenya dans sa marche vers une économie fondée sur les compétences. Selon elle, la coopération sino‑kényane favorise le transfert de technologies, stimule l’innovation et positionne le pays comme nouvelle frontière du télétravail et des services externalisés. 

Elle a confié à Xinhua que le NYC s’était associé à Huawei pour lancer DigiTruck, un programme mobile d’alphabétisation numérique dans les zones défavorisées. D’autres formations en codage et en intelligence artificielle visent à autonomiser durablement la jeunesse kényane. 

Reportage du Kenya